Dans un communiqué lu dans la soirée du 25 janvier à la télévision nationale malienne, les autorités de la transition ont annoncé la « fin, avec effet immédiat » de l’accord de paix d’Alger signé en 2015 entre l’Etat malien et les groupes rebelles indépendantistes touareg et arabes du nord du pays, sous l’égide de l’Algérie.
Devant les téléspectateurs, le Gouvernement, par la voix du ministre de l’administration territoriale, le Col Abdoulaye Maiga, a justifié cette décision par « le changement de posture de certains groupes signataires de l’accord (…) devenus des acteurs terroristes », ainsi que par « les actes d’hostilité et d’instrumentalisation de l’accord » auxquels s’est livré selon lui Alger. Les autorités algériennes sont également accusées d’actes hostiles et d’instrumentalisation de l’accord. Bamako affirme en clair qu’Alger soutient les groupes terroristes en leur offrant l’asile et en leur permettant d’ouvrir des bureaux sur son sol et lui reproche également d’avoir participé activement au maintien du régime de sanctions économiques imposé au Mali par la communauté internationale. Les autorités de transition en veulent pour illustration une tentative de manipulation du dernier sommet du Mouvement des Non Alignés à Kampala, aux fins de parvenir à une résolution hostile au Mali. En lieu et place de l’accord, les autorités maliennes projettent un «Dialogue direct inter-malien», dont le décret a été signé des mains du président de la transition, quelques heures avant l’annonce sonnant la fin de l’accord. Déjà annoncée lors ses vœux de nouvel an, la mise en place d’un «dialogue direct inter-malien», selon le Col Assimi Goita, vise à «privilégier l’appropriation nationale du processus de paix».
Vendredi, soit 24 heures après le communiqué du Mali, le ministère algérien des affaires étrangères a, à son tour dans un communiqué, battu en brèche les raisons avancées par les autorités maliennes. Selon le contenu dudit communiqué, les explications fournies par les autorités maliennes pour quitter l’accord «ne correspondent absolument ni de près ni de loin à la vérité ou à la réalité». « Il n’a échappé à personne que les autorités de transition préparaient cette décision depuis bien longtemps », a souligné la diplomatie algérienne, tout en exprimant sa « profonde préoccupation» face à cette décision d’une «gravité particulière pour le Mali lui-même et pour toute la région».
Quant aux anciens rebelles, il semble qu’ils ne sont pas non plus surpris de la décision de Bamoko d’enterrer définitivement l’accord. «Depuis l’arrivée au pouvoir de la junte «suite au coup d’Etat de mai 2021», il est clair que les colonels n’avaient aucune intention de maintenir l’accord d’Alger. Conséquence, après huit années d’un cessez-le-feu fragile sous la garantie de la médiation algérienne, tout porte à croire les hostilités sont en passe de reprendre entre les séparatistes et le pouvoir central de Bamako. Si le Mali peut compter sur une armée dont le visage à changer avec l’acquisition de nouveaux équipements depuis l’avènement des colonels au pouvoir, la Cma peut à son tour miser sur le soutien des autorités algériennes.
Amidou Keita