Le Premier ministre, ministre de l’Economie et des Finances, Dr Boubou Cissé, devait boucler en principe, hier dimanche 1er septembre, une visite dans la région de Kayes. Il était accompagné par Boubacar Alpha Ba, ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, Mme Traoré Seynabou Diop, ministre de l’Equipement et des Infrastructures et Ibrahim Oumar Ly, ministre des Transports et de la Mobilité urbaine. Ce déplacement du chef du gouvernement est consécutif aux mouvements survenus la semaine dernière à Kayes, Kéniéba, Kati, Kita, Nioro du Sahel et Kolokani.
Cette vague de protestations a brutalement réveillé les grands décideurs, qui semblaient jusque-là insensibles aux fréquentes interpellations sur l’état de dégradation de cet axe routier. La vague de protestations prouve également qu’il ne suffit plus d’acheter les consciences des électeurs avec de l’argent d’origine douteuse pour espérer jouir confortablement les délices du pouvoir. La révolte des riverains de la Route Nationale Bamako-Kayes est l’illustration parfaite que les gouvernants sont coupés des préoccupations des gouvernés au nom desquels ils exercent le pouvoir temporel.
Depuis août 2014 où Moussa Mara s’est rendu à Kayes par voie terrestre, ni le président de la République ni ses Premiers ministres n’avaient emprunté la route lors de leurs déplacements dans la première région. Par contre, la ministre de l’Equipement et des Infrastructures, Mme Traoré Seynabou Diop, voyageait régulièrement sur ce tronçon dans le cadre du suivi des chantiers notamment le deuxième Pont de Kayes et la Route Kayes-Sadiola. Récemment, les ministres Safia Bolly et Amadou Thiam, au fond de leurs confortables V8, ont dû mesurer les souffrances vécues par les usagers de cette voie publique.
La sortie des citoyens, notamment les jeunes et les femmes, pour réclamer la réhabilitation de la Route Bamako-Kayes, la reprise des activités ferroviaires et la relance de l’aéroport Dag dag est aussi l’illustration parfaite du peu d’attention que les plus hautes autorités accordent aux agents de l’administration publique envoyés auprès des populations. En juin dernier, un haut cadre du gouvernorat de Kayes nous confiait son amertume face à l’état très désastreux de ce tronçon.
Il a fallu des mouvements de colère pour que le Premier ministre prenne la route de Kayes. Sur le parcours, il annonce à Diéma le 29 août dernier : « Les travaux démarreront d’ici 2 semaines et prendront fin dans 6 mois au maximum… ».
C’est dommage que le président IBK et son gouvernement ne réagissent que sous la contrainte populaire. D’autres foyers pouvant se raviver dans les jours à venir, ils seraient mieux avisés de chercher à contenir les frustrations ça et là.
Les citoyens qui ont obligé le gouvernement du président IBK à s’attaquer aux travaux de réhabilitation de la route Bamako-Kayes doivent se battre contre le lobbying des transporteurs visant à empêcher l’application de la Directive N°14/2009/CM/UEMOA portant institution et organisation d’un système d’information sur les accidents de la circulation routière dans les Etats membres de l’UEMOA.
A chaque fois que Bamako décide de cette directive, les syndicats des transporteurs menacent d’aller en grève en faisant planer le risque d’une pénurie dans l’approvisionnement du pays en divers produits, le gouvernement recule de façon honteuse. Récemment, le gouvernement de la République du Sénégal avait bloqué plus de 100 camions appartenant à nos compatriotes pour non-respect de cette disposition communautaire. S’il est bon de lutter pour la réhabilitation d’une route, il est encore mieux de veiller au respect des dispositions qui permettent d’éviter sa dégradation rapide.
Chiaka Doumbia
Source : Le Challenger