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Gilles Yabi, Directeur du projet Afrique de l’Ouest de l’ONG International Crisis Group : «L’arrestation du Directeur de publication du journal Le Républicain est la preuve que l’influence du capitaine Sanogo existe toujours»

«L’arrestation du Directeur de publication du journal Le Républicain est la preuve que [l’influence du capitaine Sanogo  existe toujours. Mais, je crois qu’il ne faut pas oublier que le capitaine Sanogo a nommé des chefs d’état-major de différents corps des forces maliennes, qu’il a également nommé le chef du Service de renseignements, la fameuse Sécurité d’Etat à Bamako, et donc ces personnes lui sont toujours redevables… »

Ces propos sont de Gilles Yabi, Directeur du projet Afrique de l’Ouest de l’ONG International Crisis Group. Selon lui, au Mali, il ne fait pas bon critiquer le capitaine Sanogo. La preuve, l’arrestation le 6 mars dernier du Directeur de publication du journal Le Républicain, qui avait publié une lettre ouverte de soldats contre l’ancien chef putschiste. «Un an après son coup d’Etat, le capitaine Sanogo est-il toujours l’homme fort de Bamako ?», se demande-t-il.

En ligne de Dakar, il répondait aux questions de Rfi. Dans cet entretien,  Gilles Yabi a fait savoir qu’il n’y a pas eu beaucoup de développement, depuis le coup d’Etat de mars 2012. C’est vrai qu’aujourd’hui, le capitaine Sanogo a perdu une partie significative de son influence. Mais évidemment, «réduction de l’influence ne veut pas dire élimination de l’influence et neutralisation politique totale du capitaine Sanogo et de la junte qui a fait le coup d’Etat l’année dernière».

Gilles Yabi illustre cela par l’interpellation du journaliste Boukary Daou par la Sécurité d’Etat.  C’est la preuve que son influence existe toujours.  Pour lui, les gens ne doivent pas oublier que le capitaine Sanogo a nommé les chefs d’état-major des différents corps des forces maliennes ; qu’il a également nommé les chefs du service de renseignements, la fameuse Sécurité d’Etat à Bamako.  «Ces personnes lui sont donc toujours redevables. Forcément, on est également dans un contexte où le président Dioncounda Traoré a, certes, été renforcé par l’intervention militaire française, mais il cherche toujours à ménager le capitaine Sanogo dans cette phase de la transition».

D’après M. Yabi, tant que la classe politique n’occupe pas l’espace politique, cela laisse la possibilité au capitaine Sanogo et à d’autres militaires d’occuper cet espace et de s’opposer à l’alternative de la classe politique.  «Cela peut effectivement toujours donner une place aux militaires», analyse-t-il.

À la question de savoir si d’ici là, la Misma n’a pas intérêt à neutraliser les quelque 400 militaires qui sévissent au camp militaire de Kati, il répond : «Bien entendu. De toute façon, il y a beaucoup de défis qui se posent aux partenaires internationaux du Mali. Parmi ces défis, il y a la réforme du secteur de la sécurité. Ce n’est pas un Comité militaire de réformes qui va faire cela et certainement, pas un Comité dirigé par le capitaine Sanogo. Tout dépendra de l’accompagnement international qui sera mis en place. Il y a aujourd’hui la possibilité de neutraliser progressivement l’influence de la junte».

Pour éviter tout cela, les Maliens doivent vite aller aux élections. Même si l’échéance de juillet pour organiser ces élections lui semble très ambitieuse et pas très réaliste, et peut-être pas très souhaitable.  Ça peut se faire  trois mois plus tard, peut-être à la sortie de la saison des pluies.  Gilles Yabi  souhaite la réconciliation dès maintenant. Et surtout veut s’assurer qu’on ne fasse rien qui aggrave la rupture de confiance qui existe déjà entre les communautés.

C’est pour cela que la mise en place de cette Commission dialogue et réconciliation est extrêmement importante. Selon Gilles Yabi, cette Commission  est nécessaire, elle doit entreprendre un travail qui pourrait commencer à la base, localité par localité. Car, il y a des différences importantes d’une région à l’autre, et même d’un cercle de région à l’autre, en termes de crispation et d’évolution des rapports de force entre les communautés, pendant les neuf mois d’occupation par les forces du Mnla (Mouvement national de libération de l’Azawad), d’abord ; et ensuite, par les forces jihadistes.

Bekaye DEMBELE

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