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Bougouba : GRANDE OPÉRATION DE DÉGUERPISSEMENT

Plusieurs maisons à Bougouba (zone industrielle) en Commune II du District de Bamako ont été, mardi dernier, ciblées par une opération de démolition. Une mission de la mairie de la Commune II qui a visité hier les lieux, y a recensé 45 familles qui sont désormais à la rue. Toutefois, on parle de centaines de familles qui seraient sans domicile.

L’espace incriminé n’est aujourd’hui plus qu’un champ de ruines. Les propriétaires de ces maisons, au lendemain d’une journée de démolition sur fond d’affrontements avec les forces de l’ordre, essaient encore de sauver ce qu’ils peuvent : feuilles de tôles, briques, fauteuils… Les noircissures dans la rue et sur le goudron, dues aux brûlures de pneu et aux gaz lacrymogènes, témoignent de la violence des affrontements qui ont eu lieu le jour de la démolition. Devant les décombres de sa maison, une victime nous raconte : «Lorsque nous dormions, des hommes en uniforme ont encerclé nos maisons. Puis, un premier bulldozer a foncé en direction de nous avant de s’enfoncer dans la boue», explique-t-il. Mais pour un autre chef de famille, le machiniste aurait fait exprès de s’enfoncer pour éviter la démolition des maisons. «Avant de venir, il ne savait pas qu’il venait en mission de démolition», estime-t-il.
Sur place, les propriétaires des maisons soutiennent n’avoir reçu aucun avertissement. A la tête d’une demi-douzaine d’agents de la mairie de la Commune II, Bakary Traroré a fait l’inventaire des familles touchées par cette opération de déguerpissement. Chef d’antenne de l’urbanisme de ladite municipalité, il a été dépêché sur les lieux par le maire. «Hier, quand nous avons eu l’information, nous sommes venus pour constater», explique-t-il, avant d’ajouter : «nous avons pris langue avec l’huissier de justice. Il nous a montré une grosse de justice relative au déguerpissement et à la démolition des maisons».
Sur le site, c’est la confusion et la résignation. Que fera le maire avec la liste des déguerpis ? Ni Baky Traoré, ni les riverains ne connaissent la réponse. Mais une question plus importante demeure. Au profit de qui cette opération a-t-elle eu lieu ? Un nom revient sur les lèvres des riverains : c’est celui d’un industriel détenant une usine à côté. Mais en attendant que les choses se précisent, les gens sauvent ce qu’ils peuvent comme cet agent des eaux et forêts. Au volant d’un pick-up, il emporte des sacs remplis d’objets divers.
Saignant d’une main pour avoir tenté d’enrouler des feuilles de tôles de sa maison détruite, Baba Diarra court après le pick-up de la mairie qui s’était déjà éloigné. Il n’a pas été enregistré parmi les déguerpis parce qu’il tentait de sauver de sa maison ce qui pouvait l’être.
A 3 ans de la retraite, marié et père de plusieurs enfants, cet employé de la mairie du district entrevoit un avenir «difficile». «Je suis commis à la cellule technique d’appui aux communes du District. J’ai mis 5 ans pour construire une maison pour ma famille. J’ai travaillé dur pour acheter et construire ce terrain, maintenant je dois reprendre tout à zéro», dit-il.
Au milieu des décombres de sa maison, et avec une sueur dégoulinant du front jusque dans les narines, Baba Diarra ne pouvait tenir sa colère. Lui qui travaille dans une mairie n’a pas pourtant échappé à ce triste sort.

Khalifa DIAKITÉ

Essor

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