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Il n’y a pas de solution militaire à la question touarègue

civil touarègue kidal nord mali

Les différentes rébellions touarègues ont certes fait parler de la cause, mais elles n’ont pas apporté les grands changements souhaités par la population tout entière, qui avait également espéré que les sacrifices qu’elle consentait permettraient à toutes les autres communautés de la région d’en bénéficier. Hélas, si elles ont permis à quelques-uns d’obtenir des postes de responsabilité, les problèmes de la majorité d’entre nous qui sombrent désormais dans la misère n’ont pas trouvé de résolutions et encore moins d’espoir qu’il n’en sera pas toujours ainsi.

enfants nomades campement Kidal nord mali

C’est surtout grâce aux artistes que ce peuple est connu mondialement et à quelques historiens ou chercheurs venus d’ailleurs qui malheureusement changent de positionnement ou de regard d’année en année.

Au Mali, on a tendance à acheter la paix, ce qui ne marchera pas encore très longtemps. C’est pourquoi l’Histoire se répète. La paix, elle, ne s’achète pas. Dans le fond, le problème demeure intact. Au point de devenir la vache laitière de quelques ténors. Ils y vivent sans état d’âme. Imuhagh (Kel-Tamasheq), si nous adoptons cette lancée, nous resterons un champ d’expérimentation à vie !

Il est plus que nécessaire aujourd’hui d’évaluer le mal que nous nous faisons depuis des générations. Incitons les uns et les autres à avoir un nouveau regard à la dimension du problème, mais, cette fois, sous un angle politique, avec beaucoup de diplomatie, plus jamais la violence et encore moins avec les armes. On peut se faire entendre de plusieurs manières. C’est un long travail sur le changement des mentalités de nos frères et sœurs dans nos campements et dans toutes nos cités. Voulons-nous rester des rebelles à vie ? Chaque jour qui passe, nous augmentons le nombre d’orphelins, de victimes et nous ne sommes plus en mesure de compter nos morts. Les assassinats se multiplient pour chaque épisode de soulèvement. La mise en place d’un comité des sages qui pourrait aider dans la prévention et la résolution des conflits internes et externes est à mon sens nécessaire.

Certains croient que l’arrivée massive de forces étrangères sur notre sol va réduire l’insécurité, ce qui est très peu probable sans l’assentiment et la participation des habitants eux-mêmes. La situation de beaucoup de pays dans le monde en a largement apporté la preuve. Au contraire, c’est le coût de la vie qui grimpera au plus haut et une insécurité chronique pourrira la vie de chacun. Chronique parce qu’il faudra bien justifier leur présence. Malheur aux plus pauvres ! Et ce qui nous rendait le plus fiers ne pourrait plus n’apparaître que dans nos souvenirs si nous n’y prenons pas garde. Malheur à celui qui ne pourra plus transmettre, offrir en partage, soulager ceux qui traversent une infortune passagère… Un cauchemar de plus. Et ça, nous ne pourrons pas longtemps le supporter !Un peuple civilisé n’a pas besoin d’homme en armes pour résoudre ses problèmes.

Bannissons les armes. La revendication par la violence, nous serons toujours les premiers perdants et aussi les premières victimes. Des armes sont fabriquées dans le monde tous les jours et il faut forcément un endroit (peut-être notre territoire) et des personnes pour les utiliser. Dans notre cas (Touareg et alliés), nous les utilisons les uns contre les autres. Qui perd des vies humaines, c’est nous ; qui gagne ce pari, ce sont les fabricants et leurs complices. On leur procure de l’argent indirectement en utilisant leurs armes à des fins désastreuses qu’on semble ignorer. Résultat : on sème l’insécurité et tout le monde nous fuit, y compris nous-mêmes. Hélas, notre bravoure, notre détermination et notre force ne nous servent à rien depuis bien longtemps. Changeons de stratégie ! Une technique qui ne marche pas est vouée à l’échec.

Si nous abandonnons les armes et ne cautionnons aucun trafic qui a fait de nous des victimes et nous anéantit de jour en jour, ce ne serait pas une fin en soi, mais une marche vers un progrès harmonieux de notre société. Rendez-vous compte de ce fait, tout ce trafic et toutes ces armes ne servent qu’à une minorité d’entre nous. Il faut reconnaître que la détention d’une  arme est devenue monnaie courante dans notre société ces dix dernières années. C’est surtout ça la bombe à retardement qu’on nous a mise entre les mains. Un horrible piège. C’est un fléau qu’il faut combattre, c’est urgent et primordial. Quel héritage allons-nous laisser aux futures générations ?

Regardons un peu notre passé, nous avons toutes les potentialités pour vivre dignement et honnêtement. Notre élevage et notre artisanat nous permettent de vivre si et si seulement nous nous investissons pour les développer, en faire des activités pérennes.

Ibrahim AG ALHABIB artiste musicien touarègue malien Tinariwen

Comme l’a si bien dit Ibrahim AG ALHABIB (leader de Tinariwen) dans l’une de ses chansons : « Si vous voyez un territoire verdoyant, ce sont ses hommes qui le protègent. »

Les savoir-faire de nos femmes dans beaucoup de domaines comme l’artisanat entre autres sont des activités à mettre en valeur. Sachant qu’elles sont les piliers de la famille, leur rôle dans la sortie de cette crise n’est jamais à minimiser. Il faudra les impliquer de plus en plus dans la gestion et les prises de décisions.

De l’action

Il faut se mobiliser, participer à la prise de décisions, s’impliquer dans des activités qui améliorent nos vies de tous les jours. Les jeunes doivent être des acteurs de ce processus. Ça ne se gagne pas facilement, il faut l’imposer. À tout prix. Si l’on continue à attendre un changement qui viendra du ciel ou de tout autre pays, sachez que nous allons mourir dans une attente éternelle. Tout changement auquel nous aspirons doit venir de l’intérieur, par nous d’abord. Toutes ces promesses de projets de développement qu’on nous fait miroiter ne nous feront pas bouger d’un pas. C’est éphémère. Elles nous maintiendront dans une situation de blocage total ou de dépendance. Nous avons besoin de voler de nos propres ailes, avec nos moyens, rudimentaires soient-ils, pour aller dans la direction qui nous arrange. Personne ne connaît nos besoins plus que nous-mêmes et aucune personne, moins encore un État, ne viendra le faire à notre place. C’est ce type de développement qui  nous conviendra et nous donnera un sentiment de fierté inégale, mais surtout visible dans nos réalités quotidiennes.

On est en train de nous distraire, tout se joue sur le temps afin de nous éloigner de nos vrais besoins, ne cédons pas à ce chantage ; nous avons besoin d’un réel changement de mentalité pour pouvoir enfin aller tous dans la même direction. On nous écrase physiquement, mentalement et psychologiquement.

Si nous sollicitons l’aide de qui que ce soit, elle doit rester strictement dans le domaine du savoir-faire, en matière de compétences techniques ou d’outils pratiques. Beaucoup de pays sont en avance dans ce domaine et nous pouvons solliciter leur aide. Ne demandons plus de l’argent à qui que ce soit, cherchons les moyens de faire profiter nos populations des connaissances de ceux qui sont en avance pour améliorer nos conditions d’être. Dans les domaines de l’éducation, la santé, les télécommunications, l’hydraulique, l’élevage, l’artisanat et la culture. Dans tous ces domaines, nous avons beaucoup de choses à apprendre comme nous avons aussi beaucoup de valeurs à transmettre. Nos populations en ont plus que jamais besoin pour s’épanouir et prouver leur savoir-faire.

Par Assaleck AG TITA ⋅/ Assaleck.mondoblog

Source: Autre Source

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