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Chronique | Péages routiers au Mali : la digitalisation à l’épreuve de la corruption ordinaire

Dans un Mali où l’aspiration à la bonne gouvernance est devenue une exigence populaire, l’annonce faite par le procureur du Pôle national de lutte contre la cybercriminalité, Dr Adama Coulibaly, a résonné comme un coup de tonnerre. Quinze agents et leurs complices ont été interpellés, accusés de détournements massifs des recettes issues des postes de péage. Des faits d’une gravité telle qu’ils jettent une ombre sur les efforts de digitalisation et de transparence enclenchés par l’État malien ces dernières années.

L’illusion de la modernité face aux failles humaines

Bamada.net-On nous avait promis que la digitalisation allait révolutionner la gestion des ressources publiques. Et pour cause : les résultats étaient spectaculaires. Le poste de péage de Kati, par exemple, est passé de 29 millions à 73 millions FCFA de recettes mensuelles, tandis que celui de Massala, sur la route de Koulikoro, a vu ses revenus quotidiens grimper de 1 à 5 millions FCFA. Des chiffres qui traduisaient, en apparence, une meilleure transparence, une rigueur accrue et une efficacité incontestable.

Mais derrière cette vitrine modernisée, certains fonctionnaires ont su exploiter les failles du système. Plutôt que de se plier aux nouvelles règles du jeu, ils ont développé des applications pirates, falsifié des tickets, manipulé les données des engins pour minorer les recettes dues… Bref, ils ont recyclé la corruption dans un emballage technologique.

Une cybercriminalité bien enracinée

Le procureur Coulibaly ne mâche pas ses mots. À la télévision nationale, le lundi 12 mai 2025, il a exposé une fraude soigneusement orchestrée : manipulation des systèmes d’information, atteinte à l’intégrité et à la confidentialité des bases de données, tout cela pour des gains personnels. Plus de 223 millions FCFA de pertes sèches pour l’État. Et ce n’est là que la partie visible de l’iceberg.

 

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Selon lui, l’affaire met en lumière un réseau bien organisé, actif dans au moins une dizaine de postes de péage à travers le pays. Des logiciels trafiqués ont été découverts, des ordinateurs saisis, des agents pris en flagrant délit. La cybercriminalité au Mali ne se limite donc plus aux hackers anonymes ou aux arnaques en ligne. Elle infiltre désormais les services publics, avec des complices bien installés dans la chaîne de gestion.

Une administration double face

Ce scandale révèle une vérité dérangeante : la modernisation seule ne suffit pas à changer les mentalités. À quoi sert un logiciel performant si ceux qui le manipulent trichent ? La question n’est pas que technique, elle est morale. C’est l’éthique du service public qui est en jeu. Et dans ce domaine, le Mali a encore du chemin à faire.

La digitalisation ne peut réussir que si elle est accompagnée d’un changement de culture administrative. Cela suppose des contrôles rigoureux, une traçabilité des opérations, mais surtout une volonté politique de sanctionner, au-delà des effets d’annonce. L’impunité est le plus sûr carburant de la corruption.

Un sursaut salutaire ?

Cependant, tout n’est pas sombre. L’intervention du Pôle anti-cybercriminalité prouve que les mécanismes de veille commencent à fonctionner. Les structures internes de contrôle, qui ont donné l’alerte, montrent qu’il existe encore des poches de résistance contre la gangrène. La justice, en menant cette opération avec détermination, envoie un signal fort à ceux qui continuent à détourner les ressources publiques.

Mais ce signal devra être suivi d’effets. Il ne s’agit pas seulement de punir, il faut aussi prévenir. Renforcer la formation des agents, améliorer la sécurité des systèmes informatiques, auditer régulièrement les flux de données, et surtout, créer une culture d’intégrité dans la fonction publique.

Et maintenant ?

Ce nouveau scandale rappelle que la corruption n’est pas un simple dysfonctionnement : c’est un poison qui ronge la légitimité de l’État, affaiblit la confiance des citoyens et bloque le développement du pays. À l’heure où le Mali se reconstruit, chaque franc détourné est un coup porté contre l’avenir collectif.

La lutte contre la cybercriminalité dans les péages routiers est donc bien plus qu’une affaire de police ou de justice. C’est un combat pour la sauvegarde des ressources publiques et la restauration de la dignité nationale.

 

 

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Moussa Keita

 

Source: Bamada.net

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