A la veille des municipales 2014, les candidats issus notamment du Maghreb ou de l’Afrique subsaharienne gagnent peu à peu du terrain. Et ça commence à se voir. A bouger au sein du paysage politique français… A la différence des précédentes élections, cette diversité s’installe à pas de velours. Pourtant, et paradoxalement, ce n’est plus la priorité des priorités au sein des partis politiques.
Candidats comme tous les autres ou différents ? Ou encore différents comme tout le monde ? C’est variable. La montée de la diversité au sein des communes françaises inquiète. Voir dérange. Au fil des années, ces élus locaux sont devenus des adversaires qui ont acquis leur légitimité. Certains peuvent être redoutables. Notamment ceux qui, en tête de liste, se retrouvent dans des circonscriptions où ils ont des chances de l’emporter.
« Changeons Villetaneuse dans le 93 »
« Changeons Villetaneuse dans le 93 ». C’est le slogan de Dieunor Excellent. Investi par le Parti radical de gauche (PRG), ce militant de 37 ans, d’origine haïtienne, a quitté le Parti socialiste (PS) pour le PRG, qui lui a fait confiance pour mener cette Municipale. Il y a un an, prenant de vitesse tous ses adversaires, Dieunor Excellent officialise sa candidature. Depuis, il mouille la chemise pour aller chercher les voix dans les quartiers populaires.
De jour comme de nuit, il bat le goudron de cette commune, citadelle toujours aux mains des communistes. Et il la veut. Pas pour lui, mais pour ses concitoyens, les Villetaneusiens. Il veut transformer sa ville où il n’y a pas de petit marché, pas de police municipale. Rien, à part Paris XIII, un centre universitaire au fort potentiel, qui n’est pas exploité. Cette banlieue se résume en une cité dortoir que cet enfant de la ville a de forte chance de réveiller. Et il n’est pas le seul. Plusieurs Français d’origine étrangère pourraient être élus maires lors de ces Municipales.
Le PS a investi des candidats dans plusieurs villes gagnables d’Ile de France : le député Razzy Hamadi à Montreuil, Abdelhak Kachouri à Neuilly-sur-Marne, Sonia Dahou aux Ulis… A droite, l’ancienne ministre de la Justice, Rachida Dati, a des chances de sauver son siège. Car il est temps d’inverser les chiffres. En France, ils sont quatre maires issus de la diversité sur les 36 600 communes que compte la métropole.
Les candidats visibles ne se découragent pas
« On n’a même pas commencé, qu’on nous met des bâtons dans les roues », souligne Kamel Hamza, président de l’Association nationale des élus locaux de la diversité (Aneld). Pour les freiner dans leur ascension, deux arguments leurs sont opposés. Celui qui est à la mode, c’est celui du Front national. Ces candidats sont invités à rester en bas des listes pour ne pas « effrayer » les électeurs. Pire, s’ils sont élus, ces Français pourraient faire du communautarisme, l’autre argument à la mode. « Ce n’est qu’un prétexte pour qu’on renonce à toute candidature », analyse Nadia Azoug, tête de liste écologiste à Pantin.
Mais ces questions d’origine et de couleur ne sont pas la préoccupation des citoyens. Ils votent pour un logement, un supermarché, une école… pour un programme. C’est un dialogue de sourd. Les partis politiques ont des yeux : voyant que la population est multiculturelle, ils colorent les bas des listes. La population, elle, est sensible aux discours. Malgré toute cette incompréhension, ça bouge. Les candidats visibles ne se découragent pas et gagnent du terrain. Ici, ce sont des futures maires adjoints, là des futurs conseillers municipaux. Ces derniers sont passés aux dernières élections de 2008 de 1 069 à 2 343, selon les chiffres du Haut Conseil à l’intégration (HCI). Avec ce doublement, le processus est enclenché. Certains, qui briguent la mairie, y vont seuls, même sans parti. Ils savent qu’ils vont au « casse-pipe », mais peut-être croient-ils quelque part qu’une Marianne Black, Blanc, Beur les guide ?
rfi