En visite au Mali depuis la fin de la semaine dernière, Jean-Pierre Lacroix, Secrétaire général adjoint des Nations Unies, chef des opérations de maintien de la paix, a eu une séance de travail avec une délégation du gouvernement de la transition, conduite par le Premier ministre Dr Choguel Kokalla Maïga. C’était l’occasion pour le Mali de réitérer ses réserves concernant le renouvèlement du mandat de la Minusma.
A l’entame de ses propos, le Premier ministre a indiqué que le Mali « a toujours entretenu un dialogue dynamique avec les Nations Unies dans le cadre de la mise en œuvre efficace et efficiente de son mandat » depuis l’installation de la Minusma en 2013.
Par la suite, comme il l’a fait le 21 septembre 2021, Dr Choguel Kokalla Maïga a indiqué qu’il n’y a pas de sentiment anti-Minusma au Mali. Mais, argumente le chef du gouvernement malien, « aussi longtemps que les raisons pour lesquelles la Mission a été déployée, à la demande de notre pays, ne sont pas comprises et satisfaites ; aussi longtemps que la Minusma aura du mal à s’acquitter convenablement de son mandat ; aussi longtemps que les populations vont continuer à regretter le passé récent fait de quiétude, les interrogations sur l’utilité et la pertinence de la présence internationale constitueront des sujets de préoccupation, qu’il faut savoir aborder avec courage et lucidité et non chercher à éluder avec malice ».
Pour le Premier ministre, « la crédibilité de toute action de l’ONU sur notre territoire se jugera à l’aune de notre capacité collective, Gouvernement du Mali et ONU, à assurer la protection des populations civiles, à lutter contre l’insécurité et le terrorisme, à aider au redéploiement de l’État, au rétablissement de sa souveraineté sur l’ensemble du territoire ; et cela, dans une véritable optique de stabilisation et de paix durable ».
Le Premier ministre Choguel Kokalla Maïga a profité de cette rencontre pour se prononcer sur l’Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger. « Je vous annonce, d’ores et déjà, qu’une réunion de niveau décisionnel sur la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation issus du processus d’Alger, qui regroupera les parties signataires, la médiation internationale et la communauté internationale autour du Comité de suivi de l’Accord (CSA) se tiendra dans les tout prochains jours », a-t-il annoncé. A l’en croire, la détermination du Mali ne faiblira point en vue de faire accomplir au processus de DDR/I les progrès substantiels nécessaires à l’achèvement des actions prioritaires en matière de défense et de sécurité, dans le domaine politique et institutionnel, de développement économique et social, de même que la thématique réconciliation, justice et questions humanitaires.
Le Mali réitère ses réserves du 29 juin
Bien que le mandat de la Minusma ait été renouvelé, le Mali a exprimé ses réserves. Le Premier ministre est revenu sur ses réserves devant Jean-Pierre Lacroix, Secrétaire général adjoint des Nations Unies, chef des opérations de maintien de la paix. « J’ai évoqué plus haut la position de notre Gouvernement sur certains aspects de la résolution 2640 du 29 juin 2022 du Conseil de sécurité renouvelant pour une période d’un an, le mandat de la Minusma. Je vous réitère, ici et solennellement, les fortes réserves exprimées par l’État du Mali, quant au mécanisme des droits de l’Homme, sans l’implication de l’État malien », précise le chef du gouvernement malien.
Même si la Minusma estime qu’elle est victime de restrictions, Dr Choguel Kokalla Maïga avance qu’il n’y a que « des mesures de planification et de sécurité nationale, concernant la mobilité de la Minusma sur certaines parties du Mali. «Il est impératif de renforcer la coordination et de continuer étroitement à travailler ensemble, la main dans la main, et non pas de travailler les uns à côté des autres, y compris sur les questions de droits de l’Homme, dont notre Gouvernement et notre armée sont à la fois soucieux et respectueux, en vertu de notre culture ancestrale et aussi en vertu de nos engagements internationaux », précise Dr Maïga.
Cette rencontre a été également l’occasion pour le Premier ministre malien de se prononcer sur la situation des 49 militaires ivoiriens arrêtés au Mali le 10 juillet dernier. Il a été même demandé à la Minusma une transparence sur ses activités. « Au-delà des questions particulières, comme celles se rapportant à la situation des Éléments Nationaux de Soutien (NSE) des pays contributeurs de troupes, le Gouvernement du Mali souligne la nécessité d’une plus grande transparence de la part de la Minusma en ce qui concerne ses effectifs en activité sur le sol malien, ainsi que sur les conditions de déploiement et de rotations de contingents militaires et civils et des NSE », a demandé Dr Choguel Kokalla Maïga qui a ajouté : « Concernant la situation sur le terrain, en lien avec le retrait de certaines forces, je voudrais vous assurer que les dispositions sont prises afin qu’aucune situation de vacuité, aucun vide sécuritaire ne se crée à la suite du départ des forces françaises, de la Task Force Takuba et de la Force conjointe du G5 Sahel, dont les éléments maliens sont déjà rappelés sous le drapeau, au compte de l’État-major des armées ».
Le chef du gouvernement a, par la suite, indiqué que le Mali accorde la plus haute attention à la situation humanitaire sur le terrain, en particulier au Centre et au Nord du Mali, afin d’y apporter les réponses appropriées en coopération avec la communauté humanitaire.
Boureima Guindo