Chaque groupement social, chaque société met en place un système, un ensemble de mécanismes pour garantir le calme, l’équilibre et la quiétude sociale. Il faut à tout prix maintenir cette paix par le dialogue, la négociation, le recours aux valeurs cardinales sociétales, etc.
La médiation depuis la mémoire historique de ce pays, est le règlement ou la prévention des conflits dans la vie sociale.
Selon le griot Diadié Hama Sangho, le médiateur a pour mission d’empêcher le trouble du front social, de préserver la paix et la quiétude sociales, de maintenir l’équilibre, “rien ne doit se gâter devant lui, tel est le rôle d’un griot”.
Les médiateurs sociaux c’est d’abord et surtout les gardiens de la tradition. Il s’agit des communicateurs traditionnels qui connaissent par cœur l’histoire du peuplement de la région, les relations socioculturelles qui unissent les familles. Et ensuite les chefs traditionnels, les notables les porteurs de voix et enfin les hommes et femmes influents du milieu.
Toutefois, M. Sangho dit que les principes de la médiation reposent sur un ensemble de techniques fondées sur la connaissance et la maîtrise parfaites des relations intercommunautaires, des points sensibles des uns et des autres pour aplanir un différend.
“Le médiateur doit d’abord s’assurer de connaitre le problème, il doit avoir la lucidité de la perception, l’impartialité et la volonté de résoudre le problème définitivement”, affirme-t-il.
Mandé Alpha Diarra, traditionnaliste rejoint la même idée, soutenant que le médiateur ne tranche pas comme la justice. Elle essaye d’éviter au maximum que l’un des protagonistes soit au pied du mur. Elle joue sur les différentes lois de la médiation pour éteindre le conflit entre les partis en conflits sans qu’il ne désigne explicitement un coupable. “Cette médiation va essayer d’arrondir les angles, amener les gens à un consensus, amener les gens à la paix”, explique l’écrivain Mandé Alpha Diarra.
Selon ses dires, les relations de médiation ont été instituées à Kurukanfuga d’après les gens du N’ko, pour sauter les verrous de certaines pratiques ou de certaines lois qui conduisaient à des blocages sociaux. On a alors trouvé des disjoncteurs que sont les règles du sinankounya (cousinage à plaisanterie), du nimôgôya (les relations entre la femme et ses beaux-frères et belles sœurs, et celle du mari et ses belles sœurs et beaux-frères), du modenya (relation entre le grand père et le petit fils), du filanya (les personnes qui sont du même groupe d’âge). Le droit d’aînesse établi est aussi une règle de la médiation, ajoute-t-il.
Pour montrer l’importance de ces différentes règles, Mandé Alpha déclare que grâce au cousinage à plaisanterie, beaucoup de guerres ont été évitées dans le Mandé et dans l’Empire de Ségou. Ce principe est tellement important dans notre société qu’un proverbe dit que “dans un conflit, les parents et les griots peuvent échouer, mais si les cousins de plaisanterie échouent dans la médiation d’un conflit, c’est que les protagonistes sont condamnés, car en principe les gens respectent beaucoup ce principe de cousinage à plaisanterie entre les différents clans du Mandé”. C’est un instrument très efficace dans la médiation, précise-t-il.
Pour notre traditionnaliste, l’avantage d’une médiation est que lorsque les deux parties acceptent les règles de la médiation, le conflit est éteint une fois pour toutes et vous ramène à devenir des amis, à vous côtoyer.
Le griot Sangho conclut qu’il n’y a que des avantages à aplanir les différends par des spécialistes qui sont confirmés, autrement la cupidité, la partialité et le parti pris sont des menaces mortelles pour le métier de médiateur.
Zeïnabou Fofana