C’est la première fois, depuis 2002, que le Rassemblement pour le Mali (RPM) échoue à franchir le 1er tour de l’élection des députés de l’Assemblée nationale dans la circonscription électorale de la commune IV du district de Bamako. Une défaite historique dans le bastion de son président fondateur, Ibrahim Boubacar Kéïta.
En 2002, la liste de la coalition “Espoir 2002” avec Ibrahim Boubacar Kéïta du Rassemblement pour le Mali (RPM) et Oumar Kanouté du Mouvement Patriotique pour le Renouveau (MPR), a remporté haut la main, le scrutin législatif dès le 1er tour avec plus de 57,07%, soit 8 398 voix. La liste ADEMA-CDS (Fanta Traoré et Siriman Bathily) et celle du RND (Daye Tall et Aoua Tamboura) sont arrivées respectivement deuxième et troisième avec 2. 753 voix (18,71% et 1. 058 voix (7,19%). Le taux de participation était de 27,01%.
Arrivé troisième à l’élection présidentielle d’avril 2002, l’ancien Premier ministre IBK accède facilement au perchoir pour devenir la deuxième personnalité du pays après le général président Amadou Toumani Touré-ATT. Cinq ans après, c’est-à-dire en 2007, les choses se compliquent pour le président sortant du parlement qui brigue un second mandat. IBK est surpris par la montée en puissance d’un jeune loup en la personne de Moussa Mara qui conduit une liste indépendante du même nom.
A 32 ans, Moussa Mara obtient 5. 044 voix (30,68%) contre 5. 212 voix (31,71%) pour la liste du RPM avec un taux de participation de 12%. L’homme qui avait résisté à la vague du ‘’takokélé’’ du président – candidat en commune IV est mis en ballotage défavorable. Toutefois, le tisserand en chef échappe à l’humiliation politique grâce à une union sacrée des partis politiques autour de sa candidature. A l’issue du second tour crédité d’un taux de participation de 12,26%, il est réélu député, in extremis, avec 8. 616 voix (51,61%) contre 8. 179 (48,39) pour Moussa Mara qui prend sa revanche en 2009 en arrachant la mairie des mains des Tisserands.
Des ralliements pour départager Mara et Zé
Appelé au gouvernement en septembre 2013 comme ministre de l’Urbanisme et de la Politique de la ville, Moussa Mara ne rebelote pas aux élections législatives. Il aligne la secrétaire générale de son parti d’alors, Assétou Sangaré. En alliance avec l’ADEMA-PASJ qui a présenté le pharmacien Daye Tall, Yèlèma perd le scrutin au second tour face au RPM renforcé par le mouvement politico-religieux Sabati.
Les résultats provisoires du 1er tour des élections législatives du 29 mars 2020 placent la liste de Moussa Mara en tête avec 8. 029 voix (29,08%) suivie de l’UDD-PSDA conduite par l’opérateur économique, Hamady Sangaré dit Zé créditée de 5. 383 voix (19,50%). L’alliance RPM-ADEMA-PASJ arrive en troisième position. Depuis 2002, c’est la première fois que le RPM échoue à accéder au second tour de l’élection législative en commune IV. Un coup dur pour les tisserands dans le fief de leur président fondateur, IBK. Ces derniers temps, la formation présidentielle s’est fracturée avec des querelles de clochers ayant opposé différents leaders locaux. Pour ne rien arranger, le député sortant, Moussa Diarra, a joué la dissidence en ralliant la CODEM. Aussi, la présente défaite est un désaveu cinglant pour le secrétaire politique de l’ADEMA, non moins ministre de l’aménagement du territoire et du plan, Adama Tiémoko Diarra, qui a parrainé la liste. Cette défaite historique parachève la levée de la mainmise du RPM sur la commune IV.
Moussa Mara est certes en tête, mais son parti peine à maintenir le cap. Des problèmes internes ? Toujours est-il que la jeune formation politique qui va fêter bientôt ses dix ans, a subi plusieurs défections. Le Parti social-démocrate africain (PSDA) d’Ismaël Sacko et le Parti pour le Renouveau et le Développement (PRD-Malikoura ni Nyetaa) d’Assétou Sangaré sont sortis de ses entrailles.
Les ralliements des recalés du 1er tour seront décisifs pour départager les deux listes au soir du 19 avril prochain. Les listes PARENA- M Plus Ramata, URD-PRVM Fasoko et ASMA-MPM seront très courtisées dans les jours à venir.
Hamady Sangaré ne lésine pas sur les moyens pour réussir son baptême politique en devenant député à l’Assemblée nationale. L’opérateur économique, fils d’un ancien militaire qui a survécu à la détention dans le bagne de Touadenit, est proche de la famille présidentielle. Probablement, il pourra bénéficier du soutien du Rassemblement pour le Mali et de l’ADEMA-PASJ et d’autres formations politiques comme le PRD d’Assétou Sangaré. L’ancien Premier ministre d’IBK, Moussa Mara, va jouer son va-tout pour sauver son honneur et clouer le bec à ses détracteurs qui ne le rateront pas en cas de défaite. Il a forcément besoin d’une victoire pour continuer son ascension politique.
Chiaka Doumbia
Le Challenger