Youssouf DOUMBIA
Fidèle compagnon du président Modibo Kéïta, Seydou Badian Kouyaté entre au gouvernement dès le 17 septembre 1962 au poste de ministre de la Coordination économique et financière et du Plan. Puis, il devient ministre du Développement rural. Au coup d’Etat de 1968, il est arrêté et déporté à Kidal où il passera une dizaine d’années. A sa libération, il s’exile à Dakar au Sénégal. Il revient au pays à la faveur de la révolution de mars 1991 qui emporta le régime du général Moussa Traoré
Il naquît le 10 avril 1928 à Bamako, et pendant presque 60 ans, il s’est illustré dans l’avancée du Mali indépendant. Il nous a quittés, ce vendredi 28 décembre. Comme s’il ne voulait pas voir avec nous l’année 2019, celle de son 91ème anniversaire. Dernier survivant des médaillés d’or de l’Indépendance, Seydou Badian Kouyaté était très sollicité ces dernières années aussi bien par des politiques, des journalistes que par la société civile; cela ici au Mali et au delà, du fait de sa longue expérience.
Ce médecin, formé à Montpellier en France pendant la colonisation, s’est mué en gardien de la tradition, aux travers de sa plume avec un roman «Sous l’orage» qui met en scène le conflit entre les valeurs traditionnelles et la modernité. Le texte de ce roman, qui est encore d’actualité, est enseigné de nos jours dans l’école malienne et dans certains pays africains. Ces dernières années, Seydou Badian Kouyaté a régulièrement fait part de ses craintes relatives à la perte des valeurs de la société malienne et de ses inquiétudes concernant un système éducatif manquant d’exigences. Ce fidèle compagnon du premier président de la République du Mali, Modibo Kéïta, est resté convaincu jusqu’à sa mort, que notre pays ne se développera jamais en mettant en avant les valeurs culturelles, économiques et spirituelles venant d’ailleurs.
Ecrivain et homme politique, Seydou Badian Kouyaté a donc tiré sa révérence en ces derniers jours de 2018, précisément le samedi 29 décembre. Il restera dans l’imaginaire populaire, d’abord comme l’auteur de l’hymne national du Mali : «Le Mali».
Ce qu’il rectifie, lui-même en 2000 dans les colonnes de votre quotidien national quand il expliqua que c’est tout un collège qui a statué sur le contenu du texte. Lui Seydou Badian qui était officiellement mandaté pour cette mission par le président Modibo Kéïta, a mis la forme.
Dès le 17 septembre 1962, Seydou Badian Kouyaté entre au gouvernement, au poste de ministre de la Coordination économique et financière et du Plan. Puis, il devient ministre du Développement rural. Il prône le retour à la terre.
Les grandes villes comme Bamako se remplissent de saisonniers qui refusent de retourner pour aller cultiver, une fois la saison des pluies arrivée. Le ministre du Développement rural d’alors craignait la perte de main d’œuvre agricole au profit de la grande ville.
Au coup d’Etat de 1968, il est arrêté et déporté à Kidal où il passera une dizaine d’années, dans le grand Nord. A sa libération, il s’exile à Dakar au Sénégal. Il revient au pays à la faveur de la révolution de mars 1991 qui emporta le régime du parti unique de Moussa Traoré. Les militants de l’Union Soudanaise-RDA relancent leur parti. Seydou Badian Kouyaté reste un des ténors. Mais, il en est exclu en 1998 pour s’être opposé à une partie de la direction qui prônait la non reconnaissance de la réélection du président Alpha Oumar Konaré et des institutions.
Sur le plan littéraire, son premier roman «Sous l’orage», publié en 1957, a connu un grand succès. En 1965, il fait un tour dans les essais avec «Les dirigeants Africains face à leurs peuples», ce qui lui confère le «Grand prix littéraire d’Afrique Noire». L’homme politique retourne à la fiction avec d’autres romans comme : «Le Sang de masque» en 1976; et «Noces sacrées» en 1977. Trente ans plus tard, en 2007 il publie un quatrième roman intitulé «La Saison des pièges».
En 2009, Seydou Badian Kouyaté devient officiellement Seydou Badian Noumboïna, du nom d’un village dans le cercle de Macina en 4ème région. Son expérience, la pertinence de ses analyses et ses idées révolutionnaires font qu’il était encore très écouté de nombreux dirigeants africains.