Alors que les « forces vives » réclamaient, à cor et à cri, la dissolution des partis politiques, le gouvernement de transition a choisi une voie plus sinueuse : abroger la charte des partis. Cette décision contraste avec le vœu de ceux demandant une purge des partis politiques. Ces partisans radicaux peuvent encore patienter d’ici à une éventuelle dissolution des formations politiques dont l’existence est constitutionnelle. En attendant, la mesure crée un vide juridique quant à l’organisation et le fonctionnement des partis.
Engagée dans les chantiers de la refondation pour poser le jalon d’un nouveau départ sous le slogan “Mali Kura”, la transition, depuis quelque temps, est confrontée à des oppositions.
La récente contestation est consécutive à l’abrogation de la Charte des partis par le gouvernement. En effet, les consultations organisées par le gouvernement sur la relecture de la charte, boycottées par une centaine de partis, préconisent une dissolution pure et simple des formations politiques.
Pourtant, le Conseil des ministres tenu le 30 avril a opté pour l’abrogation de la Charte des partis et du Statut du chef de file de l’opposition, laissant les formations politiques dans un no man’s land juridique. Une tentative maladroite de contourner la Constitution de juillet 2023 qui garantit le multipartisme.
Cette décision suscitant de vifs débats est loin de répondre aux attentes exprimées par les forces vives lors des concertations nationales, qui appelaient sans ambages à une rupture nette avec le passé politique.
Toutefois, l’exécutif, cachant mal son désir de museler la classe politique, est obligé de s’inscrire dans la légalité, mais pour combien de temps, quitte à décevoir ceux qui aspirent à un changement radical. En clair, les recommandations des forces vives ont été, pour l’instant, partiellement ignorées par le gouvernement de la transition. Donc, ceux qui espéraient une dissolution des partis devront patienter.
En attendant la nouvelle charte, dans sa décision d’abroger le texte régissant les partis, sans proposer de cadre alternatif, le gouvernement ouvre la boîte de Pandore.
Les partis, désormais sans statut clair, sont suspendus entre existence fantomatique et dissolution technique.
Dans les faits, les partis ne sont pas dissous, mais ils ne sont pas non plus encadrés. C’est le mal à la portée des autorités.
Puisqu’il n’y a pas d’alternative juridique pour le gouvernement heurté à sa propre Constitution. Promulguée en juillet 2023, elle n’offre pas de possibilité de s’en prendre au multipartisme, au même titre que le mandat du président de la République et les formes laïque et républicaine de notre pays.
En réalité, le gouvernement est en train de tomber dans le piège de son bricolage juridique depuis le début de la transition. Une chose est claire : il n’y a pas de refondation sans le respect des textes.
Et l’Etat ne se gère pas avec les recommandations de quelques individus, dits des forces vives, triés au volet, dont les souhaits sont imposés à la très grande majorité de la population.
PAR SIKOU BAH