Comme à la veille de chaque célébration de la journée internationale de la liberté de la presse le 3 mai de tous les ans, l’ONG Reporters Sans Frontières (RSF) a publié son classement annuel. Le Mali y gagne quatre places passant du 112e rang au 108e mondial. Toutefois, avec un score de 34,12, correspondant à la couleur orange, le pays se retrouve dans une situation » problématique » pour les journalistes.
Reporters sans frontières (RSF) a dévoilé, hier mardi 21 avril, son classement annuel sur la liberté de la presse dans le monde qui concerne 180 pays. Tout en gagnant quatre places, le Mali quitte la zone rouge correspondant à » une situation difficile » pour se retrouver dans celle orange correspondant à » une situation problématique. » Preuve que même si des progrès ont été faits, l’exercice du métier de journaliste au Mali demeure problématique.
Ainsi, la note concernant le Mali cite en exemple le cas du journaliste Birama Touré qui demeure toujours introuvable depuis janvier 2016. Pour l’ONG » soupçonné par plusieurs enquêtes journalistiques et par la famille d’avoir joué un rôle dans cette affaire, Karim Keita, le fils du président malien et actuel président de la commission défense de l’Assemblée nationale, poursuit systématiquement les journalistes et les médias qui l’associent à cette disparition. » Par ailleurs, il faut signaler que plus de six ans après que deux journalistes de RFI, Ghyslaine Dupont et Claude Verlon, aient été froidement abattus à Kidal, l’enquête n’est pas terminée et les circonstances entourant ce double assassinat n’ont toujours pas été élucidées.
La note indique aussi qu’en 2019 une enquête menée par les collègues des journalistes assassinés a contredit la version officielle de l’armée française sur son rôle précis dans le déroulé des événements. Enfin, il est signalé que depuis la crise de 2012, le nord et le centre du pays demeurent des zones dangereuses et peu accessibles, comme en attestent le meurtre d’un journaliste, en l’occurrence Joël Dicko, animateur à la Radio Tahanint FM à Tombouctou en 2015 ou la prise d’otage de notre confrère Issiaka Tamboura lors d’un séjour privé dans le centre du pays fin 2018.
Toujours selon la note rédigée par l’ONG sur la situation du pays » les médias maliens sont soumis à des pressions officielles sur les questions traitant de la sécurité. Les critiques de l’armée peuvent conduire à une arrestation et à une inculpation pour » propos démobilisateurs de troupes ».
Pour autant, même si la presse malienne jouit d’un grand pluralisme, elle souffre d’un manque cruel de moyens. En 2018, plusieurs journalistes ont été agressés, une partie de la rédaction de Mali Actu a été arrêtée et une radio en l’occurrence » Renouveau FM » a été illégalement fermée pendant l’élection présidentielle. S’y ajoute la condamnation à six mois de prison pour diffamation du directeur de publication du journal « Le Pays » Boubacar Yalcouye. Pour Reporters Sans Frontières, tous ces faits démontrent » l’urgence qu’il y a à adopter une nouvelle loi consacrant la dépénalisation des délits de presse. »
A noter que dans ce classement de RSF, sur 48 pays africains dont la situation a été passée au peigne fin, 21 apparaissent encore au rouge ou noir sur la carte. L’ONG note que la situation de celles et ceux qui tentent de produire des informations est difficile, voire critique. Elle précise que la décennie à venir sera décisive pour l’avenir du journalisme sur le continent. Comme l’an dernier, la Namibie et le CapVert affichent les meilleurs scores à l’échelle continentale. Ailleurs dans le monde, le classement est toujours dominé par les pays membres du Conseil nordique de l’Europe comme la Norvège, la Finlande et le Danemark. Quant au bas du classement, on retrouve des pays encore sous régime dictatorial comme l’Erythrée, le Turkmenistan et la Corée du Nord.
Massiré DIOP
Source : l’Indépendant