En attendant d’entrer dans le vif de sa vocation budgétaire, la session parlementaire d’octobre 2017 de l’assemblée nationale s’active pour l’heure dans le domaine du contrôle de l’action gouvernementale. Moins d’un mois après la rentrée parlementaire, les ministres des Maliens de l’Extérieur et de l’Intégration Africaine, Abdourhamane Sylla, des Affaires Etrangères et de la Coopération Internationale, Abdoulaye Diop, et de l’Administration Territoriale, Tièman Hubert Coulibaly étaient au banc du gouvernement, jeudi 26 octobre, dans le cadre d’une interpellation sur la situation désastreuse des migrants maliens en Algérie, en Lybie et en Arabie Saoudite ainsi que la problématique de l’opérationnalisation des neuf (9) nouvelles régions.
La présidente de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale, Mme Diallo Aïssata Touré, a saisi l’occasion pour attirer l’attention sur le phénomène migratoire qu’elle a qualifié de fléau et d’océan de désespoir. Et l’honorable Belco Bah de renchérir en déplorant les actes infrahumains et dégradants commis par les pays qui se disent amis du Mali et cela sous le regard silencieux des autorités maliennes. Et pour cause, le gouvernement, comme pour cautionner lesdits agissements, n’a ni demandé d’explications à l’ambassadeur d’Algérie en poste à Bamako, ni rappelé l’ambassadeur du Mali en Algérie, selon l’honorable Adama Kané de l’opposition.
En rappelant que les Maliens sont expulsés de manière déplorable et inhumaine, l’honorable Nanko Amadou Mariko, en a déduit pour sa part que la question des Maliens de l’extérieur est loin d’être une priorité du gouvernement. Et de demander aux ministre Sylla et Diop de mériter leur poste, eux qui ont servi à tous les gouvernements successifs d’ibk et survécu à la tempête de chaque remaniement.
L’honorable Ahamada Soukouna a voulu pour sa part savoir ce que le gouvernement est entrain de faire pour soulager la souffrance des Maliens de l’extérieur qui subissent des pratiques racistes et xénophobes, à cause de la couleur de leur peau. Rappelant à l’Etat son devoir de protection, d’assistance envers tous les citoyens à l’intérieur comme à l’extérieur, il a voulu comprendre par la même occasion les motivations de la lenteur dans le processus de rapatriement des concitoyens en situation irrégulière et qui croupissent souvent dans les geôles étrangères. Et l’honorable Mamadou Alpha Diallo d’ironiser en laissant entendre que les aéronefs récemment achetés auraient pu servir à diligenter leur rapatriement.
Pour fustiger la lenteur du processus de l’opérationnalisation des neuf nouvelles régions, l’honorable, Zoumana N’Tji Doumbia a fait savoir qu’un collectif des régions non-opérationnelles est dans logique de boycotter les élections à venir. Et le président de la commission des lois de s’interroger sur les facteurs qui font obstacle à l’application de cette loi car, sur 11 régions créées, neuf ne sont pas opérationnelles notamment dont Dioila, Bougouni, Douentza, Koutiala, Kita, Bandiagara, Nioro, Nara et San, tandis que les deux opérationnelles(Taoudenit et Ménaka) sont loin de répondre aux exigences d’une région.
En réponse aux préoccupations des députés, le Ministre des Maliens de l’extérieur, Abdrahamane Sylla, a indiqué que la migration revêt un enjeu majeur aux yeux des autorités maliennes, qui n’ont de cesse de déployer des efforts colossaux avec notamment une mission permanente de son département pour sensibiliser sur des risques liés à la migration irrégulière ainsi que sur la politique nationale de migration adopté en 2014. Lequel document prend en compte 8 axes stratégiques pour préserver la dignité des Maliens vivants à l’extérieur.
En Algérie, si les conditions d’accès ne nécessitent pas un visa, au-delà de 90 jours les textes obligent tous les migrants maliens à chercher des titres d’autorisation ou permis de travail, selon le ministre des affaires étrangères, Abdoulaye Diop. Ce que nos compatriotes n’observent pas le plus souvent, a déploré son collègue des Maliens de l’extérieur et de l’intégration africaine. Le ministre Sylla s’est en revanche dérobé pour la situation en Lybie en évoquant la guerre et l’inexistence de gouvernement légal. A le croire, toutes les autres représentations diplomatiques ont plié bagages de la Libye en dehors de l’Ambassade du Mali avec à son actif le rapatriement de1200 compatriotes, tandis qu’en Algérie 212 autres ont été libérés de prison grâce au concours de l’Organisation Internationale des Migrants.
Selon le ministre Sylla, le gouvernement répond à chaque fois qu’il est sollicité, mais ne dispose pas de pouvoir pour rapatrier un Malien sans son consentement. Pour le cas de l’Arabie Saoudite où des Maliens et Maliennes sont souvent réduits à l’esclavage, le ministre dira que le problème est d’autant plus complexe qu’il faut être sponsorisé par un Saoudien pour y demeurer. Et d’ajouter que 327 Maliens vivant dans ce pays préfèrent retourner au bercail, faute d’amour et de solidarité.
Dans ses éléments de réponse au sujet des régions non-opérationnelles, le ministre de l’Administration territoriale, Tiéman Hubert Coulibaly a soutenu que le gouvernement n’a nulle intention de se dérober à la mise en œuvre de cette loi votée par les députés et promulguée par le président de la République. En atteste, selon lui, le fait que les régions de Taoudénit et Ménaka sont opérationnelles et que son département a travaillé durant toute l’année 2016 pour rendre opérationnelles les 9 régions restantes. Toutefois, la création d’une région demande des matériels et du personnel qui coûtent environ 5 à 6 milliards FCFA, a-t-il estimé tout en évoquant la situation sécuritaire du Mali et la crise qui n’ont pas non plus facilité l’opérationnalisation intégrale des nouvelles régions.
Et, comme pour contester sa nécessité, il souligna que la loi a été faite dans un contexte précis où il fallait répondre aux aspirations des uns et des autres. A l’en croire, avec trois régions par an, dont trois d’ici à la fin 2017, le processus pourra être bouclé en 2019.
Amidou Keita