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Les Burkinabés en révolte contre le coup d’État

À Ouagadougou et dans les principales villes du pays, les habitants protestent depuis mercredi 17 septembre contre le putsch.

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Les hommes du Régiment de sécurité présidentielle n’hésitent pas à tirer à balles réelles.

Mercredi 17 septembre, dans l’après-midi, la nouvelle tombe. Des éléments du RSP, l’ancienne garde prétorienne de Blaise Compaoré, ont profité de la tenue du conseil des ministres pour prendre le gouvernement de transition en otage. Le soulèvement populaire est immédiat.

Les Burkinabés se rejoignent place de la Révolution, en plein cœur du centre de Ouagadougou. Les leaders du mouvement pro-démocratie « Balai Citoyen » sont là. L’artiste franco-burkinabè Smockey tente d’apaiser les esprits et d’organiser une action pacifique et cohérente. Mais le mouvement est déjà incontrôlable. Des centaines de personnes prennent le chemin de Kosyam, le palais présidentiel. « Libérer Kosyam ! RSP dégage ! »

 

La nuit tombe sous un ciel de plomb. Les militaires prennent les devants aux abords du palais et des tirs retentissent dans le quartier de Ouaga 2000, au sud-est du centre-ville. La pluie s’abat sur les centaines de manifestants et des simples badauds, contraints de fuir l’armée. À pied, à moto, en voiture ou en camion, tout le monde se presse par des chemins dérobés et boueux, en direction des quartiers périphériques.

 

NUIT AGITÉE

Les éléments du RSP avancent et gagnent rapidement les points stratégiques de la capitale. Mais leur tenaille est fragile. À la nuit tombée, des manifestants sont encore réunis par centaines, place de la Révolution. Ils réclament la libération immédiate du président Michel Kafando et du premier ministre Isaac Zida.

La nuit est agitée. Tirs et cris se font entendre partout. Des pick-up banalisés quadrillent les rues. Le courant est coupé dans la partie nord de la capitale. Hier, au petit matin, la vie semble presque reprendre normalement, bien que peu de commerces soient ouverts. Mais des militaires au visage masqué repoussent rapidement et avec une très grande violence les manifestants à nouveau réunis place de la Révolution.

 

JOURNALISTES MENACÉS, FRAPPÉS, TRAQUÉS

Premiers blessés, premiers passages à tabac. Depuis la veille, les journalistes sont menacés, frappés, traqués. Les rédactions sont visitées et le matériel confisqué. L’étau se resserre sur la capitale.

Les Burkinabés tentent par tous les moyens de manifester leur mécontentement tout au long de la journée d’hier. En vain. Chaque tentative est rattrapée par les militaires, qui sanctionnent sans ménagement et tirent à balles réelles. Le boulevard Charles de Gaulle, l’une des artères principales de la ville, est momentanément repris par les manifestants.

Des barricades s’érigent, des feux se consument. « Le RSP doit dégager ! », scandent les jeunes Burkinabés, se passant les cartouches qu’ils ont reçues du camp adverse de main en main. Mais très vite, les tirs se rapprochent. Les militaires sont à leurs trousses. Il faut fuir à nouveau.

 

PREMIERS MORTS

À quelques kilomètres de là, le service traumatologie de l’hôpital central Yalgado fonctionne à plein régime. Depuis la veille, une vingtaine de blessés arrivent, rien que dans cette structure. Et déjà, le Burkina Faso compte ses premiers morts. Un jeune homme décédé est transporté hors du service, sous les complaintes horrifiées de ses amis.

À l’intérieur, le directeur du service s’organise comme il peut. Les blessés, entassés sur des matelas dans un couloir étroit, ont été pour la plupart touchés par balles. Ils sont très jeunes. Il y a également des jeunes filles, inertes.

RUMEURS SANS FIN

Nouveaux tirs. Des rumeurs sans fin. La confusion la plus totale. Des rues se vident à toute allure, puis la vie reprend. Antoine (1), 31 ans, sort des urgences. Une balle a effleuré son front mais n’a pas manqué sa main droite. « Nous sommes sortis ce matin pour manifester. Nous sommes dans un pays démocratique ! Nous ne voulons pas de ce régime imposé. Nous irons jusqu’au bout, jusqu’à la dernière goutte de sang ! ». Malgré ses blessures, sa rage reste intacte.

Les autres villes principales du Burkina Faso se soulèvent progressivement contre le putsch du général Gilbert Diendéré. Les Burkinabés semblent déterminés. On ne leur enlèvera ni leur gouvernement de transition, ni la tenue des élections législatives et présidentielle, initialement prévues dans moins d’un mois. Mais pour l’heure, un couvre-feu est imposé, de 19 heures à 6 heures ce matin.

UN PAYS ENCLAVÉ

Appelé Haute-Volta jusqu’en 1984, le Burkina Faso, ancienne colonie française, a acquis son indépendance en 1960.

Peuplé de 18,9 millions d’habitants, le pays compte 60,5 % de musulmans, 19 % de catholiques et 4,2 % de protestants.

Près de 45 % de la population a moins de 14 ans. L’espérance de vie s’élève à 55 ans et le taux de fécondité est de 5,8 enfants par femme.

L’économie du pays, dépourvu d’accès à la mer, repose sur l’agriculture (38 % du PIB), le coton et l’or. Le taux de chômage s’élève à 77 %.

Blaise Compaoré, arrivé au pouvoir en 1987 par un coup d’État, au cours duquel Thomas Sankara, « le père de la Nation », a été assassiné, a dirigé le pays durant vingt-sept ans, avant de partir le 31 octobre 2014, sous la pression de la rue.

Le 18 novembre 2014, l’ancien diplomate Michel Kafando était désigné président de transition, et le colonel Yacouba Isaac Zida premier ministre. La date de l’élection présidentielle était fixée au 11 octobre 2015.

Ludivine LANIEPCE

Source: La Croix

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