Marginale il y a quelques années, la cuisine chinoise est passée de l’ effet de curiosité à un effet de mode à Libreville où les restaurants chinois supplantent à pas de géant les traditionnels restaurants européens avec leurs menus raffinés mais trop chers.
La nuit est tombée depuis quelques heures au quartier Louis dans le premier arrondissement de la capitale gabonaise. C’ est le quartier latin de la gastronomie à Libreville. Un rutilant 4X4 grand standing vient de stationner dans un minuscule parking. Un couple en tenue plutôt relaxe descend. Direction chez Weng, un réputé restaurateur chinois.
“Un vendredi soir sur trois, je viens ici en famille profiter des saveurs de la cuisine chinoise”, confie Emile Mouloungui, patron d’ une PME de sous-traitance dans le secteur des bâtiments et travaux publics. Le couple s’ engouffre dans la pièce où est presque pleine à craquer. Il est automatiquement pris en charge par un personnel hyper motivé.
Saveur exotique
Et le diner commence. “Tous les vendredis ici c’ est le buffet. On mange très bien”, commente M. Mouloungui qui invite sa femme vers le buffet.
Au menu plusieurs plats cuisinés dans la pure tradition asiatique. Soupes spéciale chinoise, soupe de vermicelles transparents, potage d’asperges et crabe, soupe saïgonnaise et soupe aux raviolis bref tout pour une bonne mise en bouche. La viande a aussi une cuisson radicalement différente de la cuisine locale. Bœuf aux pousses de bambou et champignons noirs, bœuf à la sauce aigre-douce, bœuf au curry.
“La cuisine chinoise a une saveur particulière. Son goût est exotique”, commente Nicaise Moulombi, président de l’ONG Croissance saine environnement, un autre amoureux de l’ art culinaire de l’ empire du milieu.
“Je suis émerveillée par la cuisson des légumes qui ne perdent pas leur coloration. On a l’ impression que c’ est cru mais en réalité, ils sont bien cuits et très délicieux”, commente Solange Mbou, une jeune étudiante originaire de la province du Haut-Ogouée où les populations ont la réputation de consommer les chenilles et légumes sauvages.
Les chinois ne font pas les choses à moitié. Leurs restaurants sont aménagés et décorés comme en Chine.
“On a l’ impression d’ être en Chine sans pourtant y être”, dit Emmanuel Nkoghe, un fonctionnaire qui affirme avoir séjourné dans ce pays asiatique. “J’ adore la décoration et la petite musique chinoise jouée en fonds sonore. Ca me permet de m’ évader et de me souvenir des moments passés en Chine, un pays dont je reste nostalgique”, conclu-t-il.
Pouvoir d’ achat
A Libreville, tous les grands restaurants trônent le long du boulevard du front de mer, la principale vitrine économique de la capitale gabonaise que se discutent les banques, les supermarchés, les boites de nuit et les administrations. Les restaurants chinois aussi. C’ est donc la grande proximité avec les couches riches locale qui dépense, le plus souvent, sans compter.
Pays à revenus intermédiaires avec un PIB par habitant de 11 571 dollars en 2013, le Gabon, pays riche en pétrole, bois et minerais, cumule une croissance économique positive depuis 2009. Le rapport sur les perspectives économiques en Afrique de la Banque africaine de développement (BAD) souligne que le Gabon affiche de bons indicateurs économiques avec un taux de croissance de 5.5 % en 2013 pour un taux d’ inflation de 0.4 %. Ces performances devraient encore s’améliorer, avec une croissance de 6.7 % en 2014 et de 7.2 % en 2015.
En conséquence, cette belle tendance se matérialise par une amélioration progressive du niveau de vie des populations qui changent aussi leur style de vie. Aller au restaurant est devenu une mode pour la classe moyenne émergente.
“L’ offre chinoise reste meilleure si on compare la qualité et le prix”, déduit Michaël Ondounda, un jeune étudiant partageant un plat de nouille avec sa petite amie dans un restaurant chinois situé dans un hall du supermarché Mbolo, le plus grand et prestigieux supermarché du Gabon.
“Gabonisation” des emplois
Au début des années 2000 quand a commencé l’ explosion des restaurants chinois à Libreville,
l’essentiel du personnel, de l agent de sécurité à la cuisinière, était chinois. Mais les choses ont changé.
Le personnel des restaurants chinois est devenu plus mixte. Les gabonais sont d’ ailleurs plus nombreux à travailler dans les restaurants chinois. Les serveuses gabonaises ont pris le relai. Idem pour les postes d’ agent de sécurité ou d’ accueil.
Quelques gabonais sont d’ ailleurs perceptibles dans les cuisines, pas uniquement pour laver les couverts mais pour concocter le menu. “Ils nous apprennent à préparer la nourriture chinoise. Je m’ y connais déjà”, dit fièrement une jeune gabonaise cuisinière au Restaurant Beijing, situé au centre ville.