Après la Syrie, la Libye ? Depuis début novembre, la « bataille de Tripoli », entamée il y a sept mois et demi, prend un nouveau visage avec une implication croissante de soldats russes aux côtés des forces assaillantes du maréchal Khalifa Haftar qui pourrait à terme bouleverser la donne stratégique dans cette zone de la Méditerranée centrale.
La présence de ces nouveaux combattants, des « mercenaires » vraisemblablement liés à la compagnie de sécurité privée Wagner, proche de Moscou, place d’ores et déjà sur la défensive les forces loyales au gouvernement d’union nationale (GNA) de Faïez Sarraj, formellement reconnu par la communauté internationale. « C’est très sérieux et préoccupant, on risque un scénario de type syrien », commente un diplomate occidental en poste à Tripoli.
Jusque-là plutôt en retrait sur la crise libyenne, les Etats-Unis dénoncent désormais ouvertement cet activisme militaire inédit déployé par Moscou sur le théâtre libyen. Ce dernier a été qualifié de « tentatives de la Russie d’exploiter le conflit contre la volonté du peuple libyen », selon les termes d’un communiqué conjoint signé le 14 novembre avec une délégation du GNA de passage à Washington.
La manifestation de mauvaise humeur américaine est sans précédent et fait monter la tension entre les deux pays, la Russie niant farouchement les faits. Déjà en proie aux ingérences de puissances régionales – l’Armée nationale libyenne (ANL) de Haftar est soutenue par l’Egypte, les Emirats arabes unis (EAU) et l’Arabie saoudite tandis que le GNA de Sarraj est appuyé par la Turquie –, la Libye pourrait se trouver aspirée dans une nouvelle rivalité entre Washington et Moscou.
Arrivée soudaine de paramilitaires russes
Face aux démentis russes, les groupes armés de Tripoli loyaux au GNA de Sarraj ont diffusé des photos et des vidéos montrant des documents d’identité, des clichés personnels de Russes – issus de téléphones mobiles – ou des images pieuses abandonnés à la hâte à l’issue de combats. Si aucun cadavre ni aucun prisonnier n’a été récupéré sur le front, le site d’investigation russe Meduza basé à Riga (Lettonie) a comptabilisé entre dix et trente-cinq tués, sur la foi de témoignages d’autres combattants et de membres de familles ou de recherches sur les réseaux sociaux.
Selon une source diplomatique occidentale basée à Tripoli, le nombre de ces paramilitaires russes présents en Libye serait « supérieur au millier » avec une vague soudaine d’arrivées « sur les deux dernières semaines ». « Ces chiffres sont exagérés, nuance Mohamed Jeghllaly, consultant sur la médiation humanitaire en Libye. Ils sont destinés à tirer la sonnette d’alarme. Le nombre réel ne doit pas être supérieur à 500. »…Lire la suite sur Lemonde