Bien qu’on la savait déjà inscrite dans le registre des quasi-certitudes et qu’elle relevait du secret de Polichinelle, la levée des sanctions qui pesaient sur le Mali a bel et bien donné lieu à un sentiment général de soulagement au sein de l’opinion nationale. La décision consécutive au Sommet d’Accra, d’hier dimanche 3 juillet, libère notre pays du poids étouffant d’un blocus-encerclement qui avait été poussé très loin. Mais les chefs d’Etat de la CÉDÉAO placent la balle dans le camp des autorités maliennes. Auxquelles il est demandé de ne pas se placer sur la ligne de départ des futures courses électorales.
La page froissée et entachée par l’encre des restrictions et des entraves est tournée. Celle plus lisse et plus agréable des perspectives optimistes est ouverte. On l’espère.
Qu’on le reconnaisse ouvertement ou que, par principe nationaliste ou fierté idéologique, on n’ose l’admettre qu’à demi-mots, le fait est là : nous sommes tous soulagés. Enfin !
Notre pays avait crucialement besoin de voir se desserrer autour de son cou la cravate d’étranglement dont le nœud étroitement serré gênait autant la respiration financière que la marche économique. Ça y est désormais. Le feu vert donné par les chefs d’Etat de la CÉDÉAO à la levée de toutes les sanctions qui nous frappaient, élargit de nouveau le champ des possibilités pour notre pays. D’abord, le soulagement est diplomatique. Notre patrie peut, avec une relative sérénité, quitter sa position de tranchée diplomatique dans laquelle elle s’était placée pour soutenir la vague concentrée des adversités et résister à la pression quasi générale des condamnations. Plus question d’être seul contre tous. De l’énergie défensive accrue économisée donc. Des efforts de représailles sans fin économisés également. Ceci est indéniablement une situation plus confortable qui augmente la marge de manœuvre dans la recherche de nos innombrables problèmes internes.
Ensuite, le Ouf de soulagement est économique. Le Mali, tout comme ses voisins, retrouve cette connexion irremplaçable entre les économies de la sous-région. Une interconnexion dont les câbles débranchés avaient provoqué une fièvre typhoïde dans le corps de notre économie. Voilà les échanges commerciaux qui reprennent sans aucun frein ni au déplacement des personnes ni à celui des biens ! Des millions d’emplois menacés ou mis en veilleuse ou détruits vont plus ou moins rapidement être relancés. Une perspective souriante pour l’ensemble des acteurs du secteur formel et surtout ceux de l’informel.
Aussi, il est politique le soulagement. Les autorités de la Transition, libérées de la pression diplomatique maximale du voisinage, ont maintenant l’occasion opportune de construire avec l’ensemble des acteurs maliens la meilleure approche pour atteindre la destination de la Transition. Le chronogramme soumis à étude étant connu, il appartient à nos dirigeants de créer toutes les conditions d’une participation inclusive de la classe politique afin de régler les détails des votes à venir.
Le vent de la quasi-normalité souffle ainsi de nouveau sur notre pays qui, au lieu d’être continuellement occupé à compter ses ennemis et à parer les coups, peut marcher sur la route de l’avenir proche avec moins d’entraves attachées à ses pieds et moins de mines posées sur son itinéraire. Aux Maliens à présent, nos gouvernants en tête, de faire l’analyse la plus pertinente de cette crise à pluri-épisodes. Et d’en tirer les meilleurs enseignements afin que soient enfin derrière nous : les grandes souffrances que nous avons dû endurer, les erreurs que nous avons pu commettre, les logiques (dont certaines passionnées) que nous avons embrassées et que nous aurions pu éviter, mais surtout les divisions internes alimentées et attisées que nous n’aurions jamais dû vivre.
MOHAMED MEBA TEMBELY
Source: Les Échos- Mali