Il miroite l’eldorado sous les yeux des parents de plusieurs ados mordus de foot. Ensuite, il se fait la poche avec l’argent récolté après avoir froidement assassiné ses victimes
L’affaire dite du « bourreau des footballeurs » a défrayé la chronique de par sa nature. L’audience de l’accusé OD a vu la présence d’une foule nombreuse à la Cour d’appel de Bamako qui voulait être le témoin oculaire de ce procès. et savoir la sentence que la justice allait réserver à celui que d’aucuns ont qualifié de tueur en série.
OD est cet inculpé d’un genre particulier qui a comparu pour assassinat, tentative d’assassinat, vol à main armée et complicité. Des faits prévus et punis par les articles 199, 3, 252, 253, et 24 du code pénal et pouvant donner lieu à l’application de peines criminelles.
Courant 2016-2017, OD qui se dit employé de commerce, comme il ressort de ses documents, s’est vite transformé en « démarcheur » pour l’obtention de visas pour des candidats à l’immigration, dans son quartier Djicoroni-Para, en Commune IV du District de Bamako. Sa cible ? Des adolescents mordus de football qui ont une forte envie de s’expatrier
Être seul avec ses futures victimes- Pour ce faire, le jeune homme avait toute une stratégie quasi imparable. à commencer par une prise de contact direct avec les parents et/ou les proches de ses futures victimes.
Une fois que ce contact établit, il use de son éloquence pour les convaincre de lui donner une première tranche de la somme et le payable après lorsque les « candidats à l’immigration » arriveront à destination, plus précisément en Belgique et en Hollande. Curieusement, il parvenait à convaincre les parents des prétendants à l’expatriation. Une fois l’argent en poche, en criminel professionnel, il s’arrangeait à fixer un rendez-vous pour pouvoir être seul avec les jeunes gens dont les parents ont accepté de lui livrer leurs progénitures pour un hypothétique voyage en Europe.
Dans la foulée, le meurtrier invitait ses futures victimes individuellement. C’est soit, leur disait-il, pour aller leur prodiguer les derniers conseils avant le voyage, dans certains cas. Dans d’autres, il s’agissait, dit-il, pour les accompagner à l’aéroport pour le voyage.
OD saisissait cette opportunité pour attenter à la vie de ses victimes. Ces assassinats se produisaient dans des localités relativement éloignées de la ville de Bamako. Une fois sur place avec ses victimes qu’ils prenaient soin de droguer, il se débarrassant d’eux de la façon la plus cruelle, soit en les poignardant ou en leur fracassant la tête avec une grosse pierre. Puis, il s’arrangeait à dissimuler les corps des victimes dans les broussailles.
Ainsi, le « tueur en série » est parvenu à assassiner au moins cinq adolescents de différentes familles de Bamako. Et pratiquement, dans les mêmes circonstances. Suite à la multiplication des assassinats et vu l’opacité qui entourait le prétendu voyage dont il est l’initiateur, OD a été finalement démasqué et interpellé. Une information judiciaire a été ouverte au cours de laquelle il a sans ambages reconnu les faits cités plus haut.
Rôle d’intermédiaire- Serein, c’est un accusé de taille moyenne qui s’est présenté devant les jurés. Là, il a tenté de noyer le poisson dans l’eau, comme on le dit. Il a tenté d’opter pour une stratégie différente de l’aveu. Dans cette logique de fuite en avant, il a fait croire à la Cour que lui n’a joué que le rôle d’intermédiaire. L’inculpé a cherché à charger quelqu’un d’autre dont le nom n’apparaît pas dans le dossier, qu’il avait un patron qu’il appelait. S’il faut le croire, c’est ce dernier qui pouvait faire voyager les jeunes joueurs professionnels.
« Je ne faisais que les mettre en contact et les renseigner sur les dossiers à fournir ». à l’entendre parler, l’inculpé donne l’impression à la cour comme si c’est son fameux patron qui était en mesure d’expliquer ce qui est arrivé aux victimes. Sinon, lui même n’a rien avoir avec cette affaire.
OD précise : « j’ai envoyé plus de 70 personnes à l’étranger. Et personne n’est venu un jour se plaindre de quoi que ce soit ».
Avec cette dénégation systématique, les juges ont été obligés de le confronter à ses déclarations devant le juge d’instruction. « Je les ai drogués à l’aide de produits que j’ai mis dans leur boisson ». Pour corroborer ses dires, les juges lui ont rappelé une autre déclaration selon laquelle, il aurait proposé 1,7 million de francs CFA à une de ses victimes en lui promettant ce fameux voyage.
Outre cette preuve écrite dans le PV des OPJ, le même PV fait ressortir que l’accusé a conduit les policiers vers ce qui semble être les tombes de certaines de ses victimes. Face à ces différentes preuves, le jeune homme a tenté de faire croire qu’il a fait tout cela sous la torture des policiers.
Toujours pour se sortir d’affaire, l’accusé est resté constant avec cette idée se rapportant à son « patron » pour qui, il soutient n’avoir servi que d’intermédiaire pour lui trouver des clients à l’immigration. Cette fausse constance a obligé le président de la Cour de réagir en demandant à l’inculpé de dire la vérité et d’arrêter de charger son supposé patron qui est d’ailleurs absent. «…Il n’est pas là, c’est toi qui est là, ainsi que les parents des victimes aussi… », a-t-il martelé.
Tour à tour, des proches des victimes sont passés à la barre pour témoigner. Ils ont tous chargé l’inculpé avec des récits parfois glaçants, assortis de preuves irréfutables.
Revenu à la charge, l’inculpé a déclaré n’avoir pas de réponse aux différents témoignages de ceux qui se sont constitués partie civile. Ces derniers sont de nouveau repassés à la barre avec un seul mot. Celui relatif au fait que c’est l’inculpé, présent à la barre, qui est l’unique et le seul organisateur l’assassinat de leurs enfants.
Aucune circonstance atténuante- La partie civile a qualifié le jeune homme de « monstre ». « OD est un monstre et non un humain. Il a tué sans se soucier.… », a dit l’avocat qui a ajouté : « Ce jeune homme est sans remords. Il les a tué dans les mêmes circonstances et par le même mode opératoire ». C’est pourquoi, il a demandé à la Cour de ne lui accorder aucune circonstance atténuante.
Le ministère public, fort de sa qualité de défenseur des citoyens a qualifié l’inculpé de menteur, qui use de mensonge pour se défendre. « On ne peut pas tuer de sang froid et vouloir demander pardon », a-t-il martelé.
La défense de l’accusé a sans détour plaidé coupable. Pour elle, son client est la cause de la mort des cinq victimes certes. Après délibération, la Cour a condamné l’accusé à la perpétuité et au paiement de plusieurs dizaines de millions de francs CFA de dommages et intérêts aux familles de ses victimes.
Aminata DIARRA
Source : L’ESSOR