Effroyable situation que celle que connaît le Mali trois ans après l’élection au pouvoir d’Ibrahim Boubacar Keïta, avec 77, 62% des suffrages exprimés. C’était en 2013.
C’était le temps des grands discours de celui qui passait pour le« kankeletigui ». C’était aussi le temps des rêves pour tout un peuple qui, fatigué de son quotidien, avait cru bon d’espérer que le bout du tunnel était proche. Et que d’un coup de baguette magique, IBK évacuera tous les problèmes qui empêchent le pays de remonter la pente de la crise. Car il ne faut pas s’illusionner, elle est là la crise et tous ceux qui ne refusent pas de voir le savent et ont la douloureuse impression que l’on fait du surplace. Au sud du pays, un président et ses ministres s’occupent de « non-gérer » le pays, conscients peut-être- qui sait ?- qu’ils ne contrôlent rien quant au devenir de ce pays qui, quoi qu’on dise, est sous tutelle de qui on sait et sent la gangrène. Un pays où aucun changement important ne se produit. Au Nord, les terroristes et les groupes armés continuent de faire la pluie et le beau temps. Résultat, les tirs d’obus, les attentats et embuscades, les affrontements font désormais partie intégrante du quotidien des populations. Voilà qui résume la situation au Mali. C’est-à-dire qu’elle reste identique à celle de 2012, avant le coup d’Etat qui a débarqué le président Touré, qui continuait aussi à gesticuler à Bamako pendant que les groupes terroristes et la rébellion label MNLA prenaient racine dans le nord du pays.
Statu quo donc, n’en déplaise à quelques inféodés du régime qui semblent oublier qu’au Mali, « la vie, ce n’est pas comme dans un clip de rap » où tout est rose, « nickel », tout brille. IBK a été élu pour construire un Etat de droit, le rendre fort comme jamais il n’a été depuis 1960, reformer l’armée, réconcilier les Maliens, lutter contre la corruption. Sur ces principaux chantiers, ça saute aux yeux que son régime n’en mène pas large. Dire cela, ce n’est pas être anti-système ou contre IBK. Non, cela n’a rien à voir. C’est juste faire preuve de réalisme, et dire que les choses ne sont toujours pas comme elles devaient être.
Bien sûr, on pourrait objecter que les gens veulent des réponses, des résultats tout de suite, et que ça n’existe pas nulle part. Mais le fait est que, encore une fois, il n’y a presque pas de facteur d’optimisme. En tout cas, pas pour la jeunesse, dont on dit qu’elle est l’avenir du pays, mais pour qui l’horizon reste bouchée. C’est là un constat, virulent certes, mais auquel il n’y a rien à modifier aujourd’hui. Il faut dire les choses telles qu’elles sont.
Boubacar Sangaré
Source: lesechos