Suite à l’attaque lâche menée par des obscurantistes contre les forces de défense de sécurité du Niger, un lourd bilan vient d’endeuiller ce pays frère du Mali.
C’est tout naturellement que le président français, Emmanuel Macron, s’est résolu à reporter à une date ultérieure “la convocation” pour le 16 décembre des 5 chefs d’Etat du G5-Sahel en France, plus précisément à Pau, pour, prétendait-il, clarifier le rôle des forces françaises au Sahel, suite aux protestations qui enflent de partout, au Mali, au Niger et au Burkina Faso sur la présence française devenue non seulement inutile aux yeux des populations, mais surtout suspecte.
A y voir de près, le deuil qui frappe le Niger n’est qu’un prétexte pour le président français dont le pays n’a jamais manifesté une telle compassion vraiment sincère, lorsque des fils du Sahel tombent sous les balles assassines des bandits de toutes sortes qui y sèment la terreur et la désolation. C’est donc un alibi tout trouvé pour annuler une encontre aux allures de “convocation” des chefs d’Etat du Tchad, du Niger, du Mali, du Burkina Faso et de la Mauritanie. Une rencontre qui ne présageait rien de bon pour la France, au vu de la pression populaire sur les chefs d’Etat que la dérive Macron a suscitée. C’est vrai que le ton et le procédé ont choqué plus d’un dans les pays respectifs du G5-Sahel et même au-delà car du Bénin, du Sénégal, de la Guinée – pour ne citer que ces pays-là- des voix se sont élevées pour dire non au comportement colonialiste du jeune Emmanuel Macron.
Le président français sait bien que les ressortissants des pays de la bande sahélo-saharienne, requinqués à bloc par le désir de remettre la France à sa place, attendaient impatiemment la date du 16 décembre pour savoir ce qui allait se dire et se faire devant ce “tribunal” de Pau. En effet, ce rendez-vous fixé au forceps était un tournant de l’histoire pour les anciennes colonies françaises de prouver leur émancipation réelle face à une France nostalgique à jamais d’un passé colonial révolu. Ça passe ou ça casse ! Tel est le sentiment le mieux partagé au sein de la population des pays du G5-Sahel.
La réalité est que le président français n’a pas besoin de faire déplacer les cinq chefs d’Etat du G5-Sahel pour clarifier la présence des forces françaises au Sahel. Il sait tout ce que pensent les populations des pays concernées, parce qu’informé jusque dans les détails par ses services de renseignement bien installés au cœur de ces Etats.
Mais la déclaration du président français le 4 décembre dernier a été positif d’une part, en ce sens qu’elle a sonné comme une mobilisation de toutes les forces vives derrière le chef de l’Etat, lequel a reçu 5 sur 5 les différents messages véhiculés ça et là pour traduire le sentiment profond des Maliens envers la France.
Et on ne peut qu’avoir du respect profond envers l’une de ces forces vives, notamment le Mouvement Maliens Tout Court, jadis connu pour son efficacité dans la discrétion, mais qui se voit obligé de monter au front pour rappeler à l’ordre, avec la manière, le premier des Français.
Effectivement, par une déclaration qui restera gravée dans les annales de l’histoire du Mali, Maliens Tout Court, sous la signature de son président, Ibrahim Diawara, “condamne avec fermeté le Ton et la Forme avec lesquels le président français, Emmanuel Macron, s’est exprimé”.
Non sans rappeler au chef de l’Etat français que si son pays ne fait pas profil bas en ce qui concerne le désordre noté au Sahel ces derniers temps, lui, en tant que président français, n’a pas à s’égosiller autant, pour prendre la posture du sapeur-pompier dépité. Le prétendu sapeur-pompier n’est-il pas le pyromane d’hier !
Comme le rappelle si bien le Mouvement Maliens Tout Court dans sa déclaration ndu 5 décembre 2019, Emmanuel Macron doit se rappeler que, d’abord, “La déstabilisation du Sahel est l’une des conséquences directes de l’intervention française en Libye”. Ensuite, “depuis plus de six ans, la présence des forces françaises et internationales au Mali n’a pu apporter des solutions attendues par les peuples du Sahel en général et du Mali en particulier.” Nous ajouterons que l’attaque de Konna ayant occasionné son intervention recèle énormément de zones d’ombre sur le traitement très favorable réservé à Iyad Ag Ghali qui ne fait l’objet d’aucune traque ou tentative d’élimination de la France depuis lors.
Ceux qui pensent alors que tout a été orchestré pour pouvoir intervenir afin de chasser les narco-djihadistes uniquement dans le but de repositionner le Mnla à Kidal et l’y sécuriser, ne semblent pas avoir tort. En effet, le Mnla qui s’était allié aux différents démembrements de la centrale terroriste ne contrôlait plus rien, chassé par le Mujao et Aqmi. A ce jour, les Maliens, incrédules, attendent toujours que la France prouve le contraire envers le Mnla, mais en vain.
C’est donc à juste titre que, sans circonlocution aucune, le Mouvement Maliens Tout Court relève, haut et fort, que “ce Ton du président français est d’une autre époque, assimilable pour l’opinion nationale malienne à un chantage, de mépris, d’humiliation et de déshonneur.”
En plus, écrit le Mouvement dans sa déclaration : “Conscients de la sous-traitance de la sécurité de nos Etats n’est pas une solution pérenne…Nous invitons nos chefs d’Etats du G5 Sahel, de rester sereins, d’écouter la voix de leurs peuples et de mettre l’intérêt supérieur de nos pays au-dessus de tout.”
N’est-ce pas là une vraie défiance envers Emmanuel Macron qui devait finalement être bien embarrassée après sa sortie trop controversée, son initiative de “convoquer” les chefs d’Etat du G5-Sahel devenant finalement une patate chaude entre ses mains.
Amadou Bamba NIANG
Source: Aujourdhui-Mali