Je sors du poste de police après y être rentré confiant comme on m’avait préalablement rassuré que le nouveau maître de ces lieux n’était autre qu’ Ahmed Diane Semega.
Or s’il a bel et bien été promu commissaire ces temps-ci, c’est de la police hautement fluviale de l’Omvs que s’occupe l’interminable Soninké et ce, à mille lieues du Commissariat que je viens de quitter. Entre les débris de cure-dents sur mon boubou, les postillons des verbalisateurs et l’haleine assommante de jeuneurs gênants. De si bon matin au poste, demanderiez-vous ? Oui et à cause d’un beau-frère. Vous le connaissez ! En public chez lui, il est assailli par une meute de griots transis devant « le petit fils de Mamadou Ndouldi », une sorte de Jajiri septentrional sans doute plus futé que l’infortuné ancêtre d’un ministre actuel de la République et fier guerrier massassi qui laissa deux poumons et un gros orgueil aux cornes d’un méchant taureau peul. Pour continuer avec le portrait-robot, il se dit toujours chez « monsieur » qu’il est un puits de savoir qui après avoir dompté le français s’était tourné vers le russe avec l’appétit et la science du Mandeka pour l’arachide. Quelque fois ministre et plusieurs fois défénestré. C’est lui que je suis allé saluer ce matin au poste. Le commissaire m’informe que le prévenu a porté à ses deux dernières filles des coups dont la violence relève de la tentative d’homicide volontaire. « Prémédité et c’est grave » conclut-il. « Et tout ça, parce que les filles refusent d’aller au « yogoro ». (Vous savez, ces pitreries que font les petits le mois de ramadan) ! Je m’approche du russophone pour m’enquérir des mobiles de son comportement. Sa réponse indignée : « elles se prennent pour qui tes nièces? Elles jouent aux aristos quand les deux filles du voisin, tous les soirs après les séances de yogoro, lui ramènent entre 1500 et 2000 francs » ! Il me dit qu’il a besoin de cette manne par ces temps de galère et que l’activité ne demande pas d’autre investissement qu’un peu de cendre, une voix qui porte et un corps qui vous porte.
Adam THIAM
La rédaction