L’hospitalisation d’Abdelaziz Bouteflika, à 48 heures de la convocation du corps électoral pour la présidentielle en Algérie, suscite nombre de questions sur l’état de santé réel de cet homme, affaibli par la maladie mais que ses partisans soutiennent pour un quatrième mandat. Le président doit signer un décret “le 16 ou le 17 janvier”, tel qu’annoncé par l’agence nationale APS mardi, pour convoquer le corps électoral qui fixera donc la date du scrutin 90 jours plus tard. Si le décret paraît vendredi, cette date tombera donc le 17 avril.
Abdelaziz Bouteflika lui-même, au pouvoir depuis 14 ans, a jusqu’à 45 jours avant le scrutin pour se déclarer ou non candidat, selon la Constitution. En annonçant l’hospitalisation du président, âgé de 76 ans, mardi au lendemain de son transfert à Paris à l’hôpital militaire du Val-de-Grâce, la présidence a souligné qu’il s’agissait simplement d’un “contrôle de routine” et qu’il serait rentré pour ce vendredi. Dans ce communiqué cité par l’APS, il est aussi précisé que son état de santé s’améliore “sûrement” et de “façon progressive”.
Candidature
Abdelaziz Bouteflika a passé 80 jours en France en 2013, d’abord au Val-de-Grâce puis à l’hôpital des Invalides, centre militaire de rééducation pour les gros handicaps, pour sa rééducation. Et il avait déjà été hospitalisé à Paris en 2005 pour un ulcère hémorragique de l’estomac, auquel il avait dit avoir survécu “miraculeusement”. “Le président aurait signé avant son départ en France le décret par lequel est convoqué le corps électoral pour la présidentielle”, croit savoir El Khabar. Pour ce quotidien arabophone privé, cette nouvelle hospitalisation “relancera la polémique, non pas sur sa candidature à l’élection de 2014, que bon nombre d’observateurs excluent d’ores et déjà avec certitude, mais sur sa capacité physique à terminer son troisième mandat”.
“Le président est retourné à l’hôpital militaire au moment où la scène politique est entrée dans une phase d’attente”, affirme le quotidien arabophone populaire Echorouk, le plus fort tirage du pays. “Cache-t-on la vérité ?” s’interroge en une le quotidien privé francophone El Watan, qui note que “la maladie du président a plongé l’État dans une paralysie inédite”. Et Liberté de renchérir : “Si l’état de santé du président de la République ne suscite aucune inquiétude, une question se pose : pourquoi se rendre au Val-de-Grâce à 48 heures de la convocation du corps électoral ?”
Delanoë et Ayrault reçus
Depuis son retour de France le 16 juillet, Abdelaziz Bouteflika, qui détient le record de longévité au pouvoir en Algérie, a convoqué deux conseils des ministres – lui seul étant habilité à le faire -, les deux seuls à avoir été tenus en un an. Il n’a par ailleurs participé à aucune manifestation publique. Il a reçu des hôtes étrangers, surtout arabes, mais aussi deux Français : le maire de Paris Bertrand Delanoë fin novembre, puis en décembre le Premier ministre Jean-Marc Ayrault. Abdelaziz Bouteflika n’a plus jamais parlé en public depuis mai 2012 à Sétif (300 km à l’est d’Alger). “Notre génération a fait son temps”, avait-il affirmé, laissant entendre qu’il fallait passer la main aux jeunes.
Les quelques images diffusées par la télévision nationale depuis six mois ont subi des montages pour le montrer bougeant le bras ou remuant les lèvres. Seul dirigeant étranger à faire une déclaration sur son état de santé après leur rencontre de 45 minutes, Jean-Marc Ayrault avait jugé qu’il était “très courageux après sa maladie” et “très bien informé sur les dossiers”. Parallèlement, le Front de libération nationale (FLN), son parti, dominant à l’Assemblée nationale avec 208 élus sur 462, maintient qu’il reste son candidat pour un quatrième mandat, écartant toute velléité d’invoquer l’article 88 de la Constitution pour le démettre à cause de son état de santé.
Plus de quinze personnalités souhaitent briguer la magistrature suprême. L’ancien Premier ministre d’Abdelaziz Bouteflika, Ali Benflis, candidat malheureux en 2004, est celui qui suscite l’espoir au sein de l’opposition. Il devrait faire une annonce dimanche sur cette question. Un éditorialiste du Quotidien d’Oran s’amusait mercredi à définir le candidat parfait pour le système politique opaque de ce pays : l’homme de la “transition formelle” ou celui de “la transition remise à plus tard”.
source : afp