La direction nationale de l’Agriculture (DNA) a organisé, hier lundi, dans ses locaux, une réunion avec les directeurs régionaux de l’Agriculture (DRA) sur la gestion rationnelle des intrants agricoles.
Devant se tenir autour du directeur national de l’Agriculture, Issiaka FOFANA, la rencontre a enregistré la présence inopinée d’un invité de taille en la personne du ministre de tutelle, Kassoum DENON, qui a jugé nécessaire de profiter de la présence des DRA pour porter des messages de sensibilisation et des consignes fermes à l’endroit de ceux-ci, en vue de soigner l’image du secteur qui a été fortement éclaboussée par la question des engrais.
En dépit de son agenda très chargé, le ministre Kassoum DENON a, de façon improviste, profité de la présence des premiers responsables de l’Agriculture au niveau régional pour lancer un cri de cœur en vue de permettre au secteur de l’Agriculture d’honorer les attentes à hauteur de l’attention que le Président de la République, Ibrahim Boubacar KEITA, lui accorde.
Gestion de l’engrais, une exigence du Chef de l’Etat :
D’entrée de jeu, le chef du département a reconnu que la gestion des intrants agricoles et spécifiquement de celui de l’engrais a fait et continue de faire couler beaucoup d’encres. Une situation à laquelle il dit ne pas être un néophyte pour avoir passé 34 ans sur le terrain. Donc, un spécialiste de l’Agriculture qui sait bien ce qui se passe et comment se passe-t-il sur le terrain.
Le ministre a rappelé que lors du Conseil supérieur de l’Agriculture, le Président de la République a insisté à ce que le secteur de l’Agriculture soit assaini à la suite de la question de l’engrais qui a fait l’objet de beaucoup de dérapages.
Selon lui, suite aux instructions données par le chef de l’Etat, il a eu la chance de rencontrer 44 ministres de l’Agriculture de l’Afrique à Abidjan, lors d’un Sommet. Une rencontre continentale des ministres de l’Agriculture dont il a profité pour chercher à savoir comment ses homologues font chez eux pour gérer la question des intrants agricoles.
Le ministre DENON a informé que les conseils de ses pairs lui ont permis de se rendre compte que la situation est très mal gérée au Mali.
«Au Mali, ils sont 97 fournisseurs alors que dans certains pays il n y a que deux, trois ou quatre personnes qui fournissent l’engrais à tous les producteurs du pays. Par exemple au Burkina-Faso et au Sénégal, ils sont 4 fournisseurs et en Côte d’Ivoire, ils sont 6. J’ai demandé à la DNA de faire des propositions par rapport aux fournisseurs qui doivent être retenus. Suite à ce travail sur la base de certains critères, nous avons retenus 12 personnes qui seront chargées de fournir l’engrais cette année », a expliqué le ministre DENON.
Aussi, a-t-il déclaré avoir instruit à la CMDT de faire une demande de Manifestation d’intérêt qui sera suivie par un appel d’offres international. Comme critères pour être retenu comme fournisseur de l’engrais dans les zones CMDT, le ministre a souligné qu’il faudrait avoir 10 milliards de FCFA de chiffres d’affaires, disponibles et vérifiés dans une Banque avec caution. Pour les produits phytosanitaires, il faudra avoir plus d’un milliards, a-t-il révélé.
Pour le ministre, il faut absolument que la volonté d’assainissement qui se manifeste au niveau du cabinet soit répliquée et jouée à fond à tous les niveaux dans ses services rattachés.
En tout cas, soutient-il mordicus, quoi qu’il advienne les 12 fournisseurs retenus ne seront pas changés.
«J’ai été appelé pour une mission et je le ferai à fond. C’est vous qui êtes les premiers maillons de la chaine pour faire passer le message au niveau de la base. Je ne tolérai aucun message contraire de la part de vous », s’est-il adressé aux directeurs régionaux.
La gestion des cautions :
Une autre question fondamentale dont la résolution tient à cœur le ministre DENON est la gestion désordonnée et frauduleuse faite des cautions par certains fournisseurs en connivence avec les agents du secteur. Le premier responsable du département dit avoir des preuves qu’au niveau des régions qu’on est en train de manier les cautions comme on veut. C’est pourquoi il a menacé de tout faire pour que les agents coupables en fassent les frais pour ne pas mettre en cause la mission d’assainissement dont le chef de l’Etat lui a fait confiance.
« Les cautions se vendaient dans la cour de la DNA et nous avons les preuves. La caution est un chèque à blanc, dont celui qui se permet de le vendre peut se livrer à des sanctions pénales. Quand vous donnez une caution à quelqu’un, il a accès au Trésor et peut aller puiser les fonds de l’Etat. Je ferai des inspections au niveau de toutes les Directions régionales pour voir comment les cautions sont gérées. Ça ne se passera plus comme avant », a mis en garde le ministre de l’Agriculture.
Le ministre DENON a également affirmé avoir le doute autour de la véracité des dépôts d’engrais par certaines sociétés.
Selon lui, les dépôts annoncés ne sont pas toujours réels. Raison pour laquelle, il a insisté auprès de ses directeurs régionaux de communiquer les dépôts réels, la quantité des engrais, quand est-ce qu’ils sont arrivés ? Le nombre de tonnage et dans quelle localité ?
« Que chaque directeur régional nous envoie ces informations d’ici la fin de cette semaine. Aussi, je voudrai que vous me fassiez des propositions pour que le ministère de l’Agriculture ne puisse pas être la risée des autres. Tant que l’encadrement est de connivence avec les fournisseurs ça ne va pas marcher. De grâce, il faut faire honneur à notre métier. Donner le même message à vos agents et celui qui se ferait prendre sera fortement pénalisé et servira de leçon pour les autres», a menacé le ministre.
Une dotation supplémentaire de 35 000 tonnes d’engrais :
Le Président de la République depuis son accession au pouvoir ne cesse de manifester son intérêt pour le secteur rural. Après 15% du budget octroyé au secteur Agricole, il vient de prendre la décision d’augmenter la quantité des engrais subventionnés fournis aux paysans de 35 000 tonnes, soit 5 milliards de FCFA supplémentaires. Face à cette décision du chef de l’Etat, le ministre a insisté auprès de ses directeurs régionaux de tout faire pour donner une réponse loyale à cette décision politique en mouillant les maillots pour prouver à la fin de l’hivernage que la subvention de l’engrais a apporté un plus à la productivité.
Il a par ailleurs exhorté chaque responsable de ses services rattachés à jouer le rôle qui est le sien et qu’il ne serait là que pour exercer la tutelle. Il a rassuré le Directeur national de l’Agriculture qu’il a tout le pouvoir et tout son soutien pour réussir la mission qui lui est confiée.
A la suite du ministre, des directeurs régionaux de l’Agriculture ont pris la parole pour souligner certains problèmes qu’ils rencontrent dans leurs localités. Tous les intervenants ont, à l’unanimité, salué le ministre pour ses propos qui les ont mis à l’aise.
Ils ont tour à tour exposé certains problèmes qu’ils rencontrent dans leurs localités. Des problèmes auxquels le ministre a donné des pistes de solutions tout en les exhortant à s’assumer avec les pouvoirs qui leur sont conférés.
Enfin, le directeur national de l’Agriculture, Issiaka FOFANA, s’est dit ravi des conseils donnés par le ministre DENON. Il estime qu’il est nécessaire d’aller sur des bases claires et discuter des problèmes réels pour avoir des solutions concrètes.
Le ministre a enfin demandé qu’à l’issue de la réunion les directeurs régionaux de l’Agriculture lui proposent les nouvelles décisions et propositions de solutions qui permettront de sécuriser le secteur et le mettre à l’abri des critiques dont il fait l’objet.
PAR MODIBO KONE
Source: info-matin