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INTERVIEW EXCLUSIVE DU DG DE LA CANAM «Le système informatique est le moteur de la gestion des systèmes d’assurance. C’est le centre de la gestion et il faut y mettre le prix ».

Collaboration avec les pharmacies et professionnels de la santé dans le cadre de l’assurance-maladie, gestion de la base de données de l’Assurance-maladie obligatoire (AMO), problèmes identifiés, mesures de correction et perspectives d’avenir. Autant de sujets aussi intéressants les uns que les autres et sur lesquels le directeur général de la Caisse nationale d’assurance-maladie (Canam) M. Luc Togo  a bien voulu nous entretenir. 

 luc togo directeur general canam assurance 

Le Sphinx : Monsieur le Directeur général, nous avons remarqué que depuis un certain des pharmacies de la place font de la résistance en ce qui concerne l’acceptation des bons de médicaments de l’AMO. Est-ce que vous en êtes informé et qu’en est-il exactement ?

 

Luc Togo, Dg de la Canam : Je voudrais d’abord rappeler que les pharmacies constituent effectivement un des partenaires essentiels dans le système de l’Assurance-maladie obligatoire. Et en revenant un tout petit peu, il y a deux ou trois ans, nous reconnaissons que jusqu’en 2013, on avait d’énormes problèmes parce que les pharmacies qui devaient être remboursées quinze jours après la transmission des factures, constataient que cette disposition n’était pas honorée par les gestionnaires de l’assurance-maladie obligatoire. C’est dû à plusieurs facteurs. Parmi lesquels, le fait que le métier n’était pas tout à fait maîtrisé par tout le monde. Parce que c’est nouveau. Au niveau des Organismes gestionnaires délégués (Ogd). Il y avait donc, premièrement, le problème d’organisation et deuxièmement des insuffisances en termes de matériels et d’équipements. Ce qui fait qu’il était difficile, avec la montée régulière des charges en termes de traitement de tonnes de feuilles, de tenir les délais. On enregistrait des retards de deux, voire de trois mois au niveau de la plupart des pharmacies. Il faut reconnaître qu’on a tiré les leçons de cette situation et en janvier-février-mars 2014, nous avons engagé un certain nombre d’activités permettant de déconcentrer les traitements des feuilles de soins. C’est à dire que si auparavant toutes les feuilles du Mali parvenaient d’abord à Bamako pour que les Ogd les traitent, on a déconcentré pour qu’au niveau de chaque région, la direction régionale de l’Inps ne traite que les feuilles des prestataires de la région et effectue le paiement. Donc les feuilles ne remontent pas jusqu’à Bamako.

Au niveau de la Caisse malienne de sécurité sociale (Cmss) toutes les procédures de liquidation sont faites et c’est centralisé à Bamako pour que le paiement puisse être fait, de Bamako. Mais en amont,  toutes les feuilles sont traitées au niveau des régions. C’est ce qui a fait que, aujourd’hui, on a fait d’énormes avancées  et les pharmaciens reconnaîtront ce qu’on a fait en ce sens par rapport à 2013. A côté de la déconcentration, il y a l’informatisation. C’est ce qui a fait que, aujourd’hui, il peut exister des cas où, pour une raison ou pour une autre et qu’on pourrait peut-être expliquer, certaines pharmacies, se sentant un peu fragilisées, ont adopté des mesures de rétorsion, même si c’est contraire un peu aux termes de nos conventions. Les pharmacies, quand elles sont dans des cas où elles ont beaucoup de factures pour plusieurs mois, c’est rare je dis encore une fois, à ce moment, elles prennent sur leur chef la décision de suspendre la dispensation. Mais c’est des cas, encore une fois,  assez rares.

 

Qu’est-ce qui explique ces cas-là ?

 

Il peut y avoir des rejets. Par exemple si la pharmacie a servi des gens dont les droits ne sont pas ouverts. C’est-à-dire qu’ils ne sont pas à jour de cotisations. Cela peut arriver. Il y a aussi le cas où des feuilles sont retournées parce que quelqu’un à l’origine était à l’Inps et sur sa carte c’est l’Inps, mais entre-temps il a changé de statut pour devenir fonctionnaire et n’a pas changé sa carte. Quand la pharmacie donne le médicament parce que sur la carte du bénéficiaire c’est l’Inps qui est indiqué, la facture va alors à l’Inps qui ne peut l’honorer car à son niveau il n’y a que la liste des gens affiliés à l’Inps. A la Cmss, c’est pareil.  Par conséquent, l’Inps retourne la feuille pour dire qu’il faut surtout l’adresser plutôt à la Cmss. Et ça peut prendre du temps.  Des rejets de ce genre, peuvent parfois être assez élevés. Mais ça dépend des pharmacies. Et ça provoque, si vous voulez, cette espèce de mauvaise humeur au niveau du prestataire qui se dit « Bon, écoutez, vraiment votre affaire-là, c’est trop compliqué ». Ou alors, il se dit : « Mais pourquoi  on rejette mes feuilles ? » Ainsi de suite…En général c’est des cas comme ça !

Même hier, on était en réunion avec les pharmacies lesquelles reconnaissent aujourd’hui, toutes, qu’il y a eu d’énormes avancées. Maintenant nous sommes en train de nous battre pour qu’on ne dise pas qu’on recule parce que ce n’est pas compréhensible. Hier aussi, on avait une réunion avec la Cmss, l’Inps, l’Ordre des pharmaciens et le Syndicat des pharmaciens d’officine pour que l’on maintienne le cap et que l’on améliore. Parce qu’il arrive, par-ci par-là que quelqu’un ait par exemple un mois d’arriérés. Pour d’autres aussi, qu’est-ce qui se passe ? Ils accumulent les feuilles de deux mois et ils en font une facture qu’ils envoient et le lendemain, ils disent qu’ils ont une facture de deux mois qui traine là-bas. Or on l’a envoyé il y a seulement quelques jours. Ça arrive aussi. Les cas de figure sont différents. Mais faites un sondage. La plupart des pharmacies que nous connaissons ici, demandez-leur si elles sont prêtes à arrêter. Vous allez voir ce que vous allez avoir comme réponse.

 

Est-ce que les pharmacies ont des moyens sur place pour vérifier si les gens sont à jour ou non. Et quelles dispositions avez-vous prises en ce sens ?

 

C’est une très bonne question ! On en parle assez régulièrement et même hier lors de la réunion nous avons abordé ce problème. Vous savez, une institution d’assurance ne tire sa crédibilité que de la maîtrise des effectifs. A la base, nous avions eu beaucoup de problèmes avec les décisions qui ont été prises par-ci par-là pour calmer la situation. Ce qui fait qu’au niveau de la maîtrise des effectifs à l’Inps et à la Cmss, cela a porté un coup. On est en train, petit à petit, de réajuster de manière à être à une situation où les données, en ce qui concerne la base, soit à 90% fiable.

On a conçu une application. Ce qui s’imposait du reste car dans la réalité, il y a des gens qui ont quitté mais qui ont gardé leur support et qui vont se faire prendre en charge. A la faveur de cette application, nous nous sommes dit qu’aussi bien les prestataires des centres de santé que les pharmacies fassent l’effort d’utiliser cette application qui certes à ses limites. Aujourd’hui à Bamako, plus de la moitié des pharmacies ont cette application. Parce que cela ne peut être installée que là où les gens ont eu une connexion internet.  Ça c’est à Bamako, dans les régions, la situation est encore plus déplorable. Vous savez, dans les structures des associations de santé communautaire de la brousse, il n’y a même pas d’ordinateur. L’application sert beaucoup aux gros consommateurs comme les hôpitaux de Bamako et les grandes pharmacies.

L’utilisation de cette application est donc normale et justifiée. On ne peut pas gérer un système d’assurance sans une base. Ceci étant dit, je parlais tantôt des limites du logiciel qu’on a conçu et qui ne permet pas toujours de faire un lien entre les ayant-droits et l’ouvrant droit. Il peut arriver que l’ouvrant droit soit à jour de cotisation, mais que les ayant-droits ne le soient pas. Donc nous avons mis en place un mécanisme pour régler cette question. C’est-à-dire que si au niveau de la pharmacie il n’y a pas l’application et qu’elle sert  un client ne sachant pas s’il est à jour ou pas, ou de bonne foi  il est servi parce qu’il est venu avec une ordonnance en bonne et due forme, rendu à la L’Inps ou la Cmss  les gens peuvent, en ouvrant la base,  se rendre compte que la personne-là son droit n’est pas ouvert. Alors, qu’est-ce qu’on a donné comme consigne, c’est que si des Ogd ont un cas comme ça, il ne faut pas qu’ils retournent la facture à la pharmacie. Ils relèvent le numéro de l’assuré en question, le communiquent à la Canam qui vérifie si l’intéressé est à jour de cotisation ou ses ayant-droits et ils ouvrent, pour qu’aussitôt ils fassent la liquidation et ils payent la facture. Comme ça, les pharmacies ne reçoivent plus les factures pour non ouverture de droits. C’est réglé entre nous. Cela prendre peut-être 24 heures, mais en tout cas c’est réglé.

 

Si vous vous trouvez dans cette situation pour quelqu’un qui n’a pas cotisé par exemple. Quels sont les moyens que vous avez pour agir ?

Il peut arriver que des gens qui ont leur carte, ne soient plus en activité entre-temps. Peut-être que leur entreprise a fermé ou ils ont été licenciés. Donc ils ne sont pas à jour de cotisation. Si on constate que la personne, depuis six mois ne cotise pas car si on obéit plus  au statut de fonctionnaire ou de travailleur, on peut toujours continuer à bénéficier des prestations pendant six mois, mais après cela c’est fini. Si on voit donc que la personne n’est plus à jour, ce qu’on fait puisqu’on connait son numéro, on avise les prestataires, c’est-à-dire les pharmacies et les professionnels de santé qui travaillent avec nous, que cette personne ne doit plus bénéficier des prestations. Et on ferme définitivement, jusqu’à ce que la personne, quand elle se trouve dans la situation de s’affilier de nouveau, qu’elle le fasse. Aujourd’hui, c’est difficile de faire autrement que de cette manière, en attendant qu’on ait un nouveau système parce qu’en partie, c’est lié aussi à la configuration actuelle de notre système.

 

Mais qu’est-ce que ce système peut-il apporter de nouveau ?  

 

L’avantage de ce nouveau système, comme les techniciens le disent, c’est qu’il est implanté dans un environnement oracle donc compatible avec tout ce qu’on a comme logiciels de gestion dans les établissements de soin. Donc c’est ouvert. Ce n’était pas le cas et donc cela va nous permettre une meilleure maîtrise des effectifs. Ce dont je parlais tout à l’heure, notamment les ouvertures et les fermetures de droits sont réglés par ce nouveau système en temps réel. On va progressivement substituer les feuilles de soin par un système de télétransmission, c’est-à-dire déjà à la prescription.

Au regard de notre base si le médecin par exemple veut faire une ordonnance pour une personne qui n’est pas à jour de cotisation, ça ne passe pas.  S’il prescrit un médicament qui n’est pas couvert, ça ne passe pas. Cela va nous prendre peut-être un an ou deux ans, mais progressivement on va aller à ça. Et ça voudra à ce moment que la personne déjà quand elle arrive dans un centre de santé la carte qu’elle va présenter sera une carte biométrique avec un système de lecture qui permet déjà de lire la situation actuelle de l’intéressé en termes de cotisation, ainsi de suite.

Les paramétrages sont en train d’être faits de manière à ce qu’un certain nombre de choses, de conditions préalables, soient pris en compte pour que même des ordonnances puissent se faire. D’abord on va sortir progressivement des feuilles de soins mais ça va être le premier mois parce qu’il y a des localités où on ne peut même pas utiliser l’ordinateur. Mais petit à petit, dans les établissements de grande consommation ça va être installé et les ordonnances vont être disponibles automatiquement dans toutes les pharmacies qui sont conventionnelles. La pharmacie qui fait la prestation est signalée et elle peut transmettre les factures tout de suite par télétransmission aux Organismes gestionnaires délégués (Ogd).

Si on arrive justement au bout de l’implantation il y a beaucoup de choses que l’on met aujourd’hui sur le registre de la fraude et qui vont disparaître. Ça va être jugulé. Il faut noter qu’aujourd’hui, nous ne mettons pas moins de 400 millions dans les feuilles de soins. Si nous sortons de cela, vous voyez combien cela nous fait gagner ! Et ça, c’est entre autres. Sans compter les cas comme le fait d’aller chez le médecin et de faire inscrire sur son ordonnance un ou plusieurs médicaments qui reviennent à un parent, etc.  C’est des choses qui se font et c’est un manque à gagner. Il y a plein de choses de ce genre qui vont être corrigées par le système informatique. Vous savez, de nos jours, le système informatique est le moteur de la gestion des systèmes d’assurance. C’est le centre de la gestion et il faut y mettre le prix.

 

Entretien réalisé par Adama Drame

 

Source: sphynx

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