Investir dans l’éducation et la formation des jeunes Maliens afin de leur fournir les compétences nécessaires pour travailler dans le secteur minier, inclut le développement de programmes de formation professionnelle spécialisée, l’amélioration des infrastructures éducatives et l’accès à des bourses d’études pour les étudiants intéressés par les métiers miniers. L’Etat malien se caractérise par une centralisation excessive et une concentration des infrastructures dans la capitale, laissant le reste du pays arriéré et dépourvu des commodités de la modernité. Ce fait est l’une des raisons de l’attrait de populations locales pour le projet mortifère des extrémistes et apporte de l’eau au moulin de tous les séparatistes.
A ce point, c’est tout à fait léger au double plan stratégique et technique de ne pas avoir des centres de formations dans la région de Kayes, celle dont les enfants sont ceux qui envoient le plus d’argent de l’étranger vers le Mali, celle qui enregistre plus de 78 % des parts de la production industrielle annuelle d’or du pays et celle, à l’évidence, qui donne le plus au Mali et qui reçoit très peu en retour. Pour ce faire, il est impératif de promouvoir la collaboration avec les entreprises minières, la recherche et le développement, le renforcement des capacités institutionnelles et la collaboration public-privé.
L’emplacement des sites miniers indique les lieux d’implantation par excellence des centres de formations aux métiers des mines. Le développement économique n’est souvent qu’une affaire de bon sens, surtout lorsque l’on est en phase de rattrapage de son retard sur les autres, comme c’est le cas du Mali. Dans tous les pays du monde, et ce dès les débuts de l’industrialisation, les écoles de mines ont toujours été établies dans les bassins miniers afin non seulement de regrouper et d’intégrer les activités d’extraction et de métallurgie avec les activités de formation initiale et continue de la main d’œuvre, mais aussi et surtout de les rapprocher des activités de commercialisation et de normalisation de cette activité.
Et de nos jours, force est de reconnaître que l’extension du projet «Mali numérique» de la Société malienne de transmission et de diffusion (SMTD-SA) offre une belle opportunité de réaliser d’ambitieux projets de formation dans le secteur minier. Il est en effet prévu l’extension du réseau de fibre optique du Mali jusqu’aux frontières du Sénégal et de la Mauritanie. La fibre passera ainsi à proximité du plus grand bassin minier et aurifère du pays. Des établissements de formation établis dans les bassins miniers pourront donc profiter de l’infrastructure de la SMTD-SA pour organiser leurs enseignements aussi bien en présentiel qu’à distance en se référant à ce qui se fait ailleurs.
Grâce à la fibre optique et aux infrastructures de visioconférences, les meilleurs enseignants du monde pourront dispenser des cours aux apprenants maliens qui, en plus, pourront conduire leurs travaux pratiques dans les laboratoires des compagnies minières. Pour réellement rentabiliser l’exploitation minière au profit des Maliens, des collectivités et l’Etat, on aura besoin de développer un véritable «cluster» adapté aux réalités du terrain et répondant aux stratégies et normes requises en la matière au plan international. Il est ainsi nécessaire d’accorder la priorité à la formation initiale et continue des professionnels du secteur minier ; la recherche scientifique ; les transports terrestres et aériens ; la normalisation et le management de la qualité ; la justice ; la sécurité…
Selon des intervenants au colloque de juillet 2023, le transfert des compétences est aussi une stratégie à privilégier pour permettre au Mali d’accroître ses revenus issus de l’industrie minière. Les débats sur cette question ont permis de relever un certain nombre de points d’attention issus des contributions et des réponses apportées aux questions. Ainsi, à la question relative au caractère stratégique des ressources humaines et à la nécessité de leur promotion sans fuite de cerveaux, il a été rappelé que, pour garder les talents nationaux sponsorisés, il faudrait assortir les actes de sponsoring d’actes juridiques qui oblige à servir le Mali. Et cela en plus de revoir les offres financières à la hausse.
Les participants ont déploré le fait que le Mali ait perdu beaucoup de talents qu’il a formés en Afrique du Sud. Et cela faute d’avoir mis des garde-fous juridiques obligeant leur retour au service du Mali. Le constat est que les talents maliens à l’extérieur ne sont pas généralement intéressés car ils ont des offres d’ordre mondial. Quant au transfert des compétences, ce n’est pas compliqué selon spécialistes. Mais, cela nécessite un programme et une vision.
Mais, la priorité aujourd’hui, c’est la création d’une véritable école des mines à Kayes ou Sikasso, qui sont pour le moment les deux régions minières du Mali.
Moussa Bolly
ORPAILLAGE :
Bientôt un cadre de concertation contre la contrebande de l’or
Une réunion d’information et d’échange des acteurs sur la mise en place très prochaine d’un cadre de concertation et de coordination pour la commercialisation de l’or au Mali s’est récemment tenue au ministère des Mines.
Cette initiative (cadre de concertation et de coordination) aura comme missions la coordination, le suivi et l’évaluation de la mise en œuvre des recommandations du rapport élaboré par l’Ong «Pact» en collaboration avec le ministère des Mines sur la «Commercialisation de l’or responsable au Mali». Il s’agit de permettre un commerce de l’or formel et responsable tout en atténuant les risques sécuritaires et de violation des droits de l’Homme liés au secteur de l’orpaillage.
Et cela d’autant plus que l’artisanat minier joue un rôle crucial dans l’économie malienne. Cependant, le secteur fait face à plusieurs défis, dont la commercialisation de l’or qui demeure largement informelle, empêchant ainsi l’Etat malien à lever des impôts et risquant de financer des acteurs criminels et terroristes. Le rapport élaboré par l’Ong Pact propose des activités concrètes pour lutter contre la contrebande d’or, empêcher le financement de la criminalité et le terrorisme et promouvoir la formalisation de l’extraction artisanale de l’or à petite échelle (orpaillage) au Mali.
A la suite des ateliers et d’autres engagements multipartites ciblant divers ministères, des agences gouvernementales, le secteur privé ainsi que la société civile, ce rapport a été validé et publié en juin 2024. C’est pour garantir la mise en œuvre effective de ses recommandations que la Primature a recommandé de créer ce cadre de concertation et de coordination dédié au suivi !
M.B
Source: Le Matin