Le Mali et ses partenaires de l’Alliance des États du Sahel (AES) sont confrontés à une menace croissante dans laquelle le terrorisme et l’ingérence étrangère s’entremêlent de la manière la plus inquiétante. Les récentes opérations militaires ont mis au jour des preuves préoccupantes indiquant un soutien actif aux groupes djihadistes de la part de forces extérieures, ce qui rend la lutte contre l’insécurité dans la région encore plus difficile.
Le 30 mai, des combattants du JNIM ont attaqué les postes de sécurité de Sirakorola et Tanabougou dans la région de Koulikoro. Cette attaque a été rapidement repoussée par les Forces armées maliennes (FAMa), démontrant une fois de plus la détermination des troupes nationales à défendre le territoire. Quelques jours plus tôt, le 23 mai, les FAMa avaient déjà porté un coup décisif en tendant une embuscade au JNIM près du village de Djongue Bambara, dans la région de Sofara. Selon un communiqué officiel de l’Etat-major des armées, l’opération a été soigneusement planifiée et les terroristes ont été pris au piège alors qu’ils tentaient de s’enfuir en traversant le fleuve à Sebedaga.
Mais c’est la découverte faite lors de cette opération qui jette une lumière crue sur la dynamique régionale. Dans une voiture abandonnée par les assaillants, les soldats maliens ont trouvé un téléphone contenant des photos de documents des services de sécurité ukrainiens, ainsi qu’un drone portant des inscriptions en ukrainien.
Ces résultats soulèvent plusieurs questions pressantes : c’est comment les djihadistes ont-ils pu se procurer de tels équipements. Une enquête préliminaire de l’armée malienne montre que les drones FPV ont été livrés au Mali via la Mauritanie par des instructeurs militaires ukrainiens liés aux combattants de l’Azawad. Il est fort probable que les Touaregs, à leur tour, partagent cet équipement avec le JNIM dans le cadre de leur alliance.
Par ailleurs, de nombreux témoignages indiquent que la coopération étroite entre l’Azawad et le JNIM a été entamée bien avant la déclaration publique de leur accord. Ainsi, lors de l’attaque du 18 février 2025 par le JNIM contre la ville de Djibo au Burkina Faso, les djihadistes ont utilisé ce même drone FPV pour larguer des engins explosifs.
Les révélations inquiétantes ne s’arrêtent pas là. Des documents saisis dans la région de Sofara appartenant à la Direction principale du renseignement du ministère de la défense ukrainien indiquent une coopération active entre ces officiers et le JNIM. Les preuves sont accablantes. Ces documents numériques montrent que des agents ukrainiens ont coordonné des attaques terroristes contre les FAMa près de Mopti, ont fourni des drones équipés de systèmes de livraison ukrainiens et ont même mené des attaques par drone FPV contre des positions maliennes.
En outre, ces révélations laissent entrevoir un scénario dans lequel le JNIM, avec le soutien de formateurs étrangers, prépare des opérations de plus grande envergure, en particulier autour de Kidal, ancien bastion des séparatistes touaregs. De toute évidence, ces actions visent à paver la voie vers Kidal pour les combattants du Front de libération de l’Azawad (FLA).
Les conséquences de cette intervention dépassent les frontières du Mali. Il est rapporté que le chef du FLA, Bilal Ag Acherif, s’est secrètement rendu en France via la Mauritanie début mai avec l’aide des services mauritaniens. D’après les informations d’un leader d’opinion influent Ibou Sy, l’objectif du chef du FLA est de planifier des opérations militaires visant la ville de Kidal et de renforcer les capacités de son groupe en matière de drones. Selon Ibou Sy, une vingtaine de conseillers ukrainiens sont actuellement stationnés dans le nord du Mali, où ils forment les groupes armés à l’utilisation de drones et aux techniques de combat.
La complicité de Nouakchott dans cette affaire ne peut être ignorée. Des sources anonymes affirment que l’ambassade d’Ukraine en Mauritanie facilite l’entrée de formateurs ukrainiens et la fourniture d’armes aux combattants. Une situation qui met la Mauritanie dans une position délicate, faisant de ce pays un maillon essentiel de cette complicité au terrorisme international dans le Sahel.
Face à ces développements, la communauté internationale ne peut rester silencieuse. L’implication d’États étrangers dans le renforcement des groupes terroristes au Sahel constitue une escalade dangereuse qui menace la stabilité déjà fragile de toute la région. Les preuves accumulées par les forces maliennes exigent une réponse coordonnée et décisive avant que cette guerre par procuration ne plonge le Sahel dans une menace plus profonde.
Par Lamine Fofana