Touchés par la crise économique, les Français ont rogné pour la première fois en 2013 dans leurs dépenses sur les hippodromes et dans les casinos ou derrière leur écran au poker en ligne.
L’an dernier, les dépenses de jeux d’argent et de hasard ont en effet baissé en France de 2,5% à 31,7 milliards d’euros contre 32,5 milliards en 2012, selon une enquête de l’AFP.
En 2012, le rythme d’augmentation des dépenses de jeux d’argent en France avait déjà sérieusement ralenti à 2,8 % après une croissance de 16,8% entre 2010 et 2011.
Le Pari mutuel urbain (PMU), regroupant 50 sociétés de courses, de plat, de trot et d’obstacles, a enregistré une baisse d’enjeux de 0,9% à 10,4 milliards d’euros.
Les 18 opérateurs agréés de jeux en ligne (poker, paris sportifs, paris hippiques) ont totalisé 8,474 milliards de mises (-10%).
Les 197 casinos ont atteint un total de 2,18 milliards (-4,25%) de produit brut des jeux (PBJ, différence entre les mises des joueurs et leurs gains).
La Française des Jeux (FDJ), détenue à 72% par l’Etat, a été le seul opérateur à avoir augmenté ses ventes (+1,8%) à 12,35 milliards.
Si les dépenses quotidiennes des Français s’élèvent tout de même à 86,8 millions – soit l’équivalent du prix d’un Airbus A321 Neo -, elles sont pour la première fois en baisse.
C’est un coup d’arrêt, puisqu’elles avaient auparavant quasiment doublé en dix ans, passant de 47,5 millions à 89 millions en 2012, un record. Cette hausse spectaculaire était due à l’augmentation de l’offre de jeux et à l’arrivée en 2010 en France des paris sportifs et hippiques et du poker en ligne.
Raisons spécifiques
Ces dépenses restent d’ailleurs en 2013 “à des niveaux très élevés, mais le ralentissement est significatif”, concède le président de l’Institut Médiascopie Denis Muzet.
“On touche là aux limites du principe qui veut que l’achat d’un ticket de loterie constitue une consolation ou un remède contre la crise économique ou la déprime”, ajoute ce sociologue. La baisse des dépenses de jeux est aussi liée à “la perte de l’optimisme dans le pays car beaucoup de Français estiment que l’horizon est bouché”, dit-il.
Comme pour leurs dépenses de cinéma, en baisse de 5,3% en 2013, les Français ont choisi de moins jouer à Euro Millions, de moins parier sur les hippodromes ou au poker sur internet en raison de la crise. A cette explication générale, les opérateurs de jeux ajoutent des raisons plus spécifiques.
Ainsi la FDJ estime que la baisse de 8,3% des recettes d’Euro Millions est due à l’absence en 2013 de très grosses cagnottes qui attirent les joueurs. De même, le PMU analyse la baisse des mises hippiques par l’annulation de courses, comme le Quinté +, pour raisons météo ou de mouvement social.
Les loteries, comme les jeux de grattage de la FDJ qui ont totalisé un volume de 5,56 milliards d’euros en hausse de 3,3%, “résistent bien car le principe psychologique selon lequel chacun est égal devant la chance continue à fonctionner”, explique Denis Muzet.
Mais, ajoute-t-il, ce sont les “jeux intensifs mobilisant le plus d’investissements psychologiques”, comme le poker en ligne, qui baissent le plus car les arbitrages se font d’abord sur ce type de jeux.
“Même avec la crise, souligne le sociologue, les Français gardent le besoin de jouer.” Il ajoute que “les gros gains et la médiatisation des gagnants ne culpabilisent plus les gagnants”.
Denis Muzet relève enfin que la bonne tenue de l’activité des points de vente de la FDJ (34.400) et du PMU (12.200), présents dans quelque 12.000 communes françaises, “crée du lien social” car l’on y partage “aussi bien les inquiétudes sur l’avenir que les espoirs d’une vie meilleure”.
© 2014 AFP