Suite à la récente contre-offensive d’envergure des Forces Armées maliennes (FaMa), et l’impact que cette pro-réactivité a eu sur les esprits, il nous revient de retracer les sillons de cette contre-offensive en nous basant sur la synthèse des informations disponibles auprès de la Dirpa.
C’est une approche d’enquête indiquée en la circonstance pour mieux cerner le phénomène terroriste mutant et mobile. Cet article met en lumière la nécessité d’une enquête approfondie après la fin des opérations de contre-offensive des FAMa, afin de comprendre pleinement la dynamique de la menace terroriste au Sahel.
Alors que les Forces Armées Maliennes (FAMa) et leurs homologues de l’Alliance des États du Sahel (AES) intensifient leurs opérations de contre-offensive face à une vague d’attaques terroristes sans précédent, l’urgence d’une analyse post-opérationnelle rigoureuse se fait sentir. Les douze assauts recensés en une seule semaine dans l’espace AES – dont six au Mali, quatre au Burkina Faso et deux au Niger – soulignent la nécessité d’une compréhension approfondie des capacités logistiques et des réseaux des groupes armés terroristes.
L’actualité brûlante de Nara, où les FAMa ont, ce 8 juin 2025, détruit un véhicule bourré d’explosifs et neutralisé ses occupants, est un exemple concret de l’efficacité des renseignements et de la détermination des forces maliennes. Cette interception cruciale, à 11 km au Sud-Ouest de Bale, met en lumière la menace persistante des Engins Explosifs Improvisés (EEI), véritables « armes de destruction massive » artisanales dans le contexte sahélien.
Cependant, au-delà de ces succès tactiques essentiels, des questions fondamentales demeurent. La recrudescence des attaques, leur coordination apparente et l’ampleur des moyens mis en œuvre par les groupes terroristes exigent une enquête d’une envergure inédite, une fois les opérations de contre-offensive stabilisées.
Les zones d’ombre à éclaircir concernent l’étendue des « Plots Logistiques » – combien de bases arrière, de dépôts de munitions, de caches de carburant ont été effectivement démantelés ?
Au-delà des communiqués ponctuels, une cartographie précise des infrastructures logistiques des groupes terroristes est cruciale pour évaluer l’impact réel des opérations et anticiper leurs capacités de résilience. Quels sont les chiffres consolidés des pick-up, des motos, et des stocks de carburant saisis ou détruits ?
Pour ce qui est de la nature des appuis matériels, on se pose la question d’où proviennent les munitions utilisées par les assaillants ? Une analyse balistique des munitions récupérées pourrait révéler des filières d’approvisionnement inattendues, allant des marchés noirs internationaux aux trafics régionaux. L’utilisation de drones par les groupes terroristes, majoritairement pour la reconnaissance, doit être quantifiée et leurs capacités d’évolution documentées. Sont-ils de simples drones commerciaux modifiés, ou assistons-nous à une sophistication accrue ? L’Identification des « Mercenaires étrangers » doit être activée après que les opérations de contre-offensive aient permis l’appréhension de combattants de nationalité autre que celles des pays du G5 Sahel. Au-delà des considérations diplomatiques, l’identification de ces individus est essentielle pour comprendre l’étendue des réseaux de recrutement et les éventuels soutiens externes aux groupes terroristes. S’agit-il de combattants idéologiquement motivés ou de « mercenaires » au sens strict, agissant pour des motivations financières ou politiques ? Leurs interrogatoires, une fois les opérations apaisées, pourraient livrer des informations capitales sur les commanditaires et les ramifications transnationales.
Pourquoi cette enquête est-elle essentielle ?
La période actuelle, marquée par le retrait des forces étrangères et la réorganisation des architectures de défense régionales, est exploitée sans relâche par les groupes jihadistes. Leur capacité d’adaptation et de coordination face à ces changements nécessite une réponse non seulement militaire, mais aussi stratégique et de renseignement. Une enquête approfondie, menée en toute transparence, permettrait de mesurer l’impact réel des contre-offensives et d’ajuster les stratégies futures ; de démanteler les réseaux logistiques et financiers des groupes terroristes, au-delà de la simple neutralisation des combattants sur le terrain ; de comprendre les dynamiques de recrutement et les motivations des individus rejoignant ces groupes ; et de renforcer la coopération régionale et internationale en partageant des renseignements précis sur les menaces et leurs soutiens.
La guerre contre le terrorisme au Sahel ne se gagnera pas uniquement par les combats sur le terrain. Elle exige une connaissance fine de l’ennemi, de ses ressources et de ses soutiens. C’est à ce prix que l’espace AES pourra non seulement repousser les attaques actuelles, mais aussi construire une sécurité durable pour ses populations. Une telle enquête est un investissement stratégique indispensable pour l’avenir de la stabilité régionale.
Source: L’Aube