Vendredi 4 mai 2018, nous apprenons de nos confrères de l’Agence France Presse du retour de l’armée malienne à Kidal après quatre ans d’absence. Les autorités veulent faire de cette annonce une preuve de compétence et de crédibilité aux yeux des citoyens maliens voire de la communauté internationale. Mais en réalité elles doivent en avoir honte. Voilà les raisons.
Depuis le combat farouche déclenché vaillamment par l’armée loyale, républicaine du Mali contre des groupes terroristes en 2014 à Kidal après le départ du Premier ministre à l’époque de Moussa Mara ; de 2014 jusqu’en 2018 les autorités se sont montrées incapables de faire venir l’armée malienne dans cette zone sous le contrôle des indépendantistes de l’Azawad.
2018, année spéciale puisque c’est une année électorale où les prémisses montrent à merveille que le président sortant, Ibrahim Boubacar Keita, serait candidat à sa propre succession. À ce titre tous les moyens sont mis en œuvre pour assainir l’image de cette épave qui mérite d’être jetée pour avoir passé toutes ces années à la tête de l’État sans parvenir à réaliser les objectifs qu’il s’était fixés. La lutte contre le chômage des jeunes, la résolution des crises éducatives à travers l’offre des ordinateurs à chaque étudiant, l’éradication de la crise du Nord, la lutte contre le chômage, etc. ; constituaient entre autres des objectifs de ce régime moribond qui veut se vanter aujourd’hui du retour de l’armée à Kidal.
En effet, près de 17 soldats maliens ont foulé le sol de Kidal le vendredi dernier avec pour dessein de participer aux patrouilles mixtes auprès des combattants de l’ex-rébellion et des groupes progouvernementaux. Une source militaire confirme ce retour aux journalistes de l’AFP : « Un détachement de l’armée malienne est arrivé dans la nuit de jeudi à vendredi à Kidal pour participer au Mécanisme opérationnel de coordination (MOC).» Cela constitue certes une grande avancée dans le processus d’instauration de la paix au Mali. C’est d’ailleurs un point crucial servant de prélude au processus de désarmement, de démobilisation et de réinsertion (DDR) comme prévue par l’Accord pour la paix et la réconciliation nationale issue du processus d’Alger en 2015.
Le MOC, Mécanisme opérationnel de coordination, est composé de l’armée malienne, des ex-rebelles, des combattants des groupes progouvernementaux. Ce mécanisme constitue une condition sine qua nond’instauration de la confiance entre les différents groupes afin de permettre leur coopération pour un Mali uni et prospère.
Nonobstant toutes ces observations et toutes ces importances, le gouvernement ne doit pas se servir de ce retour de l’armée à Kidal en faisant comme si c’est cette localité qui constitue la priorité des priorités. Les près de 400 écoles fermées à cause de la crise ne disent rien au gouvernement apparemment ? Au centre du pays, il y a près de 165 écoles fermées. Des conflits interethniques sont monnaie courante. La gravité de ces crises dénote une absence prolongée des autorités de l’État. À Mopti aussi bien que dans le pays dogon, les civils se regroupent pour assurer la sécurité de leur personne et de leurs biens. Au Ké Macina, la population fait de plus en plus confiance à Amadou Koufa, le prédicateur musulman source de certaines exactions dans cette zone, parce qu’il est plus proche d’elle et assure le plus souvent sa sécurité. Toutes ces pratiques dénotent de l’absence des autorités de l’État dans ces zones. Mais aujourd’hui, elles veulent nous mettre de la poudre dans les yeux en nous faisant croire que la sécurisation du pays constitue leur priorité. Kidal n’est pas tout le Mali, il ne représente pas toutes les zones menacées. Certes un grand pas a été avancé, mais ça ne s’arrête pas là. Le temps des panégyriques n’est pas encore arrivé, car l’insécurité s’est emparée pratiquement de toutes les localités du pays. À cela s’ajoutent pleins d’autres problèmes que ce régime a laissé accroitre à cause de ses quatre années de sommeil au sommet de l’État ou plutôt dus à ses pérégrinations incessantes. Durant quatre années le président IBK n’a effectué aucun déplacement sur Kidal ainsi que sur d’autres régions menacées pour cause de menace terroriste. N’a-t-il pas eu à dire : « Aucune fanfaronnade politicienne ne me fera prendre mon avion et débarquer à Kidal pour créer un incident? » Cela dénote de l’irresponsabilité de ce régime qui veut endormir la conscience des citoyens maliens. Ce régime fantôme n’a aucun souci pour le Mali.
Ce retour tardif de l’armée à Kidal constitue une politique de populisme pour faire croire que « Boua » ne songe qu’au Mali ou encore que Soumeylou Boubèye Maiga est assez compétent puisqu’il a plus ou moins pu réparer un ‘’échec’’ de Moussa Mara. Si le départ de ce dernier s’est soldé par le départ de l’armée de Kidal, celui de Boubèye se solde par son retour. L’équation est empoisonnée. Mais comme les policiers disent en arrêtant un criminel, le régime d’IBK doit comprendre que tout ce qu’il fera ou dira maintenant peut être maintenu contre lui. Cette politique des dernières minutes n’est qu’un leurre pour avoir plus d’électeurs aux élections prochaines. Une fois cette élection gagnée, tout ce qui a pu manquer à sa famille durant le premier mandat sera comblé. Monsieur le président, la situation du centre nous inquiète également. Kidal seulement n’est plus l’enjeu, pensez aussi au centre.
Fousseni TOGOLA
Source: Le Pays