SAMBA SOUMARÉ, CHEF DU SERVICE AUDIT INTERNE DU BUREAU DU VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL

« L‘audit donne une assurance raisonnable sur la gestion de nos organisations »

L’Audit est l’examen d’une information fait par un Professionnel Compétent et Indépendant en vue d’exprimer une opinion par référence à des normes généralement acceptées, cette opinion devant accroître l’utilité de l’information.

Opérations d’évaluations, d’investigations, de vérifications ou de contrôles, l’audit est perçu comme un outil d’amélioration continue car il permet de faire le point sur l’existant afin d’en dégager les points faibles ou non-conformes suivant les référentiels d’audit. 

Samba SOUMARE, chef du Service D’Audit interne du Bureau du Vérificateur Général, nous en dit plus à travers l’entretien suivant.

Les Echos : Qu’est-ce que l’audit ?

Samba SOUMARE : L’audit vient étymologiquement du mot « audition », c’est-à-dire « le fait d’écouter ». Mais, sur le plan technique, c’est un examen professionnel visant à donner une opinion, par rapport à une norme, sur les états financiers, le contrôle, l’organisation ou une opération quelconque d’une entité.

Les missions d’audit peuvent être classées en fonction de leur nature : audit financier, audit environnemental, audit organisationnel, etc. ; ou du statut de l’Auditeur : audit interne, auditeur externe contractuel, audit légal, etc.

Les Echos : Quels sont les avantages de l’audit pour une entreprise ?

SS : Les avantages de l’audit dépendent de la nature de la mission d’audit.

S’agissant de l’audit interne, il ressort de sa définition donnée par l’Institut d’Audit Interne (IIA), en 1999, qu’il « donne à une organisation une assurance sur le degré de maîtrise de ses opérations, lui apporte des conseils pour les améliorer et contribue à créer de la valeur ajoutée. Il aide cette organisation à atteindre ses objectifs en évaluant, par une approche systématique et méthodique, ses processus de management des risques, de contrôle et de gouvernement d’entreprise, et en faisant des propositions pour renforcer leur efficacité ».

Quant à l’audit externe, il permet aux actionnaires d’avoir une idée, non pas plus précise, mais plus fiable de la situation de l’entreprise, et donne une meilleure crédibilité auprès des tiers.

Les Echos : L’audit est-il vraiment incontournable pour une entreprise ?

SS : Cela dépend de la nature et de la taille de l’entreprise. Je vais même au-delà des entreprises pour parler des organisations. Pour une organisation, cela dépend du niveau de risque. Si le risque est très élevé, nous avons en face une grande organisation avec des ressources financières importantes qui sont en jeu. Dans ce cas, alors, l’audit est incontournable.

Quand je prends le cas des entreprises, l’Acte Uniforme Révisé relatif au Droit des Sociétés Commerciales et du Groupement d’Intérêt Economique, en son article 694, fait obligation à toutes les sociétés anonymes (SA) de nommer un ou plusieurs commissaires aux comptes.

De même, l’article 35 de l’ordonnance N°2017-023/P-RM du 30 mars 2017 portant modification de la Loi N°90-110/AN-RM du 18 octobre 1990 portant Principes Fondamentaux de la Création, de l’Organisation et du Fonctionnement des Etablissements Publics à Caractère Administratif, prévoit : « Le compte de gestion de l’établissement public à caractère administratif est établi par I ’agent comptable et visé par l’ordonnateur qui le soumet, après certification par un commissaire aux comptes, au Conseil d’administration… »

Ce qui sous-entend que chaque établissement public doit avoir un commissaire aux comptes.

Une troisième illustration de l’importance de l’audit concerne les projets de développement dont bon nombre sont dotés d’un service d’audit interne qui veille à leur fonctionnement adéquat. L’objectif est évident : il s’agit de mieux gérer les risques. Alors, oui ! A la lumière d’autant d’exemples, je peux vous affirmer que les audits sont aujourd’hui incontournables pour la bonne gouvernance de nos organisations.

Les Echos : Malgré la présence des auditeurs dans les entités, nous constatons très souvent qu’il y a certaines entreprises ou organisations qui partent en faillite ? Est-ce qu’on peut dire là que l’auditeur n’a pas joué son rôle ?

SS :  Attention ! L‘audit donne une assurance raisonnable et non une assurance absolue sur la gestion de nos entités.

Les Echos : C’est-à-dire ?

SS :  L’auditeur est là pour remplir la mission qui est la sienne, certes. Mais, la responsabilité première de la gestion incombe à la direction générale. Par exemple, l’auditeur interne veille au bon fonctionnement de l’organisation en formulant des recommandations qui peuvent ne pas être suivies d’effet. En matière d’audit, on parle d’obligation de moyens et non d’obligation de résultats.

Une chose est sûre : si toutes les recommandations pertinentes formulées par les auditeurs sont mises en œuvre, et si chaque acteur de l’entité se comporte de façon exemplaire, il ne doit normalement pas y avoir de failles dans la gestion d’une entité.

J’insiste sur le “comportement exemplaire” des acteurs parce que l’audit a ses limites. Aucun contrôle ne peut résister à la collusion ou au non-respect des règles par les dirigeants d’une entité donnée.

Les Echos : Pouvez-vous donner une illustration de “comportement exemplaire” collectif ?

SS : Je peux donner une illustration de comportement collectif non-exemplaire. Lorsque dans une organisation, plusieurs personnes se mettent ensemble pour contourner les règles et les procédures, on parle de collusion. Et, alors, cette collusion et la violation des textes par les dirigeants de ladite organisation favorisent la fraude.

Les Echos : La différence entre contrôle, inspection, audit et vérification ?

SS : D’après le dictionnaire Le Larousse, le mot « Contrôle » se définit commet la vérification, l’inspection attentive de la régularité d’un acte, de la validité d’une pièce. Il désigne aussi un service chargé de vérifier, de contrôler.

Le verbe « Contrôler » signifie : soumettre à un contrôle, à une vérification.

Le mot Inspection correspond à l’action de surveiller, de contrôler.

Le verbe « inspecter » signifie : examiner avec soin pour contrôler, vérifier ;

Le vocable « vérification » signifie : action de vérifier, de s’assurer de l’exactitude de quelque chose en le confrontant avec ce qui peut servir de preuve.

Il ressort de ces définitions étymologiques que certains mots servent à définir d’autres.

A cet effet, il existe beaucoup plus de ressemblances que de différences entre lesdits mots.

Réponses recueillies

par Maffenin Diarra et Mohamed Meba TEMBELY

Source: Journal les Échos- Mali