A peine investi, le nouveau locataire du Palais de l’Elysée multiplie les évènements diplomatiques.
Le débat sur sa visite diversement appréciée à Gao commençait à s’estomper jusqu’à ce qu’il reçoive, il y a trois jours, Vladimir Poutine, homme fort jusqu’au-delà de chez lui. Si, pendant la campagne le nouveau Président français a été accablé sur la question d’âge, certains Maliens ont voulu poursuivre le débat lorsqu’ils se sont scandalisés qu’IBK se soit rendu dans la cité des Askia à la rencontre du Président Macron. En face du patron de Koulouba, personne pour dire « Papa IBK » car la realpolitik n’offre que peu de place à l’émotion. Pas simplement parce qu’en occident la séniorité inspire beaucoup moins de révérence qu’en Afrique mais la réalité est que les rapports entre états ne sont pas tenus par l’âge. Parti pour l’Allemagne dès le lendemain de son investiture, c’est 5 jours après qu’il a foulé le sol malien. En Allemagne, Emmanuel Macron a été reçu par la Chancelière Angela Merkel, parce que c’est à elle qu’il a rendu visite.
Au Mali, le jeune Président n’avait d’yeux que pour ses soldats, pas pour la moindre autorité du pays hôte. Ce sont nos dirigeants, IBK en tête, qui ont fait des pieds et des mains pour rencontrer l’étranger du jour. A considérer même qu’il soit naturel de rendre visite aux siens, le minimum de considération commande d’adresser les salutations respectueuses à l’autorité supérieure de la localité d’accueil. Le trajet Paris-Gao à vol d’oiseau s’apparente fort à un voyage vers un territoire d’Outre-mer.
Rien n’y fait. Le chef de l’état malien, pour la première fois depuis très longtemps d’ailleurs, a fait le voyage de Gao. Du coup, les fiers souvenirs d’une certaine époque sont devenus subitement amers. Rien à voir avec nos leaders d’une certaine époque qui savaient forcer le respect. Modibo Keita avait congédié l’armée française en 1961 et Sékou Touré avait opposé un non catégorique au Général De Gaulle en 1958 pour donner l’indépendance à son pays la même année. Plus récent, Thomas Sankara, le capitaine révolutionnaire du Burkina Faso avait su incarner la dignité africaine. Lors du sommet France-Afrique tenu à Paris en octobre 1983, estimant qu’il avait été mal accueilli, il avait immédiatement décidé de repartir à Ouagadougou. Le Président français de l’époque, François Mitterrand avait dû déployer toute sa diplomatie pour le convaincre de rester. Et cela, après avoir tenté de corriger le protocole d’accueil.
Reçu lundi dernier à Versailles pour une exposition consacrée à Pierre le Grand, Poutine revenait sur les traces de ce Tsar de Russie, 300 ans après le passage de ce dernier sur les mêmes lieux. Pour autant, Macron n’a pas ménagé le patron du Kremlin malgré le rapport de force favorable à ce dernier. Les deux hommes n’ont pas fait dans la langue de bois sur les questions diverses et de divergence entre eux.
Au Mali, l’honneur n’a pas été sauf. IBK aurait pu faire économie de ce voyage quitte à organiser un voyage officiel à Paris. Qu’on ne s’y méprenne, les relations décomplexées entre la France et nos pays ne peuvent être obtenues qu’au prix du courage et de la volonté de nos dirigeants. Vivement un rendez-vous bilatéral à la hauteur du Mali et de la densité des relations entre les deux nations ! Mais ce n’est certainement pas la prochaine rencontre du G5 sahel car cette réunion aura été déjà la grande instruction laissée à IBK avant le retour de Macron à l’Hexagone.
Idrissa DICKO
Source : VIVANEWS