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Justice : à Tombouctou, revaloriser le rôle du cadi

A Tombouctou, le cadi joue un rôle majeur dans le maintien de la cohésion sociale à travers la distribution d’une justice équitable inspirée des valeurs coutumières et islamiques.

 

La stabilité, l’hospitalité et l’ouverture au monde de Tombouctou étaient favorisées par une institution judiciaire islamique appelée le « cadi ». Cette institution constituait l’ultime recours. La régulation des contentieux et litiges sociaux implique une connaissance approfondie des us et coutumes des communautés composant la ville. C’est pourquoi, le cadi était choisi parmi les lettrés. Il est assisté d’un conseiller avec lequel il tranchait des affaires de justice faisant rarement objet d’appel. Ce qui explique que le cadi était d’une probité morale irréprochable et avait un sens de la justice.

Sous la colonisation, le cadi percevait même une rétribution de la part de l’administration coloniale. Pendant longtemps, il a joué le rôle d’interface entre les communautés et les colons soucieux de préserver la quiétude et la paix sociale. De même, il était une courroie efficace de distribution de la justice et garant des normes permettant le vivre ensemble.

Absence de corruption

Aujourd’hui, la population de Tombouctou est lassée par les déboires de la justice conventionnelle, qui a peu de crédit. Elle n’a plus foi en cette juridiction dont l’arbitrage est constamment contesté. En outre, les procédures judiciaires peuvent durer des années. Le recours au mécanisme juridique traditionnel vient ainsi compenser les tares de la justice moderne. Le cadi est sollicité pour des questions sociales sensibles telles que le divorce, l’héritage, entre autres. La crédibilité de l’institution se manifeste par l’absence de corruption.

« Ces derniers temps, nous sommes beaucoup sollicités par les Tombouctiens frustrés par la justice conventionnelle. Dans notre travail, nous insistons plus sur la conciliation des parties, surtout dans le cas du divorce. », explique Sidi Moulaye Haidara, substitut du cadi de Tombouctou. « Nos jugements ne sont pas monnayables. Nous entendons participer à la cohésion sociale et à la promotion de l’institution ».

Appuyer la justice conventionnelle

Dans le cadre de la refondation du Mali, les structures traditionnelles doivent être réactivées pour l’amélioration de la gouvernance locale. En plus de l’ancrage du cadi à Tombouctou, il constitue un relai significatif dans la distribution d’une justice équitable sur lequel pourra s’appuyer la justice conventionnelle.

L’institution a même été classée dans l’inventaire du patrimoine national du Mali. L’article 46 de l’Accord pour la paix et la réconciliation national, issu du processus d’Alger, recommande sa revalorisation dans l’administration de la justice.

Le cadi reçoit des formations sur les nouvelles techniques d’approche communautaire. La renaissance de la ville de Tombouctou est consubstantielle de la réactivation administrative et juridique du cadi.  « Les gens se tournent de plus en plus vers le cadi auquel ils accordent une certaine crédibilité. Avec la réforme de la décentralisation en œuvre, le statut du cadi devrait être officialisé par l’État en vue de permettre la distribution d’une justice fiable. L’institution compte recruter des conseillers dans tous les quartiers pour avoir un caractère inclusif », informe le chercheur Sane Chirfi Alpha.

Source : Benbere

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