Dans notre pays, l’exercice du droit à la grève est consacré par la loi 87-47/AN RM de juillet 1987. En user légalement et légitimement est bien admis, mais en abuser, surtout dans le contexte actuel du pays, peut prêter à interprétation comme dans le cas du Syndicat national des banques, assurances, micro finances, établissements financiers et commerces du Mali (Synabef), qui après une grève de 72 heures la semaine dernière, a encore remis ça. Les syndicalistes de ces établissements enchainent donc avec un nouveau débrayage pour la même durée.
La question est actuellement sur toutes les lèvres. On peut légitimement s’interroger sur les motivations apparentes de cet arrêt de travail. Si on peut être d’accord sur le bien-fondé des revendications syndicales pour l’amélioration des conditions de travail, on l’est moins sur les doléances qui portent sur des situations personnelles kafkaïennes qui n’honorent même pas celles et ceux que les syndicats défendent dans ces situations. Un syndicat ne doit pas pinailler sur des détails (malheureusement le plus souvent la bave aux lèvres).
Face à cette situation, certains compatriotes, naturellement des clients de ces établissements qui observent une cessation de travail, expriment leur amertume à qui veut l’entendre. Ils disent avoir le cœur soulevé par ce mouvement qui donne, à tort ou à raison, l’impression de vouloir le beurre et l’argent du beurre, voire la crémière en même temps.
On a tellement ressassé dans ce pays cette formule consacrée : «la grève est un droit». Ce bouillon, on en veut plus puisqu’il nous a été tellement servi, qu’on en vient à avoir le dégout de cette doxa syndicale qui révolte la conscience humaine (sans désobliger les syndicats qui défendent des causes justes et dans le discernement).
Simplement que ces grévistes de service sachent, une bonne fois pour toutes, que «la vérité c’est comme de l’eau fraiche qui fait mal seulement aux dents malades». Une formule imagée du célèbre avocat sénégalais, Me Khoureychi Ba.
à notre avis, il est temps que les syndicalistes des banques, assurances et autres établissements financiers repensent leur méthode. Autant, il est normal de défendre ses droits, autant il faut tenir compte de ceux des autres.
Doit-on accepter que sur un claquement de doigt, pardon sur un mot d’ordre, d’un syndicat, qui se trouve dans l’altération du droit à la grève, des valeurs syndicales et du bon sens, qu’on puisse faire «agonir» les «pauvres travailleurs» dont les salaires sont domiciliés dans les banques et autres micro finances concernées. Tout comme les opérateurs économiques et autres particuliers qui déposent de leur argent dans ces lieux.
Curieusement les grévistes ne semblent pas se préoccuper de l’état d’âme de leurs clients, sans qui, ils n’auraient pas existé. Cette situation a du mal à passer auprès de la clientèle (en tout cas pour une bonne partie). Que les syndicalistes n’en viennent pas à se confondre en excuses après. Le mal a déjà été fait.
Bréhima DOUMBIA
Source : L’ESSOR