Dans la capitale malienne, Bamako, les citoyens se plaignent énormément des difficultés liées aux procédures visant l’obtention des documents d’état civil. Selon eux, les lieux pour s’enregistrer sont devenus des endroits pour insulter les citoyens, les humilier et leur faire perdre leur temps.
Malheureusement, dans tout le Mali, il n’existe aujourd’hui qu’un seul centre situé à Bamako habileté à délivrer la carte NINA. Sur place, on y trouve des centaines de femmes, d’hommes, d’enfants et de vieillards regroupés en attendant leur tour. Pour obtenir cette fameuse carte qui fait office de pièce d’identité à travers laquelle le gouvernement a lié tous les fichiers, les citoyens font très souvent l’objet d’injures et d’humiliations.
Souvent, lorsque certains citoyens venant des régions les plus reculées après plusieurs jours de route, se présentent devant le responsable du centre, les seules réponses qu’on trouve à leur donner c’est l’absence de formulaire ou de revenir dans quelques jours. De tels propos se multiplient au grand désarroi de la population qui dénonce une injustice caractérisée.
Certains citoyens affirment même avoir été contraints de soudoyer des agents pour obtenir la carte NINA dans les meilleurs délais, très souvent à l’insu di responsable du centre.
Selon Fodé Sissoko, ressortissant de la région de Ségou, le droit des citoyens de disposer de cette carte n’est pas souvent respecté. Une situation qui porte un énorme préjudice à certains malades devant subir des soins à l’étranger, des étudiants désireux de poursuivre leurs études ailleurs et même des citoyens ordinaires contraints de parcourir plusieurs kilomètres pour se rendre à Bamako afin de disposer de cette carte.
Par ailleurs, certains citoyens déplorent l’ignorance des agents des autres langues nationales. Chose que les autorités ne semblent pas se soucier puisque des interprètes n’ont pas été recrutés au niveau de ce centres pour aider les citoyens lambdas.
Pour clore son propos, Fodé Sissoko de renchérir : « si tu ne parles pas en Bambara ou en Français, tu n’es même pas considéré comme citoyen. Les agents ne font aucun effort pour te comprendre et vont parfois même jusqu’à t’humilier en te demandant d’aller apprendre la langue ou de faire recours à un interprète à tes frais ».
Cette situation concerne en particulier les citoyens issus des régions du nord et du centre du pays qui veulent ce document pour présenter une demande de passeport ou pour constituer un dossier. Ainsi, pour entrer en possession de ce document, il va falloir traverser toutes les autres régions pour converger vers Bamako.
Le responsable du seul centre existant semble ignorer la centaine de femmes, d’hommes, d’enfants et de vieillards privés de leur droit à accéder à ce document ou la constitution d’un dossier pour participer à l’un des concours nationaux et faire un cursus dans l’éducation. Certains ne cachent pas leur amertume et préfèrent exposer les anciennes cartes d’identité toujours valables.
Sur place, nous avons également rencontré Abderrahmane Maïga, étudiant à Tombouctou qui tente d’entrer en possession de sa carte NINA en vue de constituer un dossier pour la délivrance du passeport afin de postuler à une bourse pour l’Algérie. Il s’est demandé si les injures proférées contre les citoyens désireux d’obtenir leur carte NINA sont faites à l’insu ou à l’approbation du responsable de ce centre ? Il a poursuivi en indiquant : « Nous constatons que le problème ne concerne que les pauvres. Quant aux personnes financièrement aisées, elles viennent s’enregistrer facilement sans rendez pour obtenir leur document très souvent dans l’après-midi. Et nous, nous sommes parfois contraints de faire des vas et viens une dizaine fois rien que pour nous enregistrer. S’y ajoutent les injures proférées par les agents de manière quasi-régulière. Des étrangers ont même eu droit à ce document rien qu’en payant des pots-de-vin. Cette scène se produit tous les jours sous nos yeux ».
Il convient de noter que même dans les ambassades du Mali, il n’existe aucune possibilité pour les citoyens résidant à l’étranger de se doter de cette pièce.
Excepté l’ambassade du Mali en France où il a fallu que les ressortissants maliens organisent plusieurs manifestations dont l’une ayant conduit à l’occupation des locaux de la représentation diplomatique pour que le gouvernement prenne des mesures visant à faciliter leur obtention de ce document.
A cet égard, le journaliste d’origine malienne vivant au Maroc, El Ansari a déclaré que : « l’ambassade du Mali à Rabat n’est pas très proche des citoyens notamment les Arabes et les Touareg leur reprochant d’être proches des ex-rebelles de la CMA. Ainsi, pour bénéficier d’un service de l’ambassade, il te faut un intermédiaire, particulièrement des responsables de la CMA. Ce n’est que par cette voie que tu peux même avoir une audience auprès de l’ambassadeur ».
Le hic c’est que l’ambassade ne dispose d’aucun moyen pour inscrire les citoyens en vue de leur permettre d’obtenir la carte NINA ou le passeport biométrique.
Pour cela, il faut nécessairement se rendre jusqu’à Bamako et parfois il se peut même que ce déplacement soit inutile au regard des tracasseries multiples. Une situation qui nécessite un traitement diligent par les autorités au risque de renforcer le désarroi et l’amertume des populations.