La solidarité au bénéfice des déplacés internes est à la limite un leurre. Les insuffisances sont patentes. Le ministre Imam, Oumarou Diarra, doit revoir sa stratégie, qui est restée sans effet depuis son arrivée à la tête du département. Il faut vite percer l’abcès.
La solidarité et l’action humanitaire sont des valeurs cardinales sur lesquelles repose le fonctionnement normal de la société malienne. S’il existe plusieurs types d’assistance, celle qui attire le plus l’attention des Maliens, c’est le cas des déplacés, à cause de l’insécurité qui assaille une bonne partie du pays.
La politique nationale d’assistance à ces déplacés est loin d’être la réponse appropriée face à une telle situation. Mauvaise volonté des acteurs de la chaîne ? En tout cas, plusieurs facteurs se frottent dans le système.
Le gouvernement du Mali a adopté la stratégie qui consiste à organiser en grande pompe des cérémonies de remise de dons alimentaires et autres aux déplacés dans diverses localités. L’État central, une fois que ce folklore est accompli, laisse place aux gouverneurs de région pour suivre le reste du processus. Eux aussi délèguent le pouvoir aux élus régionaux et communaux d’acheminer les vivres. C’est là où le scandale se produit. Ceux-ci instaurent un système de clans. Les vivres sont distribués par affinité (liens familiaux) ou pour des retombées politiques (des groupes d’individus sont ciblés et appuyés par cette aide de l’État comme un geste politique). Ils espèrent au moment des élections engranger des voix de ces hommes et femmes à qui ils donnent régulièrement ces appuis de l’État. Dans la plupart des cas, les vrais bénéficiaires ne gagnent absolument rien. Ce système machiavélique existe depuis des lustres au Mali.
En marge de ce constat déplorable, il y a le cas des ONG qui interviennent au Mali. Aucun processus rational n’est préétabli. Elles font comme bon leur semble parfois. Pas de répertoire bien ficelé afin que les appuis arrivent aux bons destinataires. Généralement, les nationaux qui sont en contact avec ces ONG jouent sur leurs relations dans les localités bénéficiaires des dons. Ce qui les amène à privilégier les liens de parenté ou d’amitié. Et au bout du compte, les résultats sur le terrain sont aux antipodes des informations relayées par les médias et d’autres canaux.
Aux environs de Bamako, l’assistance laisse à désirer aussi. Plusieurs sites sont dans un besoin criard. Sont-ils même répertoriés ? Pas sûr !
Selon des confidences qui nous ont été faites par des acteurs bénévoles dans la chaîne de la solidarité, le département de la Solidarité et de l’Action humanitaire ne connaît même pas le nombre de sites de déplacés internes. Les informations d’un confrère qui milite dans une association de veille citoyenne viennent confirmer cette assertion. Il a été témoin d’un fait sur un site non loin de Bamako, où les déplacés vivent dans des conditions inhumaines. Ils n’ont jamais bénéficié l’accompagnement de l’État malien.
Le Mali va-t-il rester dans cet éternel désordre ?
Il est temps que l’Imam Oumarou Diarra, non moins ministre en charge de l’Action humanitaire, se réveille et applique les conseils qui lui sont parfois prodigués par des spécialistes de la question. Sa seule mission, c’est l’assistance aux nécessiteux et il ne pourra la réussir sans un véritable travail sur le terrain. Il faut qu’il veille au grain: recenser tous les sites et se rassurer de l’arrivée à bonne destination de tous les gestes faits par l’État et les ONG. Sans cela, son passage à la tête du département ne sera qu’un pire cauchemar après la transition.
Boubacar Yalkoué
Source: LE PAYS