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Ce que je pense: Quel monde après le Covid-19? Faut-il mettre un pansement sur une fracture ouverte?

J’ai examiné pendant longtemps l’opportunité d’écrire ces quelques réflexions par ces temps de crise sanitaire, la pire que connaisse le monde depuis longtemps. Une crise qui met à nu les limites de l’organisation de nos sociétés et de leurs capacités tant matérielles que morales.

 

Les modes d’organisation de nos sociétés d’aujourd’hui correspondaient à un système d’articulation des rapports sociaux nés de la nouvelle ère industrielle où le capital et la rétribution du capital ont été au centre de l’activité économique et sociale. Les facteurs de production et le capital humain contribuent à créer plus de richesse, mais au profit du seul capital.

A ce jour, les avancées sociales qui ont été obtenues l’ont été du fait de l’intervention de deux phénomènes: les hautes luttes menées par les organisations syndicales pour arracher des droits sociaux et l’intervention de

l’Etat pour réguler et pour assurer la redistributions des richesses dans un souci d’inclusion sociale.

Le mode de production et de consommation dans les pays développés  prend peu en compte d’exigence de durabilité et de soutenabilité. Il se caractérise par des inégalités dans l’accès aux biens et services au sein d’une même société, mais aussi entre différentes régions du monde.

Dans les rapports Nord Sud, il se caractérise par l’exclusion de la grande majorité des pays de la chaîne des valeurs et des chaînes d’approvisionnement, cela, malgré les dérogations que leur offrent les mécanismes multilatéraux du commerce. D’où l’impossibilité pour l’Afrique de réaliser plus de 3% du commerce mondial.

L’aide au commerce n’a pas permis de combler le déficit en matière d’infrastructure (hard et soft). Le peu d’investissements directs étrangers dans nos pays n’ont pas permis un transfert de savoir faire, nous privant ainsi l’opportunité de tirer profit des facilités et dérogations qui nous accordées en matière de commerce. Soixante ans après son accession à l’indépendance, le Mali ne transforme localement que 5% de son coton. La diversification de l’économie peine toujours à se réaliser,  malgré quelques avancées timides.

L’aide publique au développement supposée aider à créer les conditions d’un développement soutenu ne contribue qu’à maintenir les pays les moins développés sous perfusion.  Les pays développés sont supposés consacrer à terme 0,7% de leur PIB à cette aide. A cette date le niveau de l’aide publique représente ente 0,1 et 0,3% de leurs PIB. Seuls quelques pays comme le Royaume Uni et les pays scandinaves ont atteint 1% de leur PIB consacré à l’APD.

Face à l’impréparation des pays en développement  et de l’Afrique en particulier pour contenir la pandémie et ses répercutions économiques et sociales, la crainte est fondée que le continent soit vite débordé. A l’appel de certains pays dont la France, le G20 a décidé d’un moratoire sur la dette pour le reste de l’année. Cette mesure permet de générer 20 milliards de dollars sur les paiements au titre du service de la dette. Ces sommes seraient affectées à la lutte contre le Covid-19. Etait-ce là la meilleure approche?

D’un autre côté la crise du covid-19 a mis à nu les insuffisances structurelles des pays développés et des pays émergents. Les effets pervers de la délocalisation pour plus de profit ont fini de mettre en évidence la grande dépendance des économies des pays développés, au point de provoquer des ruptures  de l’approvisionnement en principes actifs pour les tests du covid19 ou l’acquisition de masques et d’autres équipements de protection.

A la faveur de la crise les inégalités sociales qui s’étaient jusqu’ici manifestées à travers à l’accès à l’emploi, au logement, sont devenues une question de vie ou de mort face à la pandémie. En effet aux Etats Unis et au Royaume uni, il est établi que dans certains contés, la population de couleur représente moins de 30% de la population générale alors que le taux de mortalité de cette même population représente jusqu’à 70% du total général de décès au sein de la population.

Une autre insuffisance révélée par cette crise a été l’ampleur avec laquelle elle a frappé et l’inadéquation des capacités de réponse. Dans certains pays, la latitude était laissée au personnel médical de choisir qui devait être mis sous ventilateur qui devait mourir par défaut d’assistance. A cela s’ajoute le fait que le  niveau actuel des connaissances ne nous permet  pas de soigner la maladie, encore moins d’empêcher sa survenue. L’espoir d’un vaccin semble encore lointain. On en est réduit à imposer la distanciation sociale comme seul moyen sûr d’interrompre la chaîne de transmission.

Au plan économique l’incidence a été encore plus marquée et plus brutale. L’offre et la demande sont à l’arrêt à l’exception des biens et services essentiels. La perte de croissance économique pourrait atteindre les -6% dans de nombreux  pays. Aux Etats Unis 26 millions de la population active sont allés au chômage en l’espace 4 semaines  Les interventions étatiques du groupe du G20 pour maintenir les économies à flot se chiffrent à plus de 7 mille milliards de dollars américains. et ce n’est qu’un début. N’ayant jamais été confrontés à un crise d’une telle ampleur plusieurs pays font dans l’interventionnisme de l’Etat pour parer au plus urgent. Cela ne semble pas offusquer les néolibéraux, car ils sont les principaux bénéficiaires de cette manne.

Enfin, le PAM prédit une famine de proportion biblique dans les pays en développement, en particulier ceux du Sahel. Cela résulterait du fait que ces pays seraient tellement affectés par la pandémie que les terres resteront en friche. Cela résulterait également du fait que certains pays exportateurs de céréales feraient de la rétention desdites céréales afin d’éviter des ruptures pour leurs propres populations. Sinon, que je sache il n’y a pas de déficit de production alimentaire dans le monde au jour d’aujourd’hui.

La seule embellie dans ce tableau sombre  a été d’innover dans les modalités du travail. Le télétravail a permis de ramener les familles à leur vocation première, à savoir être un ensemble plus uni et plus solidaire.

La fermeture des écoles a également permis d’expérimenter ou de donner plus d’ampleur à l’enseignement virtuel, quoi que à ce niveau il y a une fracture nette entre pays développés et émergents d’un coté et les autres pays en développement de l’autre côté

L’arrêt de l’activité économique et de la mobilité de l’homme a eu une incidence positive  sur la régénération de l’environnement et de la nature. La pollution a grandement diminué, la nature a repris ses droits.

Au regard de ce constat d’insuffisances structurelles, doit-on simplement élaborer des stratégies de sortie du confinement sans s’attaquer aux causes de ces insuffisances? Doit-on relancer l’activité économique en maintenant le statu quo comme si de rien n’était? Comme le dit un adage, les mêmes causes produisent les mêmes effets. Cela veut dire que si l’on maintient les mêmes que celles qui ont prévalu avant la crise, nous ne seront pas en mesure de répondre efficacement à une autre crise majeure

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