« Je crois à la vertu de la guerre de mouvement. » Dans la salle des fêtes de l’Elysée, jeudi 15 septembre, devant la cheffe du gouvernement, Elisabeth Borne, vingt ministres assis au premier rang et l’ensemble des préfets réunis, le président de la République a employé cette métaphore pour exprimer sa volonté de voir ses promesses concrétisées plus rapidement. Il l’a illustré, ces derniers jours, en montant au front pour hâter sa réforme des retraites, orchestrant la gestation du projet, quitte à dérouter et à diviser au sein de son propre camp.
Emmanuel Macron n’exclut pas d’insérer un amendement dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), qui doit être présenté en conseil des ministres le 26 septembre, pour s’assurer d’une mise en œuvre à l’été 2023. Ni les modalités de vote, ni le contenu de la réforme – report de l’âge légal de départ ou allongement de la durée de cotisation – ne sont officiellement actés.
Depuis trois jours, les rendez-vous politiques se succèdent des deux côtés de la Seine. Le président de la République a abordé le sujet avec Elisabeth Borne au cours d’un déjeuner à l’Elysée, jeudi, après avoir rencontré durant plus de deux heures les députés de la majorité de la commission des finances. Devant eux, Emmanuel Macron a fait valoir qu’il n’y avait pas de moment idéal pour légiférer et que la situation politique et sociale ne serait pas moins simple dans quelques mois.
Pendant ce temps, à Matignon, Elisabeth Borne affirmait devant ses ministres qu’une réforme des retraites serait nécessaire pour financer le modèle social. Quant aux modalités, elle a maintenu, selon le mot d’un ministre, une neutralité de « poker face ».
A couteaux tirés
La veille, lors d’un petit déjeuner avec les patrons des trois partis de la majorité, la première ministre avait écouté les réserves de Stanislas Guerini, délégué général du parti présidentiel, la retenue d’Edouard Philippe, chef du parti Horizons, et les protestations de François Bayrou, président du MoDem. Ce dernier s’oppose à ce qu’il considère comme une méthode archaïque : « Il faut faire la réforme en 2023, convaincre et entraîner les Français, en évitant de passer en force. » « A quoi sert le CNR [Conseil national de la refondation] ?, se morfond le secrétaire général de cette instance inaugurée le 8 septembre par Emmanuel Macron. A trouver un chemin pour réfléchir aux problèmes fondamentaux sur l’avenir du pays et échapper au conflit systématique. »
Au sein du camp présidentiel, l’atmosphère est à couteaux tirés. Dès mardi, la présidente (Renaissance) de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, et le chef de file des députés Horizons, Laurent Marcangeli, ont exprimé leur réticence en réunion des dirigeants de la coalition macroniste. Pour les uns, la méthode d’une réforme par le biais du PLFSS est jugée « d’une brutalité sans nom » ; pour les autres, le moment est inopportun et peut « bien attendre trois mois ».
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Source: Le Monde