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Comment et pourquoi le juge de Niono a été enlevé ?

Jeudi 16 novembre 2017, vers 20 heures, plusieurs hommes viennent se poster dans la rue où se trouve la résidence du président du tribunal de Niono, Soungalo Koné.

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Ils sont six inconnus à bord d’une voiture 4X4 blanche et de quelques motos. Nul ne sait ce qu’ils cherchent mais ils observent, bien enturbannés, la porte du juge. Au bout d’un certain temps, le jeune homme qui fait le thé à la porte se lève, ouvre la porte et entre dans la concession. Il est violemment poussé dans le dos et maîtrisé par quatre des assaillants. Ses cris sont rapidement étouffés par un coup de crosse de fusil.

Sans désemparer, les ravisseurs foncent dans une chambre dont ils ressortent en traînant le magistrat. Comme ce dernier tente de crier à son tour, il est assommé de plusieurs coups de crosse puis transporté vers la voiture arrêtée au-dehors. Une sœur cadette du juge, qui tente de s’interposer, est fouettée sans ménagement. Les ravisseurs, après leur opération qui a duré à peine 5 minutes, s’éloignent par la route qui conduit au Macina.

Ce qui a facilité l’enlèvement

Le rapt a été facilité par la situation géographique de la résidence du juge. De fait, celui-ci logeait au quartier « Sahel », à quelque 4 km du centre-ville de Niono et loin de toute force de l’ordre. Plus prudents, le procureur de Niono réside à 400 m de la brigade de gendarmerie ; quant à la résidence du préfet, elle n’est séparée de la brigade que par une voie. Dans un contexte de sécurité précaire, pourquoi le juge a-t-il pris le risque de s’installer loin de tout secours potentiel ? On ne sait.

Des sources disent avoir vu, une semaine avant le rapt, un jeune homme de peau blanche fréquenter assidûment la rue où s’est déroulée l’enlèvement. « Personne ne connaissait cet homme ; pour ne pas se laisser aborder, il gardait en permanence un téléphone accroché à son oreille ; c’est sans doute lui qui guettait les faits et gestes du magistrat pour le compte des ravisseurs », nous confie un témoin.

Les causes de l’enlèvement

Selon une source bien informée, quelques semaines avant le rapt, les gendarmes de Niono étaient parvenus à neutraliser deux hommes (des Touaregs) chargés de tuer un marabout de Molodo, non loin de Niono, qui refusait d’adhérer à leur cause. Averti à temps, le marabout avait fui à Bamako et les deux hommes, comme par dépit, s’étaient emparés de deux chevaux qui se trouvaient dans sa concession. Ils seront appréhendés par une équipe de la gendarmerie de Niono à la sortie de la ville. Conduits à Ségou puis à la Bamako, ils seront miraculeusement libérés par la suite. Ont-ils voulu se venger sur la personne du juge de Niono ? Certains le pensent.

Une autre hypothèse veut que le juge Koné soit devenu la cible des terroristes après qu’il a placé sous mandat de dépôt plusieurs personnes suspectes de terrorisme. On se souvient qu’il y a un an, la prison de Niono avait été attaquée par les terroristes qui avaient fait évader de nombreux complices.

Si Niono intéresse à ce point les groupes terroristes, c’est en raison de son statut de ville-frontières : de Niono, on peut aisément se rendre au Burkina, au Niger et en Mauritanie. Des forains des localités voisines viennent y tenir la foire sans qu’on puisse les distinguer de gens mal intentionnés. « Niono est une passoire, nous confie une source militaire locale ; elle est très difficile à sécuriser. http://bamada.net Notre seule sécurité tient à ce qu’en hivernage, les multiples issues de la ville sont inondées et impraticables, ce qui oblige tout voyageur à emprunter l’unique artère goudronnée« .

Fuite massive des magistrats de Niono

Depuis l’enlèvement du président du tribunal de Niono, on assiste à un exode massif des magistrats de la ville. Tous ont quitté précipitamment la ville pour se refugier à Bamako ou ailleurs. Selon des sources, les terroristes détiennent une longue liste de fonctionnaires de justice à éliminer et le juge Koné n’était que la première de ces cibles. Le 19 novembre, des renseignements faisaient état de la présence sur cette liste du commandant de la gendarmerie de Nara (déjà enlevé), de celui de Niono et du préfet de Sokolo. La présence des terroristes et de leur otage a été signalée dans à Dounkel, à 60 km de Diabali.

En tout cas, l’affaire est prise au sérieux par le régisseur de la prison de Niono qui a lui aussi fait ses valises. Cet exode affaiblit davantage l’appareil judiciaire qui, au nord et au centre, manque cruellement de personnel pour raisons de sécurité. Ainsi, dans la région de Mopti, les Justice de Paix de Youwarou et de Téninkou ont été délocalisés à la Cour d’Appel de Mopti. Dans la région dee Gao, les tribunaux de Grande Instance de Bourem et d’Ansongo, ont été délocalisés à la Cour d’Appel de Gao. Dans la région de Tombouctou, les tribunaux de Gourma Rarhouss et de Goundam ont été autorisés à s’installer dans l’enceinte de la Cour d’Appel de Tombouctou. Les Justices de Paix de Ménaka, de Djenné et de Douentza demandent eux aussi à être délocalisés à Mopti.

Source : procès-verbal.com

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