Au lendemain de sa rencontre avec Alassane Ouattara, le président du PDCI annonce sa sortie du projet de parti unifié et met fin à son union avec le parti au pouvoir.
L’heure de la rupture est arrivée entre Alassane Ouattara et Henri Konan Bédié. Malgré leurs profonds différents, les tensions et les ressentiments, ces derniers mois, les deux hommes avaient eu à cœur de maintenir les apparences de leur union. C’en est désormais terminé. Au lendemain de leur rencontre glaciale et expéditive d’une petite quinzaine de minutes, mercredi 8 août, à la résidence du chef de l’État, à la Riviera, un quartier d’Abidjan, le chef du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), a acté leur divorce dans un communiqué.
« Précipitation »
Dans ce texte ferme et virulent, Henri Konan Bédié dénonce la constitution du parti unifié lors d’une Assemblée générale qui s’est tenue le 16 juillet, auquel il avait refusé de s’associer. Il regrette la forme, estimant que c’était théoriquement à lui, en tant que Président de la conférence des Présidents du Rassemblement des Houphouëtises pour la démocratie et la paix (RHDP), de convoquer ce rendez-vous, mais aussi le moment choisi, dénonçant une « précipitation ».
Henri Konan Bédié annonce ainsi « se retirer du processus de mise en place d’un parti unifié », et « prendre acte » du départ de ses alliés de leur groupement politique commun. Il dit aussi « se réserver le droit de promouvoir » une nouvelle plate-forme. Selon nos informations, l’ancien parti unique travaille en effet activement à la mise sur pied d’une alliance avec d’autres partis politiques, ainsi qu’avec des mouvements de la société civile.
« L’ALTERNANCE », SOIT UN SOUTIEN À SON CANDIDAT EN 2020, EST DÉSORMAIS NON NÉGOCIABLE
Ce projet de parti unifié n’a cessé de renforcer les tensions car, avec lui, ce sont les divergences autour de la prochaine présidentielle ivoirienne qui se sont trouvées exacerbées. Avant toute nouvelle union, Henri Konan Bédié exigeait des gages de la part de son allié. « L’alternance », soit un soutien à son candidat en 2020, est désormais non négociable.
Lui qui estime avoir été « spolié » de plusieurs centaines de milliers de voix en 2010, n’a pas oublié qu’il s’est alors résigné à soutenir Alassane Ouattara. Il ne cesse également de rappeler le sacrifice fait lorsqu’à Daoukro, en 2014, il appelé son parti à se ranger dès le premier tour derrière ADO, renonçant ainsi à présenter un candidat. Et exige aujourd’hui que son allié soit prêt aux mêmes gestes. En vain.
Recomposition
Le président ivoirien a répété à plusieurs reprises qu’il voulait « que tous ceux qui le souhaitent soient candidats », et que soit choisi « le meilleur d’entre nous ». Des positions en apparence irréconciliables, qui ont créé de fortes secousses au sein même du PDCI. Certains cadres de l’ancien parti unique ne cachent pas leur adhésion au projet de parti unique d’Alassane Ouattara.
Pour le Sphinx, c’en est ainsi fini de l’alliance créée en 2005, à Paris, face à Laurent Gbagbo. Ouattara et Bédié, les deux alliés qui depuis 2011, ont conquis et exercé le pouvoir, sont désormais rivaux. Ces deux hommes à l’histoire commune tumultueuse ont vu leur relation se dégrader cette dernière année. Et ces dernières semaines, ils ne se parlaient presque plus.
C’est donc face à face que le PDCI et le RHDP feront campagne dans les prochaines semaines en vue des élections municipales et régionales qui doivent se tenir le 13 octobre prochain. Un scrutin qui sera observé avec un intérêt particulier. Après la libération de Simone Gbagbo, mercredi, le paysage politique ivoirien est en pleine recomposition.
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