Dans le cadre de la mise en œuvre des orientations du président de la Transition, le Général d’Armée Assimi Goïa, visant à garantir “l’organisation d’élections transparentes et apaisées”, le ministre Délégué auprès du Premier ministre, chargé des Réformes politiques et du soutien au Processus électoral, Mamani Nassiré, a participé, jeudi 30 janvier, à la Maison de la presse, à un atelier d’information et de sensibilisation sur les réformes politiques, institutionnelles, administratives et électorales à l’attention des responsables des organes de presse.
Bamada.net-Lors de cette rencontre, le ministre Nassiré a fait une déclaration choc qui a suscité de nombreuses interrogations : “Le gouvernement ne dispose pas de loi électorale ni encore du fichier électoral conformément à la réorganisation territoriale pour aller aux élections.” Une affirmation qui jette un véritable pavé dans la mare du processus de retour à l’ordre constitutionnel.
Une transition toujours en suspens
Depuis plus de quatre ans, le Mali vit une transition qui peine à aboutir à l’organisation d’élections générales. Le “léger report” initialement annoncé n’a cessé d’être repoussé, laissant planer le doute sur la capacité des autorités à honorer leurs engagements. L’annonce du ministre Mamani Nassiré vient renforcer cette incertitude et relancer les interrogations sur la feuille de route électorale.
Malgré la récupération des données du RAVEC (Répertoire Administratif et Vérification de l’État Civil) en février 2024, suite à la levée de leur soi-disant confiscation par la société française IDIEMA sur fond de créances non soldées, aucun fichier électoral conforme à la nouvelle réorganisation territoriale n’a été constitué.
De plus, alors qu’une loi électorale avait été adoptée en juin 2022 par l’organe législatif de transition, Mamani Nassiré affirme aujourd’hui qu’elle n’est plus en vigueur, soulevant ainsi des questions sur sa validité actuelle. Cette situation met en lumière les contradictions entre les discours officiels et la réalité juridique et administrative du pays.
Des incohérences budgétaires et politiques
Les propos du ministre Nassiré prennent une dimension encore plus critique lorsqu’on considère que les élections sont pourtant inscrites dans la loi des finances 2025, avec un budget alloué de 80 milliards de francs CFA. Pourquoi budgétiser un processus électoral si les conditions juridiques et administratives ne sont pas remplies ? Cette question résonne fortement au sein de l’opinion publique et des observateurs de la scène politique malienne.
De leur côté, les partis politiques et les regroupements de la société civile ne cessent de presser les autorités de transition pour un chronogramme clair. Or, la réponse du ministre délégué semble doucher leurs attentes et confirmer les doutes qui planaient déjà sur la réelle volonté du gouvernement de respecter ses engagements en matière de transition politique.
Un processus électoral sous haute tension
Cette annonce intervient dans un contexte où le président de la Transition, Assimi Goïa, a réitéré son engagement pour un retour à l’ordre constitutionnel, tout en prévenant que cela ne pourra se faire que dans des conditions de “sécurité et de stabilité”. Le chef de l’État a ainsi insisté sur la nécessité d’un processus électoral “sécurisé et apaisé” afin d’éviter “un éternel recommencement”.
Cependant, ces précautions ne semblent pas convaincre les acteurs politiques et une partie de la société civile, qui voient dans ces déclarations une stratégie pour prolonger indéfiniment la transition. La crainte d’un maintien prolongé au pouvoir des militaires est de plus en plus palpable, alors que les délais initialement promis sont largement dépassés.
Quelle suite pour le Mali ?
L’absence de fichier électoral et de loi électorale conforme à la réorganisation territoriale constitue un frein majeur à la tenue des élections. Les déclarations du ministre Mamani Nassiré, loin de rassurer, soulèvent davantage de questions sur la volonté politique réelle des autorités de transition.
Alors que le Mali traverse une période d’incertitude, la pression nationale et internationale sur le gouvernement pourrait s’intensifier afin d’obtenir un calendrier clair et des actions concrètes en faveur du retour à l’ordre constitutionnel. Les semaines et mois à venir seront donc déterminants pour l’avenir politique du pays.
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Fatoumata Bintou Y
Source: Bamada.net