Une année après son retour en Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo a été gracié par son successeur, Alassane Dramane Ouattara. L’ex-président ivoirien a été condamné à 20 ans de prison pour « le braquage » de la Banque centrale des États de l’Afrique de l’ouest (Bceao) pendant la crise politique de 2010-2011. A cet effet, le président Ouattara a annoncé, le 7 août dernier dans son discours à l’occasion du 62ème anniversaire de l’indépendance de la Côte d’Ivoire, la grâce présidentielle de son prédécesseur. Cependant, le parti de Laurent Gbagbo a jugé insuffisante cette grâce et veut plutôt une amnistie.
Dans son discours à l’occasion du 62ème anniversaire de l’indépendance de la République de la Côte d’Ivoire, le 7 août dernier, le président Alassane Dramane Ouattara a déclaré ceci : « Dans le souci de renforcer la cohésion sociale, j’ai signé un décret accordant la grâce présidentielle à M. Laurent Gbagbo ». Par ailleurs, le chef de l’État ivoirien a annoncé qu’il procède au dégel de ses comptes au paiement de ses arriérés de rentes viagères. Outre cela, un autre décret accordant « la libération conditionnelle » à deux anciennes figures de l’appareil militaire et sécuritaire du régime de Laurent Gbagbo, condamnées pour leur rôle dans la crise de 2010-2011. Il s’agit du vice-amiral Vagba Faussignaux, ex-patron de la marine, et du commandant Jean-Noël Abéhi, ancien chef de l’escadron blindé de la gendarmerie du camp d’Agban, à Abidjan, rapporte l’Agence France Presse.
Mais cela ne semble pas rassurer le Parti des peuples africains-Côte d’Ivoire qui juge insuffisante la grâce accordée par le président Alassane Ouattara, à son prédécesseur et rival. Le Parti de l’ex-président Laurent Gbagbo demande plutôt une amnistie qu’une grâce.
Pour rappel, l’ex-président Laurent Gbagbo, âgé de 77 ans, est définitivement acquitté le 31 mars 2021 de « crimes de guerre » et « crimes contre l’humanité » par la Cour pénale internationale (CPI) de La Haye où il avait été transféré fin 2011. Quelques mois après son acquittement (17 juin 2021), l’ancien chef de l’État est rentré dans son pays avec le feu vert de son successeur, Alassane Dramane Ouattara. Quelques semaines après son retour, les deux hommes d’État du se sont rencontrés une fois dans une atmosphère « conviviale » et « fraternelle ». Une rencontre qui a suscité un grand espoir chez tous les Ivoiriens qui espèrent désormais aller vers une réconciliation nationale.
En effet, la situation politique en Côte d’Ivoire est née avec les hommes à la suite d’une crise post-électorale qui a entrainé des violences ayant fait 3000 morts. Laurent Gbagbo a été arrêté en avril 2011 à Abidjan avant de passer une dizaine d’années à la Cour pénale internationale à La Haye où il a été acquitté définitivement en mars 2021 faute des preuves. Il a été acquitté avec son ancien codétenu et ancien ministre de la Jeunesse, Charles Blé Goudé.
« Une amnistie plutôt qu’une grâce »
L’ex-président Laurent Gbagbo à travers son Parti qu’il a créé en octobre 2021, le Parti des peuples africains-Côte d’Ivoire, veut plutôt une amnistie. Par ailleurs, si la grâce permet au condamné de ne pas devoir purger sa peine, elle ne l’annule pas, contrairement à l’amnistie. La grâce barre toujours la route à Laurent Gbagbo d’être candidat en 2025 s’il le souhaite, au cas où il serait candidat à la prochaine élection présidentielle de 2025, une personne condamnée ne pouvant pas se présenter.
« Pour le Parti des peuples africains-Côte d’Ivoire (PPA-CI), créé l’an dernier par l’ex-président ivoirien qui risquait vingt ans de prison, « cette grâce ne correspond pas aux attentes légitimes de (ses) compatriotes ». Il se déclare en faveur d’une « loi d’amnistie » qui efface la peine, contrairement à la grâce présidentielle, selon une déclaration lue à la presse par Justin Koné Katinan, porte-parole du parti. Il a rappelé que cette loi d’amnistie, qui concerne également « les prisonniers civils et militaires » de la crise postélectorale sanglante de 2010-2011, avait été préconisée par le dialogue politique entrepris par le gouvernement ivoirien en vue de la réconciliation nationale », rapporte l’AFP.
Selon le Parti de l’ancien président ivoirien cité par l’AFP, cette condamnation « ne repose sur aucun fait réel ». Il souligne que la Bceao « n’a jamais porté plainte pour braquage et ne s’est pas constituée partie civile dans le procès qui a conduit à la condamnation » de M. Gbagbo. Le PPA-CI se félicite, en revanche, de l’annonce par le président Ouattara du dégel des comptes de M. Gbagbo et du paiement de ses arriérés de rentes viagères, ainsi que de la libération conditionnelle de deux anciennes figures de l’appareil militaire et sécuritaire de son régime, condamnées pour leur rôle dans la crise de 2010-2011.
Gbagbo et Bédié absents à Yamoussoukro
Annoncés à Yamoussoukro le 7 août dernier lors des célébrations de la fête de l’indépendance du pays aux côtés du président Alassane Dramane Ouattara, les deux anciens chefs d’État ivoirien, Laurent Gbagbo et Henri Konan Bédié n’ont pas effectué le déplacement. Selon des informations émanant de ses proches, le maintien en prison de militaires ayant servi un Laurent Gbagbo acquitté par la CPI, serait la raison qui expliquée son absence à la commémoration du 62ème anniversaire de l’indépendance de la Côte d’Ivoire dans la capitale politique ivoirienne, à laquelle lui et Henri Konan Bédié avaient été invités par le président Ouattara. « Il était difficile pour le président Gbagbo d’aller assister au défilé de l’armée nationale alors que des soldats qui ont servi sous ses ordres sont encore en prison », selon le porte-parole du PPA-CI, cite l’Agence France Presse.
En outre, Henri Konan Bédié était aussi absent à la cérémonie des commémorations de la fête de l’indépendance de la Côte d’Ivoire. Selon l’AFP, il a invoqué des « raisons personnelles ».
Notons que les trois hommes d’État ivoiriens, notamment Alassane Ouattara, Laurent Gbagbo et Henri Konan Bédié, se sont rencontrés le 14 juillet dernier.
Ibrahim Djitteye
Source: LE PAYS