Quatre ans après avoir pris les rênes d’un Mali en quête de stabilité, le général Assimi Goïta a profité de la prière de l’Aïd el-Kébir pour adresser un message fort à son peuple et à l’ensemble de la Confédération des États du Sahel. Drapé de blanc, entouré de ses hommes, le président de la Transition a mêlé ferveur religieuse, hommage militaire et engagement politique, réaffirmant sa détermination à éradiquer le terrorisme et à ancrer la souveraineté sahélienne dans l’action concrète.
C’est dans un silence solennel, rompu par les invocations rituelles, que le président de la transition malienne, le général d’armée Assimi Goïta, a foulé ce 6 juin le tapis rouge dressé à l’entrée de la salle des banquets servant de lieu de prière à l’occasion. Entouré de ses gardes rapprochés, en boubou blanc éclatant et chéchia assortie, l’homme fort de Bamako a, comme à son habitude depuis 2021, accompli la prière de l’Aïd el-Kébir dans la plus grande discrétion, avant de se prêter, pour une rare fois, à l’exercice de l’interview.
Une fête, pour ce militaire formé à Koulikoro et aguerri dans le centre du pays, ne saurait être qu’un rituel religieux. Elle est, selon ses mots, « un moment de communion, de prière et de mémoire collective ». Et dans le regard sobre et contenu du chef de l’État, nul doute : la parole présidentielle s’adresse autant à son peuple qu’à l’ensemble de l’AES, cette alliance sahélienne dont il assume désormais la présidence tournante.
« Je voudrais m’incliner devant la mémoire des vaillants soldats de l’AES tombés sur le champ de la dignité, et souhaiter un prompt rétablissement aux blessés », a-t-il déclaré à la presse, avant de rendre hommage à la force unifiée de l’AES pour « ses succès remarquables malgré les attaques barbares des groupes armés terroristes ».
La foi en l’action
Depuis quatre ans, Goïta a imprimé au Mali un style singulier : austère mais efficace, martial mais ancré dans la proximité. Loin des discours lyriques, il privilégie l’action directe et la symbolique des gestes.
Mais le message de ce 6 juin, porté par la solennité de la fête de Tabaski, va au-delà du Mali. Il se veut continental. Car l’AES, cette entité formée avec le Burkina Faso et le Niger, en septembre 2023, est désormais la matrice de la doctrine Goïta : souveraineté assumée, coopération militaire renforcée, et rejet des ingérences extérieures.
« La lutte contre les groupes armés terroristes est un engagement national, international, auquel les pays de l’AES ont souscrit », a-t-il martelé. « Nous allons la mener sans relâche, en tout temps, en tous lieux, en toutes circonstances et sans esprit de recul. »
L’AES, levier stratégique
Ce positionnement réaffirme la centralité géopolitique du trio sahélien, qui, depuis le retrait des forces françaises et de la MINUSMA, trace une voie propre, entre partenariat stratégique avec la Russie et intégration régionale renforcée. Goïta ne cache plus son ambition d’en faire un bloc souverain, unifié militairement, économiquement, et diplomatiquement.
La prière de l’Aïd, dans ce contexte, devient un acte politique au sens le plus noble : celui d’un chef d’État qui, entre deux fronts militaires, prend le temps de communier avec son peuple et de parler à la nation sahélienne. Un message relayé largement sur les réseaux sociaux maliens où la photo du président, entouré de ses gardes, a déjà été partagée des milliers de fois, symbole d’un pouvoir enraciné, mais vigilant.
Mobilisation et espoir
Alors que les défis sécuritaires restent immenses, de Ménaka à Tessit, Goïta continue de tracer son sillon. À ceux qui lui reprochent la lenteur du processus de retour à l’ordre constitutionnel, il répond par les faits : « Nous ne reculerons pas. »
Et de conclure son intervention par un appel vibrant : « Je salue le soutien constant des populations de l’AES. Je leur demande de rester mobilisées jusqu’à la victoire finale. »
Chiencoro Diarra