« Les opportunités d’investissement au Mali » étaient le thème central du 9e numéro de l’émission à grand public « Grand débat économique » animée par notre confrère, Issa Fakaba SISSOKO, samedi dernier, à la CCIM (Chambre de commerce et d’industrie du Mali). Pour débattre de cette problématique, il avait sur son plateau, le ministre de la Promotion des investissements et du secteur privé, Konimba SIDIBE, le Pr Abdoulaye NIANG, économiste, directeur du Centre de recherche et d’études stratégiques « Sènè ».
Pourquoi investir au Mali ? Quels sont les secteurs favorables à l’investissement au Mali ? Quels sont les obstacles et comment les lever ? Quelle est la force du secteur privé malien dans l’économie nationale ? Voilà autant de questions pertinentes qui ont été posées, samedi dernier, aux deux invités du « Grand débat économique ».
Le ministre SIDIBE et le Pr NIANG qui étaient les deux invités de ce débat contradictoire ne se sont pas fait de cadeau, les propos !
L’État investisseur indexé
À l’entame des débats, le ministre Konimba SIDIBE a indiqué que la promotion du secteur privé était une priorité gouvernementale avec une augmentation sensible du budget d’investissement en 2016. L’ambition du gouvernement, conformément aux orientations du président de la République, Ibrahim Boubacar Keïta, a-t-il fait savoir, est de bâtir une économie émergente dans les années à venir.
Pour le PR NIANG, le problème de l’investissement au Mali réside du fait que l’État veut se substituer au secteur privé. Alors que l’État, de son avis, doit investir dans les mesures et les programmes de stimulation de la classe économique pour créer la richesse. Pour ce chercheur qui a passé une bonne trentaine d’années dans la commission économique des Nations Unies pour l’Afrique « Le problème n’est pas le volume de l’investissement ou des ressources fiscales ou douanières mises à disposition pour supporter l’investissement. L’erreur qu’on commet, le plus souvent dans les pays africains, c’est que l’État veut devenir investisseur ».
De son côté, le ministre Konimba SIDIBE répliquera en soutenant que cette approche dégagée par le Pr NIANG est totalement erronée, car dépassée par les réalités du moment. Selon lui, il y a deux domaines pour l’investissement, à savoir, le secteur marchand et le secteur non marchand. Pour ce dernier cas, il est de la responsabilité de l’État d’investir dans ce secteur. Et dans les pays comme ne notre, ce secteur est très important pour le développement.
Un climat des affaires favorable
À la question de savoir si le Mali est une destination attrayante, M. SIDIBE répond par l’affirmative. Parce que les investisseurs étrangers, selon lui, bénéficient des mêmes privilèges que ceux nationaux. À cela s’ajoute le droit au transfert des capitaux et de leurs revenus qui sont garantis aux personnes physiques ou morales qui effectuent au Mali un investissement financé par un apport en devises.
Aussi, en plus de ce climat favorable, il existe des créneaux porteurs très rentables, caractérisés par un environnement des affaires qui s’améliore, de jour en jour, et la possibilité de jouir de ses bénéfices est réelle.
Assi, y a-t-il l’existence des secteurs porteurs de croissance qui offrent, à cet effet, de véritables opportunités d’investissements importants.
« Il existe un marché et des facteurs de production pour lesquels nous avons, au Mali, des avantages comparatifs indéniables », a dit le ministre.
Pour le Pr NIANG, il y a aujourd’hui un laxisme avéré du gouvernement dans l’application des dispositions qui fait que les étrangers profitent de la croissance au détriment des nationaux. Ainsi, a-t-il révélé, la société Rand gold a eu l’occasion de dissimuler la réserve d’or du Mali jusqu’à accumuler sur le marché financier 10 milliards de dollars américains en 2012 tout simplement parce que l’État n’a pas été regardant. Le mieux serait, selon lui, de permettre à des privés nationaux de prendre part au capital de ces sociétés étrangères. Les conséquences de la permissivité de l’État avec les firmes étrangères, il y a de la croissance au Mali, mais qui ne profite pas forcément aux populations. Aujourd’hui, malgré un taux de croissance de 7 %, on se rend compte que ceci a profité plutôt aux investisseurs étrangers.
« Fondamentalement, le climat actuel des affaires est défavorable à l’investisseur malien », a regretté le Pr NIANG.
Pour le ministre, le climat des affaires, dans tous les pays du monde, a ses forces et ses faiblesses. Selon lui, il appartient aux autorités de travailler à améliorer ce contrôle fiscal.
De son avis, il est inexact de dire, aujourd’hui que le climat est défavorable aux nationaux. Pour preuve, les 90 % des investisseurs rencontrés par son département sont des Maliens et cela remet en cause les allégations du Pr NIANG. Sans rentrer dans la polémique, il fait savoir que toutes les sociétés évoluant au Mali font l’objet d’un contrôle fiscal régulier.
« Il ne faut pas aller à des incantations », a-t-il averti.
Les secteurs porteurs
Parmi les secteurs favorables au Mali, le ministre a souligné, l’agriculture. Là, il s’agit de transformation du modèle d’agriculture en passant de l’agriculture de subsistance à une agriculture entrepreneuriale.
« Il faut travailler à ce que l’agriculteur ait un comportement d’entrepreneurs », a conseillé le ministre. Ensuite, il y a les industries de transformation des produits de l’agriculture (huilerie, abattoir, agro-alimentaire). Un autre axe non moins important, c’est l’industrie textile en tant que 3e production de coton de la sous-région. Il y a aussi l’aliment bétail, avec un pays qui dispose le premier cheptel de la sous-région. Aujourd’hui, le secteur de l’énergie, de l’eau et du solaire offre aussi de nombreuses opportunités d’investissements. Mais en fin de compte, le secteur des mines est aujourd’hui le plus porteur au Mali, a fait savoir le ministre.
Au passage, il a expliqué que le premier facteur de faillite des entreprises textiles au Mali est le coût élevé de l’énergie.
Le partenariat public-privé comme axe majeur
Pour changer la donne, des mesures sont en cours pour permettre au secteur privé d’investir dans ces secteurs, à travers le partenariat public/privé, le moteur de la croissance. L’autre défi majeur, c’est la sécurité de l’investissement qui n’existe pas au Mali. Aujourd’hui, le département a créé un programme d’assistance des entreprises qui sont régulièrement victimes des mauvaises pratiques, notamment sur plan judiciaire. L’accès au financement, le partenariat public-privé constituent des axes majeurs qui retiennent l’attention du département, a indiqué le ministre de la Promotion des investissements.
Par Abdoulaye OUATTARA
Source: info-matin