Selon l’agence nigériane chargée de la lutte contre le trafic des êtres humains (Naptip), 20 000 Nigérianes se trouveraient dans le sud du Mali. Des trafiquants leur avaient fait miroiter des emplois bien rémunérés en Asie. Ils les ont en réalité amenées près des mines d’or artisanales où des proxénètes les obligent à se prostituer.
Elles rêvaient de gagner leur vie dans la restauration et l’hôtellerie en Malaisie, elles ont abouti dans de tout autres établissements au Mali. Exploitées par des proxénètes qu’on appelle des « Madames », leurs services sont proposés aux hommes qui espèrent faire fortune grâce à l’orpaillage.
« Elles ne sont pas libres de partir à leur guise, ce sont des captives, explique Julie Okah-Donli, la directrice de la Naptip, l’agence nigériane chargée de la lutte contre le trafic des êtres humains. Elles sont vulnérables. Des Madames, qui ont soudoyé les autorités locales, les surveillent. C’est pour cela que nous devons travailler avec la police pour les secourir. »
Une mission d’information s’est rendue dans le sud du Mali, notamment à Kangaba, en décembre. Ses membres nigérians font l’hypothèse qu’une centaine de prostituées se trouveraient sur chacun des quelque 200 sites d’orpaillage concernés. Ce qui reviendrait à parler de 20 000 femmes.
« Elles ont beaucoup de mal à parler »
L’Organisation internationale des migrations refuse de confirmer ce chiffre, même si Florence Kim, porte-parole de l’OIM, estime que le nombre de prostituées nigérianes au Mali est sûrement « très élevé ».
« Les données fiables sur le nombre exact de victimes de la traite sont très difficiles à obtenir, explique-t-elle. Il y a plusieurs raisons, notamment parce que les victimes ont très, très peur de témoigner. Et a fortiori, de dénoncer leur trafiquant. »
Environ 200 Nigérianes ont réussi à s’enfuir et à regagner leur pays d’origine grâce à l’OIM. Florence Kim a rencontré certaines d’entre elles. « Elles vivent entre elles, raconte-t-elle. Elles ont été trompées. On leur avait promis un travail (…) et puis une fois sur place on leur a dit qu’elles allaient travailler comme des prostituées. Certaines acceptaient, car elles savaient qu’elles étaient menacées et qu’elles savaient que leur famille à la maison était menacée de mort. Et puis d’autres refusaient et décidaient de s’enfuir. »
L’OIM propose des programmes pour aider à leur reconstruction et à leur réintégration. « On voit qu’elles portent en elles un sentiment de honte extrême, en plus de ça elles se sentent salies, elles ont beaucoup de mal à parler, à retrouver leur famille », rapporte la porte-parole de l’OIM.