La rapporteuse spéciale de l’ONU sur les exécutions extrajudiciaires Agnès Callamard a exprimé mi-janvier sa “vive préoccupation quant à l’absence de justice” dans l’enquête en France sur l’assassinat en 2013 au Mali de deux journalistes de RFI, selon une lettre rendue publique par l’ONU.
Dans cette lettre du 15 janvier, dévoilée par le média français en ligne Mediapart et Le Guardian, Mme Callamard s’adresse aux autorités françaises – avant de quitter son poste – pour “exprimer (sa) plus vive préoccupation quant à l’absence de justice rendue quelque sept ans après” l’enlèvement puis l’assassinat de Ghislaine Dupont et Claude Verlon.”Bien que l’identité des suspects soit connue depuis plusieurs années –et ce malgré l’imposition du secret-défense sur certains aspects importants de l’enquête–, aucun mandat d’arrêt international, en particulier à destination du Mali, n’a été émis”, dénonce celle qui a pris récemment la tête d’Amnesty International.Pour Mme Callamard, “des zones d’ombre troublantes demeurent”, qui selon elle “sont largement le résultat direct de l’absence de coopération de la part des autorités militaires françaises -dans le cadre de la protection du secret défense- et des autorités maliennes”.Elle s’étonne du fait que les autorités françaises comme maliennes “ne soient pas en mesure d’identifier formellement” le commanditaire présumé de l’enlèvement alors même qu’il aurait “participé à la remise en liberté de quatre otages, dont une Française”, Sophie Pétronin, “en échange de 200 détenus et une rançon de plusieurs millions d’euros”, début octobre.
Il s’agirait du Malien Sedane ag Hita, selon l’association “les Amis de Ghislaine Dupont et Claude Verlon”.Dans une réponse le 16 mars, la Mission permanente de la France auprès de l’ONU à Genève a indiqué que ces faits “faisaient toujours l’objet d’une information judiciaire menée par le pôle antiterrorisme du tribunal judiciaire de Paris”.”Des auditions ont régulièrement lieu et les justices malienne et française coopèrent afin que toute la lumière soit faite sur cette affaire”, insiste la mission française.Concernant un recours trop large au secret défense pointé du doigt par Mme Callamard, la mission assure que “les autorités françaises ont accompli toutes les diligences nécessaires pour procéder à la déclassification d’éléments couverts par le secret de la défense nationale”.Ghislaine Dupont, 57 ans, et Claude Verlon, 55 ans, avaient été enlevés lors d’un reportage pour Radio France Internationale (RFI) puis tués le 2 novembre 2013 près de Kidal, quelques mois après l’opération française Serval destinée à contrer des jihadistes menaçant de prendre Bamako.Le 30 octobre 2020, leurs proches s’étaient dits “toujours sidérés par le quasi-désert informationnel imposé (…) par les autorités politiques successives et par l’armée”.
Source: AFP