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Au Mali, une année scolaire chamboulée

Grève des enseignants, pandémie de Covid-19, coup d’Etat du 18 août, menaces terroristes… Une année bâclée pour les élèves.

L’alarme retentit enfin dans la cour du lycée Massa-Makan-Diabaté de Bamako. La première épreuve du baccalauréat 2020 vient de se terminer après une année scolaire plus que compliquée. Les élèves sortent au compte-gouttes des classes d’examen. Parmi eux, Alpha Kébé, qui semble assommé par les quatre heures d’économie qui viennent de s’écouler.

« L’année a été difficile, amorce-t-il. On a fait des exercices en pensant que le bac n’aurait pas lieu. » Entre les grèves à répétition des enseignants, la fermeture des établissements pendant quatre mois à cause de la pandémie de Covid-19 et le coup d’Etat, le spectre d’une année blanche a longtemps plané au-dessus de l’école publique malienne.

Le début du calvaire a commencé en décembre, lorsque les principaux syndicats d’enseignants ont déclaré une grève qui s’est étendue des mois durant. Au centre du mécontentement, une augmentation dont les enseignants devaient bénéficier, mais qu’ils n’ont jamais perçue.

De discussions en négociations avec l’ancien gouvernement de Boubou Cissé, renversé le 18 août par les militaires du Comité national pour le salut du peuple (CNSP), les deux camps campaient sur leur position. « Les caisses de l’Etat sont vides », avançait le gouvernement. « C’est un mensonge », rétorquaient les enseignants.

« On ne sait pas quand les grèves finissent »

En tout, les professionnels de l’enseignement ont été mobilisés plus de trois mois entre décembre 2019 et avril 2020. « Nous avons également décidé de fermer les académies au départ du président Ibrahim Boubacar Keïta », ajouté Amadou Coulibaly, secrétaire général du Syndicat de l’enseignement de base. Ce n’est qu’à la mi-septembre, après quatre rencontres, que militaires au pouvoir et professeurs ont trouvé un terrain d’entente. « On m’a dit qu’ils payeraient les retards en novembre, mais c’est impossible », avance un ancien ministre de l’éducation.

« Je serai tranquille lorsque tout sera réglé », renchérit Chérif Haïdara, 15 ans, président du Parlement des enfants, un organe gouvernemental donnant la parole à la jeunesse. « Les grèves, nous savons lorsqu’elles commencent, pas quand elles finissent. Ce n’était pas la première année que l’on voyait ce genre de situation », souligne-t-il, effrayé que cela se reproduise l’année prochaine, alors que lui-même préparera le bac.

L’examen allait se tenir alors que les établissements scolaires ont fermé leurs portes entre fin mars et début juin. « J’ai fait des travaux ménagers, j’ai aidé ma mère en parallèle de m’exercer sur les cours et de faire mes propres recherches », explique Fanta Doumbia, 17 ans. Elève au lycée privé du Sacré-Cœur, elle s’estime chanceuse : élève dans le privé, la jeune fille n’a pas eu à subir les contestations des professeurs du public.

Près de 300 000 enfants non scolarisés

Pour pallier le manque de cours, les lycéens ont dû s’organiser de leurs côtés, établir une routine. Alpha Kébé, qui se dit prêt à affronter les différents examens, raconte qu’il invitait des amis chez lui pour les révisions. « Mais les agendas ne correspondaient pas tout le temps. Etant donné que je travaille de 7 heures à 21 heures, je ne pouvais étudier que le soir ou tôt le matin », se souvient-il.

Un « programme censé être exécuté sur neuf mois ne peut être acquis en quatre », gronde Chérif Haïdara. « Il n’y a certes pas eu d’année blanche, mais l’année est définitivement bâclée », ajoute son comparse de l’Association des élèves et étudiants du Mali (AEEM), Moussa Niangaly. « D’autant que les écoles ont rouvert sur la période habituelle des vacances, lors de l’hivernage, quand les élèves aident les parents au champ dans certaines zones du pays plutôt que d’étudier », précise-t-il.

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Bien que parfois éloignés de Bamako, les élèves du reste du pays n’ont pas été épargnés par la grève nationale et les mesures prises pour endiguer la pandémie. Dans le nord et le centre du pays, tourmentés par l’influence des groupes djihadistes et les violences intercommunautaires, 1 200 écoles étaient fermées en mars et « près de 300 000 enfants sont aujourd’hui hors du système éducatif », s’inquiète Chérif Haïdara.

Source: lemonde

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