L’affaire des Bérets rouges disparus semble prendre un tournant décisif. En effet, dans une correspondance adressée au directeur général de la gendarmerie nationale, les militaires et paramilitaires détenus dans ladite affaire informent les autorités politiques, militaires et judiciaires qu’ils vont quitter sans violence ni ruse les différents lieux de détention arbitraire, le vendredi 22 décembre prochain à 16 heures. Ce, à défaut de titre d’écrou en cours de validité.
Selon les inculpés, ils ont été placés sous mandat par le juge d’instruction et mis à la disposition du directeur général de la gendarmerie nationale entre le 24 octobre 2013 et le 7 mars 2014. Au regard de ces dates, le délai de détention prévention fixé à trois ans par l’article 135 du Code de procédure pénale (Cpp) est largement dépassé. À ce titre, ils estiment qu’à ce jour leur maintien en détention est illégal.
“À notre humble avis, la gendarmerie devrait se démarquer de cette ignominie et de cette mascarade dans cet imbroglio politico-juridique en évitant, entre autres, de nous déporter sur l’ensemble du territoire national à Manantali (hors du ressort de la Cour d’Appel de Bamako), Dioïla, Sélingué, Kadiolo, Markala, de faire signer par certains d’entre nous des ordonnances motivées de prolongation de détention provisoire contrairement à l’esprit de l’aliéna 2 de l’article 128 du Cpp, de perquisitionner nos cellules et de fouiller nos affaires pour saisir des objets (ordinateurs, Ipad, postes téléviseurs, postes radios, téléphones portables et autres) qui ne servent pas à la manifestation de la vérité”, précise la correspondance.
Au directeur général de la gendarmerie nationale, les inculpés rappellent que : “Dans votre fonction de directeur général de la gendarmerie nationale, de surcroit magistrat militaire, vous êtes sensé être un cadre averti, expérimenté, juste qui a une certaine assise intellectuelle pour analyser les tenants et les aboutissants d’un problème posé. N’acceptez plus de confisquer nos libertés en nous gardant comme des otages. Nous vous demandons de rester dans le cadre de la loi”.
Ils ont ainsi saisi l’occasion pour inviter le directeur général de la gendarmerie nationale à respecter le règlement de discipline générale dans l’armée (Rdga) qui stipule dans certaines de ses dispositions que “le militaire ne doit pas exécuter un ordre prescrivant d’accomplir un acte manifestement illégal, un acte portant notamment atteinte à la vie, à la liberté des personnes et au droit de propriété “. À la lecture de cette disposition, les détenus diront : ” Nous sommes illégalement privés de nos libertés et dépossédés de nos objets. En restant dans le cadre de la loi, elle vous couvre. Des autorités, des personnes fussent-elles, ministres, magistrats du parquet ou magistrats d’instruction, de la police politicienne vous abandonneront quant il s’agira de situer les responsabilités ou de se défendre en justice”.
Restitution des objets confisqués par les gendarmes lors des fouilles des cellules
À travers cette correspondance, les militaires et paramilitaires poursuivis dans l’affaire des Bérets rouges demandent au directeur général de la gendarmerie d’informer les autorités de tutelle de leur intention de quitter sans violence ni ruse les lieux de détention arbitraire le vendredi 22 décembre prochain à 16 heures. Ce, à défaut de titre d’écrou (mandat de dépôt, ordonnance, arrêté de condamnation) en cours de validité.
Aussi, ils exhortent le destinataire de leur correspondance de prendre des dispositions idoines pour les formalités d’élection de domicile, la restitution de leurs objets confisqués par les gendarmes lors des différentes fouilles de cellule ainsi que pour leur mise en liberté conformément aux dispositions des articles 129 et 135 du Cpp.
Les autorités politiques, militaires et judiciaires sont désormais interpellées pour prendre des dispositions nécessaires afin d’éviter un éventuel affrontement entre les détenus dans l’affaire des Bérets rouges et les éléments des forces de sécurité. Plus précisément, ils lui demandent d’appliquer les dispositions du Cpp accordant la liberté de droit aux détenus compte tenu du dépassement du délai de détention préventive fixé à trois ans car les pensionnaires du Camp I de la gendarmerie affichent une détermination à mettre en application les termes de cette correspondance adressée au directeur général de la gendarmerie nationale.
Simple menace ou réelle mise en garde avant l’action, les prochains jours seront certes déterminants dans l’issue de ce dossier ultra-sensible.
Attendons de voir !
Boubacar PAÏTAO
Source: Aujourd’hui