Les entraîneurs français Claude Le Roy et Arsène Wenger ont été décorés vendredi de la plus haute distinction du Liberia par le président et légende du foot George Weah, une décision qui a fait grincer des dents dans ce pays pauvre d’Afrique de l’Ouest.
Les deux Français, qui ont plusieurs fois expliqué qu’il considéraient George Weah comme un « fils », avaient lancé à la fin des années 1980 la carrière de footballeur en Europe de celui qui est devenu président du Liberia au début de l’année.
Sur les conseils de Claude Le Roy, Arsène Wenger avait recruté Weah en 1988 à Monaco, passé ensuite notamment par le PSG (1992-1995) et l’AC Milan (1995-1999). Brillante, sa carrière a été couronnée par l’obtention du Ballon d’Or en 1995, le seul glané par un joueur africain.
« Votre rôle positif a non seulement marqué la carrière et la vie de nombreux joueurs africains, mais aussi celles d’une génération entière de jeunes Libériens qui ont fait du président Weah un exemple », a déclaré un maître de cérémonie pendant que « Mr George » passait autour du cou d’Arsène Wenger la médaille de « Knight Grand Commander of the Humane Order of African Redemption », la plus haute distinction du pays, devant quelques centaines d’invités réunis dans la banlieue de la capitale Monrovia.
« Vous êtes président maintenant. Auparavant, vous étiez mon enfant », a déclaré à la fin de la cérémonie l’ancien entraîneur des Gunners d’Arsenal, en souhaitant à son ex-protégé un « avenir de paix et de bonheur ».
« Rendez-nous fiers », a ajouté Arsène Wenger. « La vie de ce gars est incroyable, elle ferait un film fantastique », avait déjà jugé Wenger en janvier. « Je me souviens de notre première rencontre à Monaco, il était un peu perdu, il ne connaissait personne, n’était pas considéré. En 1995, il est devenu le meilleur joueur du monde ! », avait-il ajouté.
Lui aussi distingué vendredi à Monrovia, Claude Le Roy, actuel sélectionneur du Togo, avait rencontré le jeune Weah lorsqu’il officiait à la tête du Cameroun.
« Il avait signé au Tonnerre Yaoundé et venait à l’entraînement de la sélection du Cameroun, alors qu’il était libérien. J‘ai été ébloui par son talent et j’ai appelé Arsène », a récemment expliqué à l’AFP le « Sorcier blanc ».
George Weah a succédé en janvier à Ellen Johnson Sirleaf – première femme élue chef de l’État en Afrique – à la tête de ce pays en grande précarité financière, après la guerre civile de 1989-2003 et une épidémie d’Ebola meurtrière (2014-2016), et lourdement dépendant de l’aide internationale.
Weah a débuté la politique en 2002 et a échoué aux élections présidentielles de 2005 et 2011 (candidature à la vice-présidence) avant de s’imposer fin 2017.
Sa décision d’accorder la plus haute distinction du pays aux deux entraîneurs français a fait débat au Liberia depuis le début de la semaine, notamment à la radio et dans les journaux.
« Ca n’aurait pas dû être une priorité », estimait George Sackie, un enseignant de 35 ans interrogé par l’AFP, en allusion aux difficultés économiques du pays.
Mais pour le gouvernement, il est certain que les deux hommes, en soutenant George Weah, ont aidé le pays tout entier.
« Si Arsène Wenger et Claude Le Roy n’avaient pas mis George Weah en avant, il ne serait pas la fierté de toute une nation aujourd’hui », a déclaré le vice-ministre des Sports et de la Jeunesse, Andy Quamie.
Jeune Afrique