Une vague d’arrestations, sans mandat, ni convocation, de la justice est signalée, depuis jeudi dernier, dans les rangs des hommes politiques dans notre pays, faisant craindre le retour au musellement des voix discordantes. Les cas illustratifs sont ceux d’El Bachir THIAM et d’Alassane ABBA enlevés par des hommes armés. Ces actes, survenus sans le moindre respect des procédures légales, portent les germes de la dérive autoritaire qui menace des fondements de l’État de droit dans notre pays.
La décision de suspension des activités des partis politiques coïncide, peut-être, avec l’enlèvement de plusieurs personnes qui appelaient au retour à l’ordre constitutionnel d’ici fin 2025 et plaidant contre le soupçon de la dissolution des partis politiques.
Des acteurs politiques, semblent-ils en train de payer la rançon de leur opposition et de leur prise de parole qui contraste avec le narratif du jour.
Ce jeudi 8 mai 2025, aux environs de 15 heures, devant une boutique loin de Kati, l’activiste et militant du parti Yelema, l’arrestation d’El Bachir THIAM par des hommes armés a fait le tour des réseaux sociaux. Sans mandat de la justice, cette arrestation est vite qualifiée d’enlèvement par ses proches politiques et alliés de lutte pour le retour rapide à l’ordre constitutionnel.
Alors que les chercheurs de M. THIAM sont en cours, une figure politique, non moins importante, le secrétaire général de la Convergence pour le développement du Mali (CODEM), Alassane ABBA, a été, à son tour, enlevé à son domicile, entre 19 et 20 heures en présence des membres de sa famille, rapporté par des témoins.
“Des hommes armés sont venus chez lui avant de l’obliger à les suivre sans aucune autre indication”, affirme un jeune du parti CODEM se trouvant chez lui au moment des faits.
Ces événements qui interviennent dans un contexte politique tendu, marqué par l’opposition croissante à une éventuelle dissolution des partis politiques, une proposition issue des récentes concertations des forces vives de la nation, suscitent l’indignation d’une partie de la société civile et des acteurs politiques.
Ces personnes arrêtées représentent la voix dissidente qui a décidé d’être le rempart contre la violation des textes de notre pays en s’opposant à une éventuelle dissolution des partis politiques.
Ainsi, ces pratiques, qui foulent aux pieds le droit positif de notre pays, ont été condamnées par Moussa MARA, candidat du parti Yelena et Housseini Amion GUINDO, président de la CODEM.
Ces deux acteurs politiques ont dénoncé ces agissements en relevant le danger qu’ils représentent pour la consolidation d’un État de droit et pour la préservation des libertés civiques fondamentales.
À travers son témoignage fraternel à Alassane ABBA qu’il appelle son jumeau, Housseini Amion GUINDO a exprimé son indignation face à la situation tout en lui assurant son soutien indéfectible.
“C’est avec une profonde indignation que j’ai appris ton enlèvement injuste par les autorités. Dans cette épreuve, je veux t’assurer de ma solidarité indéfectible et de mon soutien total. Ton engagement constant, ta droiture et ta lutte constante pour la justice et la dignité, connus et reconnus de tous, ne sont un crime que pour ceux qui craignent la vérité et la liberté”, a-t-il témoigné.
De plus, comme un appel à la résistance à son compagnon politique dont la détermination et l’engagement a permis à la CODEM de se hisser parmi les tops des formations politiques au Mali en termes d’élus, il affirme “Ils peuvent t’emprisonner, mais ils ne pourront jamais enfermer nos idées, ni étouffer notre combat. Tu seras libéré et nous continuerons notre combat pour un Mali sécurisé, réconcilié et développé”.
Pour lui, Alassane ABBA est un “éternel soldat des causes nobles”, dont la vie a été un combat permanent et une lutte régulière pour la justice, la vérité et la dignité des tiens en particulier et de tous les Maliens en général.
Bien qu’ils n’aient aucune nouvelle de l’homme jusqu’au moment où nous mettions sous presse, Housseini Amion GUINDO estime que l’arrestation de son «cher jumeau» est une attaque indirecte contre lui-même. «En s’attaquant à toi, c’est bien sûr moi qui suis visé à plus d’un titre,» affirme-t-il, soulignant la dimension politique de cet acte.
Puis, il exhorte ABBA à rester «fort et digne,» à l’image de sa conduite passée. Il promet de continuer à porter sa voix et à exiger sa libération immédiate et inconditionnelle,» assurant que «l’histoire retiendra ton courage, pas leurs basses manœuvres.»
Il termine son message par lancer un “ appel à tous les militants et sympathisants du Parti CODEM, et à tous ceux qui sont épris de justice et de paix sociale, à se mobiliser jusqu’à ta libération et à la libération de tous les prisonniers politiques et d’opinion et à l’avènement d’un Mali démocratique”.
À côté de ces cas, plusieurs sources ont annoncé des tentatives d’enlèvement contre le politologue Cheick Oumar DOUMBIA et le jeune politique Ibrahim TAMEGA.
Les arrestations extrajudiciaires sont un signal inquiétant d’une dérive qui menace les libertés fondamentales et encourage l’autoritarisme. Il est important que toutes les voix s’expriment dans le plus grand respect des lois du pays. Et par conséquent, aucune voix ne doit être contrainte au silence pour juste satisfaire le prince du jour. Face aux défis auxquels le pays est confronté, il est urgent que les autorités cessent ces pratiques et s’engagent dans un dialogue inclusif.
PAR SIKOU BAH